L'ONU a exhorté lundi les donateurs internationaux à assurer une aide de 3,85 milliards de dollars pour le Yémen afin d'empêcher la famine d'"engloutir" ce pays dévasté par la guerre et où "l'enfance est désormais un enfer".
Plus de 100 gouvernements et donateurs particuliers participent à une réunion virtuelle co-organisée par la Suède et la Suisse pour le Yémen, où les violences se sont intensifiées à Marib, dans le nord de ce pays très pauvre de la péninsule arabique.
Les rebelles Houthis ont repris le 8 février une offensive pour s'emparer de ce dernier bastion du gouvernement dans le Nord, tout en multipliant les attaques vers le territoire saoudien voisin.
"J'implore tous les donateurs de répondre généreusement à notre appel afin d'empêcher la famine d'engloutir le pays", a déclaré le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, à l'ouverture de la réunion.
"Aujourd'hui, réduire l'aide est une condamnation à mort pour des familles entières", a-t-il ajouté. "Chaque dollar compte."
Le conflit, déclenché en 2014 par une offensive des rebelles qui ont conquis de vastes pans du territoire, a tué des dizaines de milliers de personnes selon des ONG et poussé des millions d'autres au bord de la famine. C'est la pire crise humanitaire au monde d'après l'ONU.
Dans un contexte de pandémie, la situation a empiré avec la chute des financements de l'aide. L'ONU a appelé lundi à un "financement immédiat".
"Pour la plupart des gens, la vie au Yémen est désormais insupportable (...). L'enfance est un enfer", a déclaré M. Guterres.
- "Urgence" -
L'ONU compte surtout sur les riches pays du Golfe pour recueillir les 3,85 milliards de dollars (3,18 milliards d'euros), après avoir manqué de 1,5 milliard de dollars sur les 3,4 milliards nécessaires l'année dernière.
Certaines des promesses de lundi, dont les 191 millions de dollars des Etats-Unis et les 430 millions de dollars de l'Arabie Saoudite, sont inférieures aux dons de 2020. L'Allemagne et la Norvège ont eux augmenté leurs contributions en promettant respectivement 200 millions de dollars pour 2021.
Selon les derniers chiffres de l'ONU, plus de 16 millions de Yéménites, soit environ la moitié de la population de 29 millions d'habitants, risquent d'être confrontés à la faim cette année. Près de 50.000 d'entre eux "meurent déjà de faim dans des conditions proches de la famine" et 400.000 enfants de moins de 5 ans pourraient mourir de malnutrition aiguë "sans traitement d'urgence".
En septembre 2020, l'ONU a révélé que l'aide essentielle avait été supprimée dans 300 centres de santé du Yémen en raison du manque de financement, et que plus d'un tiers de ses principaux programmes humanitaires avaient été réduits ou interrompus.
Douze organisations, dont Save the Children, Oxfam et Action contre la Faim, craignent une "catastrophe".
"Avec cinq millions de personnes au bord de la famine et plus des deux tiers de la population du pays ayant besoin d'aide humanitaire ou de protection, la situation ne pourrait pas être plus urgente", ont-elles déclaré dans un communiqué.
- "Mettre fin au conflit" -
La conférence se tient à un moment où les Etats-Unis cherchent à relancer le dialogue pour résoudre le conflit. Washington a retiré les Houthis de la liste des "organisations terroristes" et cessé de soutenir l'intervention depuis 2015 au Yémen d'une coalition menée par l'Arabie saoudite qui aide militairement le pouvoir.
Les Houthis ont néanmoins intensifié leurs opérations contre les forces du gouvernement et l'Arabie saoudite. Et l'aviation saoudienne pilonne les positions des rebelles à Marib afin de les empêcher d'avancer.
Lundi, le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken a pressé les Houthis de cesser leur offensive et de "se joindre aux Saoudiens et au gouvernement du Yémen en agissant de manière constructive en faveur de la paix".
"L'aide seule ne mettra pas fin au conflit. Nous ne pouvons mettre fin à la crise humanitaire au Yémen qu'en mettant fin à la guerre", a-t-il affirmé lors de la réunion.
L'ONU prévoit un désastre humanitaire si les combats pour Marib continuent, rappelant qu'ils ont déjà mis "des millions de civils en danger". Cette région abrite de nombreux déplacés, dont des centaines de familles ont repris la fuite.
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