L'opposante béninoise Reckya Madougou, dont la candidature à la présidentielle du 11 avril a été rejetée, a été interpellée mercredi pour être entendue dans une affaire de terrorisme, a annoncé jeudi le procureur d'un tribunal spécial à Porto-Novo.
Mme "Madougou et certains membres de sa formation politique ont, selon toute vraisemblance, formé le dessein de perturber le déroulement du prochain scrutin en perpétrant des actes de terreur de grande ampleur", a déclaré Elonm Mario Metonou, magistrat du Parquet à la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet).
Selon ce procureur, cité dans un communiqué, Mme Madougou est accusée d'avoir fait parvenir de l'argent à un ancien officier de l'armée, afin qu'il se charge du "meurtre d'une autorité influente" d'une ville du Nord du Bénin, puis de "l'élimination d'une seconde autorité politique à l'occasion des obsèques de la première victime".
"Le but de ces manoeuvres est de provoquer la terreur, le chaos, et de parvenir ainsi à faire suspendre le processus électoral en cours", ajoute le procureur de la Criet, tribunal décrié comme étant un instrument judiciaire au service du pouvoir pour museler l'opposition.
Selon le Parquet, l'un des plus proches collaborateurs de la candidate, Georges Sacca, a rencontré le 26 février le colonel Ibrahim Mama Toure, afin de s'entendre sur cette mission criminelle. Les deux ont été interpellés par la police après la présumée remise de fonds.
"De l'aveu du colonel, il ressort que cette somme a été envoyée par Mme Madougou", justifiant "l'interpellation de cette dernière", selon le communiqué.
Mme Madougou a été interpellée mercredi soir à Porto-Novo en présence de Joël Aïvo, un autre candidat de l'opposition recalé pour l'élection présidentielle.
Quelques minutes avant son arrestation, la cheffe de file du parti Les Démocrates, proche de l'ancien président Boni Yayi, avait pris part à une réunion politique au cours de laquelle elle a dénoncé les pratiques du régime du président Patrice Talon.
"Nous ne reculerons pas quelles que soient les intimidations, les obstacles et les brimades", y a également soutenu Joël Aïvo.
Mardi, deux militants du parti de Mme Madougou ont été inculpés d'"association de malfaiteurs et terrorisme" et incarcérés, sans qu'il soit possible dans l'immédiat de confirmer qu'il s'agit de la même affaire.
Par ailleurs, Sébastien Ajavon, important opposant arrivé troisième au dernier scrutin présidentiel et déjà condamné en 2018 à 20 ans de prison pour trafic de drogue, a été à nouveau condamné lundi par contumace à une deuxième peine de cinq de prison ferme pour "faux, usage de faux et escroquerie".
Il vit actuellement en exil en France comme la grande majorité des opposants de poids.
Au moment de son élection en 2016, M. Talon avait affirmé vouloir effectuer un mandat unique, avant de se rétracter et d'annoncer sa candidature mi-janvier.
Il est accusé d'avoir amorcé un tournant autoritaire dans un pays réputé pour être un exemple de démocratie en Afrique de l'Ouest.
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