Plusieurs centaines d'exilés se sont rassemblés et ont installé jeudi des tentes Place de la République à Paris, où un précédent campement avait été violemment démantelé par les forces de l'ordre en novembre, suscitant une vague d'indignation, a constaté un journaliste de l'AFP.
Vers 18h30, peu avant l'entrée en vigueur du couvre-feu, près de 400 tentes ont été déployés sur la place, avec l'aide de plusieurs associations de soutien aux migrants dont Utopia56, déjà à l'origine de la précédente installation.
A l'occasion de la "Nuit de la solidarité", une opération de recensement des sans-abri, ces associations, regroupées dans un "collectif réquisitions", accompagnaient les migrants "pour demander leur hébergement immédiat, stable et décent", ont-elles conjointement affirmé dans une déclaration.
Dans une ambiance détendue et avec une présence policière discrète, environ 300 personnes s'affairaient sur place, beaucoup de femmes et d'enfants originaires pour l'essentiel d'Afghanistan et d'Afrique subsaharienne.
Parmi eux Safai, un Afghan de 24 ans en France depuis 2019. "J'ai obtenu mon statut de réfugié il y a deux semaines mais rien ne se passe", a-t-il expliqué à l'AFP, "je dors parfois dans la rue ou alors je sous-loue un lit 250 euros". "Sans toit, sans sommeil, ma vie est bloquée, j'espère que ce soir on va nous trouver une solution", ajoute le jeune homme devant sa tente rouge.
Ces exilés à la rue se tournent "chaque soir" vers les associations "en quête d'une tente ou d'un hébergement, tandis que de nombreux citoyens leur ouvrent chaque soir leur porte", ont déploré ces dernières.
"Ce n'est pourtant pas aux associations ni aux habitants de mettre en place des hébergements pour faire face à l'aggravation de la crise du logement, c'est à l'Etat, car c'est la loi", ont-ils ajouté.
"On revient place de la République parce que c'est un lieu symbolique et que depuis notre dernière action rien n'a changé. On espère trouver une solution d'hébergement pour ces personnes et les mettre à l'abri. Il y a essentiellement des familles, on espère que la police fera preuve de discernement", a déclaré à l'AFP Kerill Theurillat, responsable parisien d'Utopia 56.
L'évacuation par la police des tentes déployées Place de la République le 23 novembre dernier et les violences survenues en marge de leur démantèlement (usage de gaz lacrymogène, de grenades de désencerclement ou journaliste molesté) avaient suscité une vive émotion, jusqu'au sein du gouvernement.
Le soir-même, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin avait évoqué des "images choquantes" et demandé un "rapport circonstancié" au préfet de police de Paris. L'IGPN, la "police des polices", et le parquet de Paris avaient dans la foulée ouvert une enquête sur ces violences.
Les occupants de la Place de la République ont prévenu jeudi soir qu'ils resteraient "pacifiquement sur place jusqu'à la mise à l'abri de toutes les personnes sans-abri présentes".
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