Deux professeurs commencent vendredi le 11e jour d'une grève de la faim qu'ils comptent poursuivre durant les congés scolaires de février afin que leur collège soit classé en établissement prioritaire Rep+, alors que le rectorat assure leur avoir fourni des moyens "équivalents".
"Au regard des mesures actées" dans cet établissement situé à Givors, entre Lyon et Saint-Étienne, "le mouvement engagé par les deux enseignants grévistes n'a pas de justification et plus de raison de se poursuivre", déclare le rectorat dans un communiqué transmis à la presse jeudi vers 18h15.
Il a mis en colère les intéressés car, selon eux, une réunion de négociations était alors toujours en cours avec la direction académique. "Cette façon de procéder est inacceptable, les collègues sont plus remontés que jamais", a déclaré à l'AFP Pierre R., qui enseigne l'histoire-géographie au collège Lucie Aubrac.
Depuis le 25 janvier, avec sa collègue d'arts plastiques Leila M., il ne se nourrit que d'eau et de bouillons et tous deux passant leurs nuits dans le collège. "On sera toujours présent pendant les vacances" d'hiver, assure-t-il, avec le soutien d'un collectif.
Leur action a été déclenchée par une série d'agressions d'enseignants par des élèves. Mais elle s'inscrit dans une lutte ancienne pour que cet établissement de 540 élèves, qui fait partie d'un réseau d'éducation prioritaire (Rep), soit classé Rep+ pour obtenir des moyens supplémentaires.
Le collège était éligible en 2015 mais la priorité a finalement été donnée à un autre dans l'académie, figeant la situation pour quatre ans. Le sésame était donc attendu pour 2019, d'autant plus qu'un changement de sectorisation en 2018 a dégradé le profil social de l'établissement. Mais la carte nationale de l'éducation prioritaire, en cours de refonte, ne changera pas avant la rentrée 2022.
Le rectorat assure que toutes les revendications ont cependant été satisfaites et que "l'établissement dispose aujourd'hui des moyens équivalents" à ceux d'un collège Rep+ dans l'académie, "rapporté à son nombre d'élèves" et à "contexte social comparable".
Un demi-poste de conseiller principal d'éducation et un poste d'assistant d'éducation ont été créés ; engagement a été pris de respecter les seuils d'élèves par classe (25 en sixième, 26 en cinquième, quatrième et troisième) ; le ratio heures postes/heures supplémentaires a été revu et la dotation globale horaire "ajustée", fait-on valoir.
"Ce qu'on réclame vraiment, on ne l'obtient pas", rétorque Pierre R. En l'occurrence, une heure hebdomadaire de concertation entre enseignants, sur leur temps de travail, et l'ouverture d'une classe supplémentaire dès que le nombre d'élèves attendu pour la prochaine rentrée est au maximum.
Les grévistes s'en remettent désormais au ministre de l'Éducation nationale, auquel ils ont demandé une audience.
"Les moyens supplémentaires engagés ne sont qu'un premier pas" et "n'apportent aucun soutien au personnel des écoles du réseau, également en grande difficulté", souligne le collectif Aubrac dans un courrier adressé à Jean-Michel Blanquer en lui demandant "un classement en urgence" en Rep+. Après déjà six ans d'attente, la rentrée 2022 leur paraît trop loin.
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