Une trentaine de pays participent à un projet confidentiel de partage de données concernant les organisations jihadistes dans le monde, qui sont susceptibles d'alimenter les procédures judiciaires, affirme jeudi le quotidien Le Monde.
Selon une enquête publiée dans l'édition datée de vendredi du quotidien, le projet "Gallant Phoenix" piloté par les Etats-Unis existe depuis 2016, installé dans une base militaire américaine en Jordanie.
Il a pour objectif de "recenser et centraliser l'intégralité des traces laissées par les jihadistes de tous bords, partout dans le monde, afin de les poursuivre quoi qu'il advienne, potentiellement jusque devant les tribunaux".
Ces "preuves de guerre" proviennent "de tout ce qui a pu être laissé comme traces sur la Toile et les réseaux sociaux ou abandonné sur le terrain par des groupes jihadistes, ou encore retrouvé sur eux quand ils ont été faits prisonniers", précise le quotidien qui cite comme principaux contributeurs l'armée irakienne, les forces kurdes, des pays de l'Otan et des membres de la coalition internationale antijihadiste au levant.
"Toutes les armées du monde ont toujours pris soin de recueillir les effets abandonnés par leurs ennemis. Mais, en d'autres temps, ces éléments seraient en grande partie restés entre les seules mains des services de renseignement militaires. Dans le cadre de +Gallant Phoenix+, les méthodes de recueil de ces indices se sont vues encadrées et systématisées", explique encore l'enquête.
La France a adhéré au projet en 2017, selon Le Monde, affirmant qu'environ 700 documents relatifs à 500 jihadistes présumés ont été versés à des procédures pour terrorisme.
Sollicité par l'AFP, le ministère des Armées n'a fait aucun commentaire. Mais le parquet national anti-terroriste (PNAT) lui a confirmé la participation de la France, notamment au procès dit "Ulysse", du nom d'une opération de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) qui avait réussi à tromper la direction du groupe Etat islamique.
Deux Français et un Marocain, accusés de projeter une "tuerie de masse" à Paris, ont été lourdement condamnés en février à des peines de 22 à 30 ans de prison dans ce dossier.
"Les 8 preuves de guerre produites à l'audience proviennent de ce programme de coopération judiciaire franco-américain. La DGSI est un partenaire majeur du FBI et la France est le pays ayant le plus développé la judiciarisation de ces éléments recueillis sur zone", a expliqué jeudi à l'AFP Benjamin Chambre, avocat général représentant le PNAT au procès.
"Gallant Phoenix" ne figure pas en tant que tel dans l'ordonnance de mise en accusation de l'affaire. Mais sont évoquées en plusieurs points des informations obtenues de services de renseignement et de police étrangers. Et au cours du procès, l'avocat général avait fait état de plusieurs "preuves de guerre".
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