Une centaine de surveillants ont bloqué jeudi l'accès à la prison d'Arles (Bouches-du-Rhône) à l'appel de trois syndicats pour protester contre les procédures disciplinaires annoncées contre un surveillant de l'établissement après la remise d'un rapport sur l'assassinat du militant indépendantiste corse Yvan Colonna.
Les surveillants, certains en uniforme, ont brûlé palettes et pneus devant l'entrée de cette maison centrale, ont constaté des journalistes de l'AFP. Des banderoles avec les noms des syndicats à l'origine de la protestation -- Ufap Unsa Justice, CGT, FO-- ont été accrochées à l'entrée de la prison.
"On est là en soutien de notre collègue injustement accusé, les responsabilités sont à tous les niveaux mais certainement pas au bas de l'échelle. C'est inadmissible de trouver un bouc-émissaire pour couvrir les erreurs de l'administration", a dénoncé auprès de l'AFP Thomas Forner, délégué Ufap d'Arles.
"C'est un surveillant qui a plus de trente ans de carrière. N'importe qui aurait agi comme lui à sa place", a approuvé Eddino Wojak, délégué FO de la prison.
"Pour des raisons politiques, on veut qu'une tête tombe. Mais il n'est pas question que notre collègue serve de fusible. On restera solidaire", a assuré le délégué CGT, Ahmed Kakbi.
La Première ministre Elisabeth Borne avait annoncé jeudi dernier "le déclenchement de procédures disciplinaires" à l'encontre de l'ex-directrice de la prison et d'un surveillant, après la remise d'un rapport sur l'agression mortelle d'Yvan Colonna, qui concluait à des "manquements" de leur part.
"On a fait un rapport à charge, la lumière n'a pas été faite, c'est trop facile de condamner un simple surveillant pour que d'autres échappent à la justice. Aujourd'hui, tous les agents sur le territoire se sentent concernés", a poursuivi M. Forner en demandant la levée des sanctions contre le surveillant pointé du doigt par le rapport.
Le 2 mars, Yvan Colonna avait été violemment agressé dans la salle de sports de la maison centrale par Franck Elong Abé, un homme de 36 ans qui purgeait plusieurs peines dont une de neuf ans pour "association de malfaiteurs terroriste". Il est décédé des suites de ses blessures après trois semaines de coma.
Le surveillant chargé de l'aile où se trouvait l'indépendantiste corse, qui purgeait une peine de réclusion à perpétuité pour l'assassinat du préfet Claude Erignac, a fait preuve d'un "net défaut de vigilance" en restant "sans aucun motif éloigné" du lieu des faits, qui ont duré neuf minutes, a notamment conclut le rapport de l'Inspection générale de la justice (IGJ).
A la prison d'Arles, "il y a un rez-de-chaussée avec deux ailes, il ne pouvait pas être au four et au moulin. Il était sur son secteur, pas parti se promener", avait argué mardi Thomas Forner en annonçant à l'AFP l'action de blocage.
"Et que faisait chez nous un radicalisé, connu pour violences, qui n'est pas passé par le quartier d'évaluation de la radicalisation?", a-t-il demandé jeudi.
"A Arles, on accueille tous les publics. Vous ouvrez une porte et vous êtes face à un détenu terroriste, une autre, vous avez un détenu de droit commun, une troisième, un détenu avec des problèmes psychiatriques, la porte suivante un radicalisé. On n'a pas les moyens de gérer tous ces profils", a ajouté M. Forner en s'adressant au garde des Sceaux.
"M. le ministre il est temps de prendre conscience que les surveillants sont des professionnels qui agissent au mieux de leurs capacités mais que les moyens n'y sont pas".
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