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Musique: L'Impératrice, toujours en conquête #

3/29/2021, 7:00 AM

Groupe français à l'audience internationale, L'Impératrice élargit encore son horizon avec un deuxième album à la belle lumière funky projetée sur des questionnements intimes et sociétaux.

Quand l'AFP rencontre les six membres de cette formation, le mot "rupture" revient sur leurs lèvres pour décrire leur démarche, à entendre ici comme un pas de côté, une libération, un refus des contraintes.

La formation ne renie pas les recettes de "Matahari", premier opus qui l'a emmené sur les scènes de Turquie ou du Mexique, sans oublier cette prestigieuse invitation au festival XXL de Coachella en Californie, malheureusement annulé pour cause de crise sanitaire.

Mais les curseurs ont été poussés plus loin. Musicalement, L'Impératrice fait toujours danser, avec un alliage disco-pop-funk savamment déconstruit sous la supervision des gourous du son Neal Pogue (Tyler the Creator, Outkast ou encore Earth, Wind & Fire) et Renaud Letang (Feist ou Philippe Katerine). Les "couleurs chaudes" des morceaux doivent sans doute aussi beaucoup "à deux semaines de composition à Tanger", comme l'admettent Hagni Gwon (claviers) et Achille Trocellier (guitares).

Pour les textes, le groupe ne craint plus de s'emparer des débats de société ou de parler à coeur ouvert, comme le suggère le titre de l'album (sorti chez Microqlima) "Tako Tsubo", soit dans une formule imagée en japonais, un vertige qui naît d'une émotion forte.

- "Donner la parole aux femmes" -

"Ce pas qu'on a franchi est venu de Flore (la chanteuse) qui a décidé de parler de certaines choses et qu'on a encouragé", décrypte Charles de Boisseguin (claviers).

Flore Benguigui a en effet déjà pris la parole dans les médias pour dénoncer le sexisme à l'oeuvre dans l'industrie musicale, milieu qui voit monter actuellement la vague #MeToo (rebaptisé #MusicToo). L'artiste, dégoûtée à ses débuts par un machisme décomplexé, avait même songé à abandonner la musique et à reprendre ses études de lettres.

Mais la rencontre avec les cinq garçons de L'Impératrice a changé la donne. "Beaucoup de femmes se sont découragées dans la musique mais c'est important de dire qu'en persévérant, tout en ne se laissant pas embarquer dans des schémas toxiques, il y a de belles rencontres à faire", insiste-t-elle.

"Donner la parole aux femmes dans la musique va leur permettre d'accéder à des postes de responsabilité, c'est le moment de prendre le problème à bras le corps, des structures comme +Change de disque+ ou +Diva+ proposent des vraies solutions pour les femmes", poursuit-elle.

Flore propose d'ailleurs un podcast sur Tsugi Radio, "Cherchez la femme", qui met en valeurs des musiciennes/productrices/cheffes de structures musicales.

- "Charcuter sur les réseaux" -

Et la chanson "Peur des filles" sur "Tako Tsubo" embrasse plus largement la place des femmes dans le monde et le regard porté sur elles.

Dans le disque, les thématiques gravitent plus généralement autour des cases à remplir ou pas aux yeux de l'autre, comme "Voodoo" ou "L'équilibriste". Autre titre-phare, "Hématome", co-écrit (comme "Fou") avec Fils Cara (une des figures de la scène montante de Saint-Etienne), aborde la cruauté par écran interposé sur les réseaux sociaux.

Une chanson qui sent le vécu, à plusieurs niveaux. "Quand on avait fait une reprise de PNL, on s'était vraiment fait charcuter sur les réseaux, +comment, vous les ptits bobos des beaux quartiers, avez-vous osé la chanter ?+, puis c'était parti en injure sexiste à mort, c'était hyper-violent", raconte Charles.

Au delà de cet épisode, c'est l'omniprésence des réseaux sociaux qui interpelle les six comparses du groupe. "C'est troublant de vouloir combler du vide, de se mettre en vitrine", dissèque Charles, bien conscient que L'Impératrice, en tant que formation, est "obligée de passer par ce médium pour fidéliser ses fans".

Et Flore de conclure sur le sujet: "On en parlait récemment avec le groupe Catastrophe (du label Tricatel, ndlr) en se disant +est-ce que vous aussi vous avez le stress du prochain post ?+".

pgr/rh/dlm

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