Prévenir la délinquance du quotidien, répondre aux incivilités et surtout "regagner la confiance des gens". Au gré de ses 20 km à pied entre Garges-lès-Gonesse et Sarcelles (Val-d'Oise), Yann remet au goût du jour la police de proximité dans les cités.
Il y a trois ans, à ses débuts dans la Police de sécurité du quotidien (PSQ), les incursions de l'officier et de sa brigade dans les quartiers dits "de reconquête républicaine" du Val-d'Oise étaient "compliquées".
Il a fallu "regagner la confiance des gens", explique ce fonctionnaire de 30 ans, arborant une casquette bleue siglée "police" pendant sa patrouille, à une quinzaine de kilomètres au nord de Paris.
"Le fait d'être à pied nous rend accessibles. Un échange se fait avec la population, ne serait-ce qu'un +bonjour+".
la PSQ opère de 06H00 à 21H00 et "ne s'interdit aucun quartier", affirme Fabienne Azalbert, commissaire de Sarcelles dont dépend Garges-lès-Gonesse.
Sa mission est de renouer le lien entre police et population, une thématique qui sera abordée lundi lors du "Beauvau de la sécurité".
Dans chaque quartier, Yann effectue "un diagnostic de ce qui ne va pas, ce qu'on peut faire, à quel endroit il faut passer".
Aux abords de la gare Garges-Sarcelles, point névralgique des deux villes, la PSQ se rend tous les jours. Un point de deal est identifié où "de petits entrepreneurs travaillent régulièrement".
Ce jour-là, l'un d'eux écopera d'une amende forfaitaire délictuelle pour usage de stupéfiants. Un autre, "multirécidiviste" ayant tenté de s'échapper, sera embarqué après avoir été pris avec un pochon de cannabis sur lui.
Quant aux vendeurs à la sauvette, ils se verront confisquer leurs paquets de cigarettes.
"La police de sécurité du quotidien, ce n'est pas une police brutale qui inspire la peur, c'est une police forte qui inspire le respect", avait plaidé à sa création Christophe Castaner, alors ministre de l'Intérieur, mettant en oeuvre une promesse d'Emmanuel Macron.
Garage à l'air libre de "mécanique sauvage", occupations de parkings pour du commerce illégal, rixes, vols à la tire... la liste des complaintes des habitants est longue, selon Mme Azalbert.
- Capter les 11-25 ans -Une application concrète de cette "sécurité du sur-mesure", selon la commissaire, est la cellule anti-rodéo.
Si "intercepter les motos est trop dangereux", les "informations du terrain" permettent d'identifier le conducteur, de confisquer l'engin et, pour certains, des peines d'emprisonnement sont prononcées, indique-t-elle.
Dans le quartier de la Dame Blanche à Garges-lès-Gonesse, le gardien d'immeuble Olivier Dubois a constaté "une grande amélioration" depuis le retour de cette police de proximité remise au goût du jour.
"Le quartier est beaucoup plus calme, il y a moins de dépôts sauvages (de déchets). Dès que vous avez un souci, vous discutez avec eux, ils ne sont pas là pour vous arrêter", se réjouit-il.
Pour Sylvie, 45 ans de vie à Garges, "il en faut plus, des policiers comme ça. Moi je dis +merci+". Tout en promenant son chien, elle interpelle l'équipe de la PSQ du jour: "Messieurs, il faut faire quelque chose pour les voitures qui se garent sur les places handicapés!".
Sur le parcours, un autre habitant salue l'équipe: "Les dealers ont arrêté de squatter mon immeuble. On en avait ras-le-bol. On a fait une pétition qu'on a envoyée à la commissaire", confie ce riverain, préférant taire son nom après avoir été agressé pour avoir "balancé" le point de deal.
Si la PSQ est accueillie avec un réel enthousiasme, "la tranche des 11-25 ans" est à conquérir, reconnaît la commissaire Azalbert. Sur les 67.000 habitants que comptent Sarcelles et Garges, 43% de la population a moins de 25 ans.
A la question des violences policières, Yann répond faire son métier "avec passion": "mon équipe et moi on n'a rien à se reprocher", dit-il.
"Quand il y a des violences, il y a des sanctions", rétorque de son côté la commissaire.
Une posture qui ne convainc pas de nombreux jeunes Val-d'Oisiens en rupture avec la police.
Pour tenter une réconciliation, des stagiaires de classe de 3e sont accueillis dans les commissariats du département et "des cafés citoyens" sont organisés.
"On explique qu'on ne contrôle pas parce que cela nous fait plaisir mais parce que la population nous dit +on n'en peut plus+, ça deale, ça boit, ça crie, ça fume", assure Fabienne Azalbert.
Son prochain objectif est de capter les besoins des "jeunes femmes et des mamans" qui ne sont pas forcément "dans les radars" de la PSQ.
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