Une association a lancé lundi une enquête pour recueillir la parole de personnes handicapées victimes d'inceste, un "angle mort de la société", espérant collecter les témoignages sur les réseaux sociaux via le mot-dièse #incestehandicap.
Inspiré du récent #Metooinceste, lancé dans le sillage de l'émoi provoqué par le livre de Camille Kouchner "La Familia grande", ce hashtag doit permettre "d'aller chercher une parole difficile, ignorée", a présenté Danielle Michel-Chich, l'une des trois présidentes de l'association Femmes pour le dire, femmes pour agir (FDFA).
L'objectif est "de dresser un état des lieux, car il n'y a pas de chiffres, pas de statistiques, ni de politique spécifique sur ce sujet, un angle mort de la société", a-t-elle ajouté lors d'une conférence de presse.
Spécialisée dans la lutte contre les violences faites aux femmes handicapées, FDFA dispose d'une ligne d'écoute anonyme et gratuite pour les victimes (Ecoute violences femmes handicapées: 01.40.47.06.06).
Sur les trois dernières années, 3% des appels passés sur cette ligne ont concerné des faits d'inceste, a détaillé Jocelyne Vaysse, psychiatre et écoutante de l'association.
Toutefois, "pour 6% des appels, des femmes venant parler de violences conjugales subies au présent ont aussi évoqué des violences incestueuses subies par le passé, dans la prime enfance".
"Souvent, on n'apprend qu'incidemment les faits d'inceste, au cours de longs entretiens. Toutes les victimes en parlent avec culpabilité et honte", a ajouté la psychiatre, constatant toutefois "une plus grande prise de conscience grâce à l'actualité".
"L'état de vulnérabilité fait que ces enfants sont des proies faciles. De plus, les personnes handicapées peuvent avoir des difficultés, voire une incapacité, à dire, à raconter les faits incestueux, qui sont déjà difficiles à dire pour toute victime", a poursuivi Alain Piot, sociologue et administrateur de l'association.
Pour chaque témoignage recueilli sous le mot-dièse, une sociologue - recrutée en stage par de l'association - contactera les personnes pour, si elles le souhaitent, mener des entretiens individuels et être suivie par les bénévoles de l'association.
FDFA espère pouvoir rendre ses conclusions autour du 25 novembre, journée annuelle consacrée à la lutte contre les violences faites aux femmes.
Elle souhaite aussi apporter "une première pierre" à la Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants, lancée début mars pour au moins deux ans par le gouvernement.
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