La commission anticorruption du Bangladesh a lancé une enquête visant le Nobel de la paix 2006 et pionnier du micro-crédit, Mohammad Yunus, soupçonné de détournement de fonds d'une société de télécoms qu'il préside, a-t-elle déclaré jeudi.
L'ouverture de l'enquête de la commission fait suite à des accusations formulées par des inspecteurs d'usine contre le conseil d'administration de Grameen télécoms (GT) que préside M. Yunus, a déclaré à l'AFP Md. Mahbub Hossain, secrétaire du gendarme anticorruption.
Elle vise M. Yunus et d'autres membres du conseil d'administration de GT, plus grande société de téléphonie mobile du pays, qui détient 34% de ses parts.
Les inspecteurs accusent le conseil d'administration de GT d'avoir blanchi et détourné 29,77 milliards de taka (315 millions de dollars) et subtilisé 5 millions de dollars destinés au fonds de protection sociale de GT.
Le droit du travail bangladais impose à toutes les entreprises de verser une participation aux bénéfices de cinq pour cent aux employés.
M. Yunus n'a pas fait de commentaire dans l'immédiat.
L'affaire survient quelques mois après que GT était parvenu à un accord à l'amiable de 50 millions de dollars pour solder les poursuites d'une centaine de salariés qui reprochait à l'entreprise de les avoir privés de participations aux bénéfices garanties par le droit du travail.
L'économiste de 82 ans est salué internationalement pour avoir contribué à l'éradication de l'extrême pauvreté au Bangladesh en proposant des microcrédits à des dizaines de millions de femmes en milieu rural par l'intermédiaire de la Grameen Bank, qu'il a fondée 1983.
Il a reçu le prix Nobel de la paix en 2006 pour son travail de promotion du développement économique.
M. Yunus est en mauvais termes avec la Première ministre Sheick Hasina depuis sa brève incursion sur la scène politique du pays, en 2007. Mme Hasina l'avait accusé de "sucer le sang des pauvres" avec ses taux d'intérêt.
Il avait été ensuite limogé de la direction de la Grameen Bank, micro-prêteur pionnier et co-lauréat du prix Nobel. Cette éviction avait été attribuée par ses partisans à Mme Hasina.
M. Yunus avait contesté ce licenciement devant la plus haute juridiction du pays, en vain.
Mme Hasina lui avait aussi reproché l'annulation par la Banque mondiale d'un prêt de 1,2 milliard de dollars destiné à la construction d'un pont, près de la capitale Dacca. Le Nobel n'a jamais cessé de démentir cette accusation.
Le pont a finalement été inauguré le mois dernier, avec plusieurs années de retard, et Mme Hasina n'a pas manqué l'occasion de blâmer M. Yunus, méritant qu'il soit, a-t-elle dit, "plongé dans une rivière".
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