Une tentative de déstabilisation électorale a-t-elle eu lieu en 2017, lors des législatives à Toulouse? Une information judiciaire a été ouverte, elle vise un ancien responsable régional des Finances publiques, une ex-parlementaire et un ancien procureur adjoint.
"J'ai ouvert une information judiciaire le 18 janvier visant quatre personnes, soupçonnées d'avoir engagé une démarche visant à décrédibiliser la candidature" de Corinne Vignon, finalement élue en 2017 députée LREM dans la 3e circonscription de Haute-Garonne, a dit à l'AFP le procureur de Toulouse Dominique Alzéari.
Une autre source a précisé à l'AFP que les mis en cause, liés par "une sorte de pacte", étaient à l'époque des faits procureur adjoint de Toulouse, Patrice Michel, une députée LR, Laurence Arribagé, et le directeur adjoint des finances publiques de la région Occitanie. Le 4e mis en cause est un chef d'entreprise dans l'immobilier.
Le parquet de Toulouse a notamment requis leur mise en examen pour prise illégale d'intérêt, complicité ou recel du même chef.
Le réquisitoire introductif du parquet de Toulouse mentionne également les chefs de corruption et de violation du secret professionnel pour le responsable du fisc, pour avoir dénoncé, sans en informer sa hiérarchie, sans enquête préalable, des faits de nature à porter préjudice à Corinne Vignon, au bénéfice de Laurence Arribagé, avec la complicité du magistrat, selon une source proche de l'enquête.
- Dépaysement -La complicité de violation du secret professionnel et la corruption sont retenus contre Laurence Arribagé, épouse d'une ancienne figure du Toulouse football Club.
Contactée par l'AFP, Mme Arribagé n'a pas souhaité réagir dans l'immédiat.
Désormais à la retraite, l'ancien procureur adjoint a quant à lui confié à l'AFP sa surprise en réfutant "catégoriquement cette notion de prise illégale d'intérêt".
"C'est surréaliste. Le responsable des Finances publiques a téléphoné pour dénoncer des faits de travail clandestin et de fraude fiscale. J'ai agi comme n'importe quel parquetier aurait agi, en lui demandant de formaliser ses allégations par un courrier que je n'ai à aucun moment ni lu, ni traité , ni suivi", a-t-il assuré.
L'affaire remonte à l'entre-deux tours des élections législatives en juin 2017. La candidate LREM était alors aux prises avec la députée sortante, Laurence Arribagé, lorsqu'une dénonciation qualifiée de "bidon" par une source proche de l'enquête, pour travail dissimulé, a été lancée par le cadre du fisc contre Mme Vignon.
Mme Vignon, astrologue amateur en plus d'être commerciale, avait réalisé trois thèmes astraux quelques années plus tôt, pour un montant d'environ 200 euros, sans les déclarer. Les faits ayant été jugés dérisoires, le parquet avait finalement classé sans suite.
Interrogé par l'AFP, le procureur général de la cour d'appel de Toulouse Franck Rastoul a indiqué qu'il allait saisir la Cour de cassation pour que le présent dossier soit dépaysé.
Il appartiendra alors à un juge d'instruction de donner d'éventuelles suites judiciaires.
- "Instrumentalisation de la justice" -"L'instrumentalisation de la justice est inacceptable, a fortiori par détournement du Code de procédure pénale", dénonce le procureur général.
"La justice passe partout, y compris chez elle si nécessaire", a-t-il commenté en référence au magistrat mis en cause qui était dernièrement conseiller juridique du préfet de région.
L'ancien N.2 des Finances publiques d'Occitanie Marc Menvielle, à l'origine de la dénonciation de juin 2017 contre la députée, est également impliqué dans une autre affaire, qui lui a valu d'être suspendu de ses fonctions.
Lui et son épouse, également fonctionnaire des impôts, seront jugés pour corruption, violation du secret professionnel et concussion le 5 mars par le tribunal correctionnel de Toulouse.
Ils sont soupçonnés d'avoir prévenu des chefs d'entreprises d'un contrôle fiscal imminent et d'avoir freiné le mécanisme de recouvrement de la dette fiscale de connaissances, visées par un redressement fiscal.
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