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Les jeunes Kényans regardent de loin le "sale jeu" électoral #

8/8/2022, 6:53 AM
Kisumu, KEN

Quand retentit le jingle de la campagne, la foule se lève. Hellen Atieno suit le mouvement, se trémousse, à l'unisson du public du meeting à Kisumu, dans l'ouest du Kenya. Pour autant le 9 août, la jeune femme n'ira pas voter.

"Je suis juste venue au meeting parce qu'il y a de l'argent", assure cette Kényane de 23 ans, appâtée comme tant d'autres par les fréquents cadeaux distribués pour draguer les électeurs.

Sans emploi, l'ancienne poissonnière se dit tellement lassée par la classe politique qu'elle pense rester chez elle plutôt que d'aller voter pour élire le nouveau président, le parlement et les représentants locaux.

Son apathie est loin d'être une exception parmi les jeunes, composante essentielle de ce pays d'Afrique de l'Est.

Trois Kényans sur quatre ont moins de 34 ans, selon des chiffres officiels, et beaucoup parmi eux se détournent d'un jeu politique qu'ils jugent vicié par la corruption.

Ils sont 5% de moins comparé à 2017 à s'être inscrits sur les listes électorales cette année, contrairement aux plus de 35 ans dont le nombre a augmenté, indiquait en juin la commission électorale du Kenya (IEBC).

Le 9 août, 22,1 millions d'électeurs sont appelés aux urnes, dont un peu moins de 40% de jeunes, selon l'IEBC.

Pour les séduire, les candidats distribuent tee-shirts, casquettes, parapluies voire de la farine de maïs - l'aliment de base dans le pays - à quiconque assiste à leurs meetings.

Les petites coupures coulent aussi à flots, et le ministre de l'Intérieur Fred Matiangi a même évoqué mercredi une "pénurie" de billets de 100 et 200 shillings dans les banques.

Ces pots-de-vin, pourtant passibles d'une amende pouvant aller jusqu'à 2 millions de shillings kényans (environ 17.000 euros) et six ans d'emprisonnement, n'ont rien de nouveau. Mais l'inflation galopante, exacerbée par l'impact de la guerre en Ukraine, et le chômage ont aiguisé les appétits.

Boucher de 19 ans, Brian Denzel enchaîne les meetings ces dernières semaines, plus avide de billets que de débats politiques, synonymes selon lui de "sale jeu".

"Qui va rejeter l'argent facile qu'ils distribuent?", soupire-t-il, debout dans la queue pour toucher les 200 shillings kényans (environ 17 centimes d'euro) donnés par un homme politique local.

Le positionnement des jeunes électeurs est une des inconnues du scrutin.

La jeune génération, réputée moins encline à voter sur la base d'appartenance tribale, pourrait apaiser les tensions politico-ethniques qui secouent souvent le Kenya en période électorale, veulent croire des analystes.

Bien que moins centrés sur les questions communautaires, les jeunes paraissent toutefois dépourvus de "stabilité idéologique" et de convictions politiques, selon l'analyste politique Francis Owuor.

"Tout le monde (est) à blâmer pour ça, tant la population que les dirigeants, mais les dirigeants sont aux responsabilités, c'est donc en grande partie de leur faute", estime-t-il.

Deux candidats sont favoris dans la course à la présidence: le vice-président actuel William Ruto, 55 ans, et Raila Odinga, 77 ans, vétéran de l'opposition soutenu depuis 2018 par le chef de l'Etat sortant et son parti. Si tous deux acceptent les résultats à l'issue du scrutin du 9 août, ce serait une première depuis 2002.

Les contentieux post-électoraux sont en effet récurrents depuis l'instauration du multipartisme fin 1991 et nourrissent une désillusion certaine, en particulier chez les jeunes.

Ce désintérêt pour la politique amplifié par les contestations électorales à répétition inquiète la commission électorale.

"Nous avons fait beaucoup de sensibilisation pendant la période d'inscription sur les listes électorales, (...), mais l'apathie des électeurs est encore trop élevée", a déclaré à l'AFP Amina Soud, en charge de l'éducation au vote à l'IEBC.

Mais ni les publications sur TikTok, ni les bandes dessinées en "sheng" - l'argot local mêlant anglais et swahili - n'ont suscité d'espoir auprès de jeunes dont l'horizon se limite souvent à l'inflation, la corruption et au chômage. Cinq millions d'entre eux sont sans emploi, selon des chiffres officiels publiés en 2020.

Les élections, "ça ne m'intéresse pas", lâche Irene Awino Owino, 27 ans, propriétaire d'un salon de coiffure et probable abstentionniste, "parce que le gouvernement met ses intérêts avant les nôtres".

ho/amu/al/sva/cpy/jhd

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AUG 8

Au Kenya, la famine menace mais les yeux sont rivés sur la présidentielle #

Le nord du Kenya n'a plus vu une goutte de pluie depuis trois ans. Dans ce désert de poussière, il ne reste plus que des baies sauvages à manger.

Loka Metir nourrit ses cinq enfants avec, même si elle sait que ça les rend malades. "C'est le seul moyen de survivre", explique cette mère de famille de Purapul, hameau de huttes de chaume situé à deux jours de marche de la ville la plus proche, dans l'aride comté de Marsabit.

La Corne de l'Afrique connaît sa pire sécheresse depuis 40 ans. Au moins 18 millions de personnes connaissent une situation de faim extrême.

La faim concerne 4 millions de personnes au Kenya, plongé en pleine campagne électorale avant une élection présidentielle à forts enjeux le 9 août.

Dans les régions désertiques du nord, près de 950.000 enfants de moins de cinq ans et 134.000 femmes enceintes ou allaitantes souffrent de malnutrition aiguë, selon des chiffres officiels de juin.

Dans les trois comtés les plus durement touchés, dont celui de Marsabit, les conditions frôlent la famine.

Déjà frappée par la pandémie de coronavirus, la principale économie d'Afrique de l'Est va voir sa reprise freinée par la sécheresse, à laquelle s'ajoute l'impact de la guerre en Ukraine, a prévenu la Banque mondiale le mois dernier.

Eclipsée par les problèmes de vie chère, la sécheresse figure pourtant à peine sur l'agenda des candidats.

Dans les grandes villes, les populations ont menacé, aux cris de "pas de nourriture, pas d'élections", de boycotter le scrutin si les prix des produits essentiels (denrées alimentaires, essence...) ne baissaient pas.

Le sort du lointain nord kényan est passé "sous le tapis", estime l'économiste Timothy Njagi de l'Institut Tegemeo de politique et de développement agricoles à Nairobi.

"Comme c'est une année électorale, nous aurions pu imaginer que ce serait un sujet de discussion-clé", regrette-t-il.

Quatre saisons consécutives de pluies insuffisantes ont créé les conditions les plus sèches depuis le début des années 1980.

Rivières et puits se sont asséchés, les pâturages se sont transformés en poussière, causant la mort de plus d'1,5 million de têtes de bétail rien qu'au Kenya.

Des carcasses d'animaux jonchent les étendues rocailleuses autour de Purapul, où les familles d'éleveurs tentent de survivre sans lait, ni viande, ni monnaie d'échange pour se procurer de la nourriture.

Iripiyo Apothya a vu ses chèvres maigrir, puis mourir.

"Maintenant, je mange ce que les singes mangent", soupire cette femme de 73 ans en montrant une poignée de baies qu'elle a fait bouillir et réduire en une pâte amère: "Mais même ça s'épuise. Que peut-on faire ?"

Le village est isolé et, comme souvent dans ces régions septentrionales oubliées, il n'y a ni école, ni route, ni magasin, ni dispensaire. La ville la plus proche, Loiyangalani, se trouve à 60 kilomètres.

Les deux principaux candidats à la présidence, William Ruto et Raila Odinga, sont venus en hélicoptère faire campagne dans ces régions frappées par la sécheresse, promettant infrastructures et développement. Mais leur halte est restée brève dans ces maigres bassins de voix.

Le premier est vice-président depuis près de dix ans, le second soutenu par le président sortant. "C'est donc du perdant-perdant pour quiconque évoque le sujet", souligne Karuti Kanyinga, de l'Institut d'études sur le développement de l'Université de Nairobi.

Pour Claire Nasike, de Greenpeace Afrique, les promesses des deux candidats d'investir dans l'approvisionnement en eau et l'agriculture restent très vagues. "Les détails concrets sur la manière dont ils vont faire face aux crises climatiques n'ont pas été abordés", résume-t-elle.

Malgré son ampleur historique, cette sécheresse - qui pourrait se poursuivre en 2023 si les prévisions d'une prochaine saison des pluies défaillante se confirment - n'attire pas non plus l'attention de la communauté internationale.

Un appel pour des fonds d'aide pour l'Ukraine a récolté 1,92 milliard de dollars, soit près de 86% de son objectif, selon l'ONU. L'appel bien moindre pour la sécheresse au Kenya a été pourvu à seulement 17%.

Sous un acacia, un seul médecin examine des dizaines de mères et de nourrissons, lors de sa visite bimensuelle à Purapul.

"Le type d'aide que nous apportons n'est qu'une goutte dans l'océan", souligne James Jarso, de l'ONG World Vision, une des rares organisations caritatives à fournir de l'aide sur place.

Le gouvernement affirme avoir dépensé plus de 9 milliards de shillings kényans (76 millions de dollars) depuis que la sécheresse a été déclarée catastrophe nationale en septembre.

"Nous traversons une période économique difficile. Nous faisons tout notre possible, dans la mesure des moyens du gouvernement pour soutenir les communautés", assure Steven Mavina, préfet adjoint du comté de Loiyangalani.

À Purapul, en attendant, les villageois tirent de l'eau d'un puits insalubre. "Nous n'avons personne pour nous aider", déplore Apothya. "Je veux que les gens sachent que nous sommes en train de mourir."

np/sva/al/sba/clr/jhd

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AUG 7

Kenya: la campagne est close, pas le flot de désinformation en ligne #

8/7/2022, 6:32 AM
Nairobi, KEN

La campagne pour la présidentielle au Kenya s'est officiellement achevée samedi mais sur les réseaux sociaux, la propagande se poursuit, alimentée par une armée de trolls qui depuis des mois, derrière leurs écrans, se livrent à une dangereuse escalade de désinformation.

Dans la dernière ligne droite vers l'élection de mardi, les partisans des deux principaux candidats, le vice-président William Ruto et le vétéran Raila Odinga, ont notamment inondé les réseaux sociaux de messages accusant leur adversaire de se préparer à truquer les résultats.

"Nous voyons de plus en plus de fausses informations qui cherchent à délégitimer les résultats de l'élection avec des affirmations répandues qui affirment que le camp adverse ne gagnera que par fraude et qu'il tente de voler l'élection", souligne Benedict Manzin, analyste en charge de l'Afrique subsaharienne à la société de renseignement Sibylline.

Une figure de la campagne de Ruto a ainsi accusé l'équipe d'Odinga de vouloir truquer le scrutin après que ce dernier a demandé l'utilisation d'un registre électoral papier et non du registre numérique prévu.

Dans le même temps, un blogueur pro-Odinga a tweeté que Ruto tentait de voler l'élection, avec à l'appui une vidéo sans rapport - et depuis retirée - d'un homme politique parlant d'un ancien scandale.

Ces accusations, souvent virales, inquiètent dans un pays marqué par plusieurs épisodes de violences post-électorales, dont les plus sanglantes en 2007-2008 ont fait plus de 1.100 morts dans des affrontements politico-ethniques.

La contestation des résultats des dernières élections en 2017 avait donné lieu à une répression policière brutale, tuant plusieurs dizaines de personnes.

"Tout cela offre un moyen pour l'un ou l'autre des candidats de discréditer le résultat des élections, ce qui pourrait mener à des troubles", estime Mary Blankenship, chercheuse en désinformation à l'Université du Nevada, en faisant le parallèle avec la présidentielle américaine de 2020, quand des allégations de fraude lancées par Donald Trump ont mené à une prise d'assaut du Capitole par ses partisans.

Les organisations de vérification des faits - dont AFP FactChecking - ont démenti des centaines d'affirmations fausses ou trompeuses relatives aux élections kényanes.

Les deux camps ont, entre autres, cherché à dénigrer les diplômes de leur adversaire, affirmant d'un côté qu'Odinga avait menti sur ses études d'ingénieur en Allemagne et de l'autre que Ruto avait falsifié ses notes universitaires.

Les médias se sont retrouvés entraînés dans cette spirale de désinformation.

Certains sites et pages de réseaux sociaux ont en effet imité celles d'authentiques médias pour répandre leurs mensonges. "Nous devons constamment diffuser des avertissements pour dire que cela ne vient pas de chez nous", note ainsi le rédacteur en chef de la chaîne Citizen TV, Waihiga Mwaura.

Les sondages d'opinion frauduleux, attribués à des sources légitimes comme la société de sondages GeoPoll ou le journal The Daily Nation, sont également devenus monnaie courante.

Il y a "des tentatives de rendre des dirigeants plus populaires qu'ils ne le sont, donner l'impression qu'ils sont en train de gagner les élections", relève Nic Cheeseman, politologue à l'université de Birmingham (Royaume-Uni).

"L'essentiel de la mésinformation et de la désinformation observées en 2022 sont assez similaires à celles des élections de 2017", avec notamment des "stéréotypes ethniques négatifs", souligne-t-il.

Des médias britanniques ont révélé en 2018 que la société Cambridge Analytica avait utilisé les données personnelles de millions d'utilisateurs de Facebook pour faire de la communication politique ciblée - dont certaines utilisant des ressorts ethniques - durant les campagnes des élections 2013 et 2017 remportées par Uhuru Kenyatta.

Des groupes de la société civile et un organisme public kényan voient dans cette vague de désinformation un risque pour la démocratie kényane.

"Une partie de cette mésinformation et cette désinformation joue sur des stéréotypes, des idées préconçues et les émotions des électeurs", explique Mark Kaigwa, de l'organisation kényane d'analyse de la désinformation StopReflectVerify.com.

Alors que des plateformes comme Facebook et TikTok clament leur détermination à éradiquer la désinformation et les discours de haine, les observateurs restent sceptiques, notamment parce que les influenceurs électoraux ont souvent recours à des termes détournés.

"Il y a beaucoup de langage codé (...) utilisé pour masquer ou s'assurer que les plateformes de réseaux sociaux n'identifient pas ce type de discours de haine", souligne Allan Cheboi, enquêteur principal chez Code for Africa, une initiative de data-journalisme prônant un usage civique des technologies.

Certains militants utilisent ainsi le mot swahili "madoadoa" ("tache") pour désigner des membres de diverses communautés au Kenya, souligne-t-il, en notant que "l'incitation commence en ligne puis débouche (sur de) la violence" ailleurs.

jo-mnk/amu/sva/md/emd/blb

META

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AUG 6

Présidentielle au Kenya: liesse et méga-meetings au dernier jour de campagne #

8/6/2022, 3:51 PM
Nairobi, KEN

Entourés de milliers de jeunes militants en liesse, les deux favoris à la présidentielle au Kenya ont promis samedi un avenir économique plus radieux, lors d'ultimes méga-meetings à Nairobi, à trois jours d'un scrutin qui s'annonce serré.

Raila Odinga, ex-prisonnier politique de 77 ans, se présente pour la cinquième fois. William Ruto, 55 ans, est lui le vice-président sortant. Tous deux ont jeté samedi leurs dernières forces dans la bataille au dernier jour de campagne, après avoir sillonné depuis des mois le pays et distribué casquettes, aliments ou argent en petites coupures lors de meetings quotidiens pour convaincre les 22,1 millions d'électeurs.

Les Kényans sont appelés aux urnes mardi pour choisir le successeur d'Uhuru Kenyatta, en poste depuis 2013 et dans l'impossibilité de briguer un troisième mandat. Ils doivent aussi désigner les députés et représentants locaux du pays, moteur économique considéré comme un point d'ancrage démocratique en Afrique de l'est.

Aucune tendance nette ne se dégageait samedi en faveur de M. Odinga ou de M. Ruto, grands favoris parmi les quatre candidats présidentiels. A moins que l'un d'eux ne recueille plus de 50% des voix mardi, et soit donc directement élu, les deux candidats qui arriveront en tête s'affronteront lors d'un second tour dans les 30 jours suivants.

Dès samedi matin, le stade Kasarani de Nairobi et ses 60.000 places s'est paré des couleurs orange et bleue de "Baba", "papa" en swahili, le surnom de Raila Odinga. Sous haute surveillance policière, des dizaines de milliers de partisans de ce vétéran de l'opposition désormais porté par le pouvoir ont assuré l'ambiance, dansant au son des vuvuzelas et de musiques vernaculaires.

En milieu d'après-midi, Odinga, coiffé d'un large chapeau bleu, est venu leur promettre qu'ensemble ils feraient du "Kenya une démocratie et une économie dynamique et mondiale", qu'ils construiraient "un Kenya d'espoir et d'opportunité", et que dans ce pays aux 46 tribus, ils formeraient "une grande tribu du Kenya".

Tout comme lui, William Ruto -- qui tenait son meeting à quelques kilomètres de là dans le stade Nyayo -- a promis de lutter contre la corruption, gros point noir dans ce pays classé 128e sur 180 dans ce domaine par l'ONG Transparency International.

Devant des dizaines de milliers de militants aux casquettes jaunes, Ruto a par ailleurs assuré qu'il entendait "réduire le coût de la vie afin que chacun puisse se permettre un repas décent". Il a également évoqué "un plan massif pour l'emploi des jeunes", qui représentent environ 40% des électeurs et dont cinq millions sont sans emploi, selon des chiffres officiels publiés en 2020.

L'inflation, qui a grimpé à 8,3% en juillet, semble avoir atténué cette année l'effervescence électorale et a dominé la campagne, comme en ont témoigné encore les militants interrogés samedi par l'AFP.

"On essaye d'avoir n'importe quel travail, en faisant du ménage ou en lavant les vêtements, pourvu que ça soit payé. Mais on n'y arrive pas tous les jours. On est juste en train de survivre", a ainsi déploré Grace Kawira, 32 ans, mère de famille sans emploi.

Quel que soit le vainqueur, "il doit faire baisser les prix" du carburant et des aliments de base, car 250 shillings (soit environ 2 euros) pour deux kilos de farine de maïs, "c'est beaucoup trop", estime Brian Kiprotich. Cet étudiant de 22 ans rejoint sur ce point l'avis de nombreux Kényans dont trois sur dix vivent avec moins de 1,90 dollars par jour selon la Banque Mondiale.

Au point que l'enjeu économique pourrait mardi, selon certains experts, supplanter le vote tribal, un facteur-clé depuis toujours dans les isoloirs kényans.

Si la campagne s'est parfois faite virulente sur les réseaux sociaux, les incidents ont été rares dans la rue. Quelque 150.000 officiers doivent néanmoins être déployés mardi à travers le pays pour assurer la sécurité.

Les élections ont donné lieu à des contestations, parfois violentes. En 2007-2008, plus de 1.100 personnes avaient été tuées dans des affrontements politico-ethniques et des centaines de milliers ont été déplacées.

Les résultats sont aussi régulièrement contestés en justice. En 2017, la Cour suprême avait annulé l'élection - une première en Afrique - et demandé la tenue d'un nouveau scrutin.

Ces dernières semaines, nombreux ont été les appels au calme de la société civile et de la communauté internationale. La Commission électorale (IEBC) a elle assuré avoir mis en place les garde-fous nécessaires pour empêcher fraudes et manipulations et parer à d'éventuels problèmes techniques.

al-twx/emd

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AUG 6

Présidentielle Kényane: liesse et méga-meetings au dernier jour de campagne #

8/6/2022, 1:03 PM
Nairobi, KEN

Entourés de milliers de jeunes militants en liesse, les deux favoris à la présidentielle au Kenya ont clôturé samedi la campagne par deux méga-meetings à Nairobi, jetant leurs dernières forces avant le scrutin de mardi qui s'annonce serré.

Raila Odinga, 77 ans, et William Ruto, 55 ans, sillonnent depuis des mois le pays, distribuant casquettes, aliments ou argent en petites coupures lors de meetings quotidiens destinés à convaincre les 22,1 millions d'électeurs.

Les Kényans sont appelés aux urnes mardi pour choisir le successeur d'Uhuru Kenyatta, en poste depuis 2013 et dans l'impossibilité de briguer un troisième mandat. Ils doivent aussi désigner les députés et représentants locaux du pays, considéré comme un moteur économique et un point d'ancrage démocratique en Afrique de l'Est.

Dès samedi matin, le stade Kasarani de Nairobi et ses 60.000 places s'est paré des couleurs orange et bleue de "Baba", "papa" en swahili, le surnom de Raila Odinga. Sous haute surveillance policière, des dizaines de milliers de partisans de ce vétéran de l'opposition désormais porté par le pouvoir, ont assuré l'ambiance, dansant au son des vuvuzelas et de musiques vernaculaires.

Ils adhèrent à la promesse de leur candidat de lutter contre la corruption endémique dans le pays, classé 128e sur 180 pays selon l'ONG Transparency International. "On espère que le prochain président va améliorer l'économie et le niveau de vie... On a besoin d'emplois", explique aussi à l'AFP Evance Odawo, un couturier de 23 ans.

A une quinzaine de kilomètres de là dans le stade Nyayo et ses 30.000 places assises, des milliers de militants aux casquettes jaunes affichaient leur soutien à William Ruto, vice-président sortant qui a fait du pouvoir d'achat son cheval de bataille. Ruto s'est posé comme le porte-voix des "débrouillards" du petit peuple et a promis des emplois dans le pays où 80% de la main d'oeuvre se trouve dans l'économie informelle.

"On essaye d'avoir n'importe quel travail, en faisant du ménage ou en lavant les vêtements, pourvu que ça soit payé. Mais on n'y arrive pas tous les jours", déplore Grace Kawira, 32 ans, mère de famille sans emploi. "On est juste en train de survivre", ajoute-t-elle.

L'inflation, qui a grimpé à 8,3% en juillet, semble avoir atténué cette année l'effervescence électorale.

"Il (quel que soit le vainqueur,ndlr), doit faire baisser les prix" du carburant et des aliments de base, car 250 shillings (soit environ 2 euros) pour deux kilos de farine de maïs, "c'est beaucoup trop", estime Brian Kiprotich. Cet étudiant de 22 ans rejoint sur ce point l'avis de nombreux Kényans dont trois sur dix vivent avec moins de 1,90 dollars par jour selon la Banque Mondiale.

L'enjeu économique pourrait mardi, selon certains experts, supplanter le vote tribal, un facteur-clé depuis toujours dans les isoloirs kényans.

Si la campagne s'est parfois faite virulente sur les réseaux sociaux, les incidents ont été rares dans la rue. Quelque 150.000 officiers doivent néanmoins être déployés mardi à travers le pays pour assurer la sécurité.

Dans ce pays aux 46 tribus, les élections ont donné lieu à des contestations, parfois violentes. En 2007-2008, plus de 1.100 personnes sont mortes dans des affrontements politico-ethniques et des centaines de milliers ont été déplacées.

Les résultats sont aussi régulièrement contestés en justice. En 2017, la Cour suprême avait annulé l'élection - une première en Afrique - et demandé la tenue d'un nouveau scrutin.

Ces dernières semaines, nombreux ont été les appels au calme de la société civile et de la communauté internationale. Vendredi, une quinzaine d'ambassades, dont celle des Etats-Unis, ont ainsi plaidé dans un communiqué commun pour des élections "libres, justes et pacifiques" au Kenya.

La Commission électorale (IEBC) a, elle, assuré avoir mis en place les garde-fous nécessaires pour empêcher fraudes et manipulations et parer à d'éventuels problèmes techniques. Et des centaines d'observateurs indépendants, locaux et internationaux vont être déployés sur le terrain le jour du scrutin.

"Je veux (que les hommes politiques) acceptent les élections, pour que le pays puisse continuer en paix", plaidait samedi Kawira, 32 ans.

al-twx/blb

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AUG 6

Dernier jour de campagne au Kenya avant la présidentielle de mardi #

8/6/2022, 8:22 AM
Nairobi, KEN

La campagne présidentielle au Kenya s'achève samedi avec deux grands meetings des principaux candidats dans la capitale Nairobi, à trois jours d'un scrutin à fort enjeu, avec en toile de fond l'inflation et les violences post-électorales passées.

Quelque 22,1 millions d'électeurs sont appelés aux urnes pour choisir le successeur d'Uhuru Kenyatta, en poste depuis 2013 et dans l'impossibilité de briguer un troisième mandat. Ils doivent aussi élire les députés et les représentants locaux du pays, considéré comme celui où la démocratie est la mieux enracinée en Afrique de l'Est.

Pour les convaincre et clôturer une campagne dominée par la crise économique et une certaine apathie, les candidats jettent leurs dernières forces dans la bataille.

Certains sillonnent les rues avec des sonos hurlant des slogans accrocheurs. Les deux favoris à la présidentielle organisent, eux, deux méga-meetings à Nairobi.

William Ruto, 55 ans et vice-président sortant, a choisi le stade de Nyayo et ses 30.000 places assises. A une quinzaine de kilomètres de là, son principal rival Raila Odinga, 77 ans et ancien leader de l'opposition désormais porté par le pouvoir, espère faire vibrer les 60.000 places du stade Kasarani.

"On espère que le prochain président va améliorer l'économie et le niveau de vie... On a besoin d'emplois", a dit à l'AFP Evance Odawo, un tailleur de 23 ans qui va assister au meeting de Raila Odinga.

William Ruto a fait du pouvoir d'achat son cheval de bataille. Il s'est présenté comme porte-voix des "débrouillards" du petit peuple, promettant des emplois quand trois personnes sur dix vivent dans l'extrême pauvreté avec moins de 1,90 dollar par jour, selon la Banque mondiale.

Raila Odinga a pris comme étendard la lutte contre la corruption endémique dans le pays, classé 128e sur 180 pays selon l'ONG Transparency International.

Tous deux avaient initialement annoncé avoir choisi le même stade pour ce dernier meeting, faisant craindre des tensions.

L'inflation, qui a grimpé à 8,3% en juillet, et l'explosion des prix du carburant et d'aliments de base semble toutefois avoir atténué cette année l'effervescence électorale.

"Les conditions économiques ont été difficiles pour les Kényans qui ont à peine eu la chance de se remettre de l'impact de la pandémie de Covid-19", relève l'analyste politique Zaynab Mohamed, dans une note publiée jeudi par le cabinet britannique Oxford Economics.

"De nombreux Kényans ont du mal à joindre les deux bouts et disent ne pas se laisser avoir par les promesses vides des politiciens", relève-t-elle.

L'enjeu économique pourrait, selon certains experts, supplanter le vote tribal, un facteur-clé depuis toujours dans les isoloirs kényans.

Si la campagne s'est parfois faite virulente sur les réseaux sociaux, les incidents ont été rares dans la rue. Quelque 150.000 officiers doivent néanmoins être déployés mardi à travers le pays pour assurer la sécurité.

Dans ce pays aux 46 tribus, les élections ont donné lieu à des contestations, parfois violentes. En 2007-2008, plus de 1.100 personnes sont mortes dans des affrontements politico-ethniques et des centaines de milliers ont été déplacées.

Les résultats sont aussi régulièrement contestés en justice. En 2017, la Cour suprême avait annulé l'élection - une première en Afrique - et demandé la tenue d'un nouveau scrutin.

Ces dernières semaines, nombreux ont été les appels au calme de la société civile et de la communauté internationale.

Une quinzaine d'ambassades, dont celle des Etats-Unis, ont ainsi plaidé vendredi dans un communiqué commun pour des élections "libres, justes et pacifiques" au Kenya, "point d'ancrage pour la stabilité, la sécurité et la démocratie, non seulement dans la région, mais aussi sur le continent ou à travers le monde".

La Commission électorale (IEBC) a, elle, assuré avoir mis en place les garde-fous nécessaires pour empêcher fraudes et manipulations et parer à d'éventuels problèmes techniques.

al/sva/blb

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AUG 6

Les élections au Kenya, mode d'emploi #

8/6/2022, 2:00 AM
Nairobi, KEN

Les Kényans sont appelés aux urnes mardi pour désigner au suffrage universel direct leur nouveau président, le cinquième depuis l'indépendance en 1963 de ce pays d'Afrique de l'Est.

Sur les 17 candidatures initiales, seules quatre ont été validées par la commission électorale (IEBC), soit le plus petit nombre de candidats à la présidentielle depuis l'instauration du multipartisme au début des années 1990.

Parmi eux, William Ruto, 55 ans, actuel vice-président à la réputation sulfureuse. Cet ancien député et ministre de l'Agriculture se présente pour la première fois, sous la bannière de son nouveau parti l'UDA (United Democratic Alliance).

Il fait figure de favori avec Raila Odinga.

Ce dernier, ancien Premier ministre, est passé à partir de 2018 du statut de leader de l'opposition à celui d'allié du parti au pouvoir. A 77 ans, c'est sa cinquième tentative pour devenir chef de l'Etat. Il est en lice sous l'étiquette de la coalition Azimio la Umoja (Quête d'unité).

David Mwaure, ancien avocat et prêtre de 65 ans, représente quant à lui le parti Agano, et George Wajackoyah, excentrique avocat de 63 ans, le parti Roots (racines) inspiré du rastafarisme.

Outre le président, les plus de 22,1 millions d'électeurs inscrits (dont près de 40% ont moins de 34 ans) sont également appelés à élire 290 députés, 47 femmes représentantes pour siéger à l'Assemblée nationale, 47 sénateurs, 47 gouverneurs de comté et 1.450 membres des assemblées de comtés.

Au total, 46.229 bureaux de vote seront ouverts de 06H00 à 17H00 locales.

Chaque électeur recevra six bulletins de couleurs différentes, une couleur par scrutin, et pas un bulletin supplémentaire n'a été imprimé, selon l'IEBC.

La société civile kényane, l'Union africaine, l'Union européenne entre autres vont déployer des centaines d'observateurs.

L'identification électronique des électeurs, introduite à partir de 2009, était au coeur de la contestation du scrutin de 2017 annulé puis reprogrammé.

En arrivant au bureau de vote, les électeurs sont dirigés vers un kit biométrique - une tablette équipée d'un système de reconnaissance des empreintes digitales - permettant de s'assurer qu'ils y sont bien inscrits.

Une fois les bulletins glissés dans les urnes, l'électeur se voit déposer de l'encre indélébile sur un doigt, preuve qu'il a accompli son devoir de citoyen et gage qu'il ne peut voter une seconde fois.

Quelque 1.272 bureaux de vote ont une couverture internet "faible" ou nulle. Dans ces zones, des modems-satellites seront utilisés pour assurer la transmission électronique, assure l'IEBC.

Le comptage manuel servira de filet de sécurité en cas de défaillance de la transmission électronique des résultats, source de litige en 2017.

Cette année-là, l'IEBC avait été vivement critiquée pour son processus de compilation et de vérification des résultats.

Environ 150.000 officiers seront déployés pour assurer la sécurité des bureaux de vote, selon le chef de la police Hilary Mutyambai.

Les écoles, dans lesquelles sont installées la plupart des bureaux de vote, sont fermées jusqu'à mercredi, et une grande chaîne de supermarchés a invité ses clients à s'approvisionner en prévision de la fermeture de ses magasins mardi.

Les périodes électorales ont été marquées à plusieurs reprises par des violences, notamment politico-ethniques comme en 2007-2008 quand plus de 1.100 personnes ont été tuées et des centaines de milliers déplacées.

Pour l'emporter, un candidat doit recueillir 50% des voix plus un vote, ainsi que 25% des voix dans la moitié des 47 comtés.

Si ces conditions ne sont pas remplies, un second tour doit être organisé dans les 30 jours.

Les résultats doivent ensuite être proclamés dans les sept jours suivant l'élection. Si personne ne les conteste, le nouveau chef de l'Etat élu doit être investi dans les deux semaines suivant l'annonce des résultats définitifs.

En cas de contentieux et d'annulation du scrutin par la Cour suprême, comme en 2017 quand elle avait été saisie par l'opposition, un nouveau scrutin doit se tenir dans les 60 jours suivant la décision.

En 2017, la Cour suprême avait justifié cette décision en faisant peser la responsabilité de ce scrutin "ni transparent, ni vérifiable" sur la commission électorale.

al-ho/sva/md/blb/ybl

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AUG 6

Dernier jour de campagne au Kenya avant la présidentielle de mardi #

8/6/2022, 2:00 AM
Nairobi, KEN

La campagne présidentielle s'achève samedi au Kenya, avec deux grands meetings des principaux candidats dans la capitale Nairobi, à trois jours d'un scrutin à fort enjeu, avec en toile de fond l'inflation et les violences post-électorales passées.

Quelque 22,1 millions d'électeurs sont appelés aux urnes pour choisir le successeur d'Uhuru Kenyatta, en poste depuis 2013 et dans l'impossibilité de briguer un troisième mandat. Ils doivent aussi élire les députés et les représentants locaux du pays, considéré comme celui où la démocratie est la mieux enracinée en Afrique de l'Est.

Pour les convaincre et clôturer une campagne dominée par la crise économique et une certaine apathie, les candidats jettent leurs dernières forces dans la bataille.

Certains sillonnent les rues avec des sonos hurlant des slogans accrocheurs. Les deux favoris à la présidentielle organisent, eux, deux méga-meetings à Nairobi.

William Ruto, 55 ans et vice-président sortant, a choisi le stade de Nyayo et ses 30.000 places assises. A une quinzaine de kilomètres de là, son principal rival Raila Odinga, 77 ans et ancien leader de l'opposition désormais porté par le pouvoir, fera vibrer les 60.000 places du stade Kasarani.

Le premier a fait du pouvoir d'achat son cheval de bataille. Il s'est présenté comme porte-voix des "débrouillards" du petit peuple, promettant des emplois quand trois personnes sur dix vivent dans l'extrême pauvreté avec moins de 1,90 dollar par jour, selon la Banque mondiale.

Le second a pris comme étendard la lutte contre la corruption endémique dans le pays, classé 128e sur 180 pays selon l'ONG Transparency International.

Tous deux avaient initialement annoncé avoir choisi le même stade pour ce dernier meeting, faisant craindre des tensions.

L'inflation, qui a grimpé à 8,3% en juillet, et l'explosion des prix du carburant et d'aliments de base semble toutefois avoir atténué cette année l'effervescence électorale.

"Les conditions économiques ont été difficiles pour les Kényans qui ont à peine eu la chance de se remettre de l'impact de la pandémie de Covid-19", relève l'analyste politique Zaynab Mohamed, dans une note publiée jeudi par le cabinet britannique Oxford Economics.

"De nombreux Kényans ont du mal à joindre les deux bouts et disent ne pas se laisser avoir par les promesses vides des politiciens", relève-t-elle.

L'enjeu économique pourrait, selon certains experts, supplanter le vote tribal, un facteur-clé depuis toujours dans les isoloirs kényans.

Si la campagne s'est parfois faite virulente sur les réseaux sociaux, les incidents ont été rares dans la rue. Quelque 150.000 officiers doivent néanmoins être déployés mardi à travers le pays pour assurer la sécurité.

Dans ce pays aux 46 tribus, les élections ont donné lieu à des contestations, parfois violentes. En 2007-2008, plus de 1.100 personnes sont mortes dans des affrontements politico-ethniques et des centaines de milliers ont été déplacées.

Les résultats sont aussi régulièrement contestés en justice. En 2017, la Cour suprême avait annulé l'élection - une première en Afrique - et demandé la tenue d'un nouveau scrutin.

Ces dernières semaines, nombreux ont été les appels au calme de la société civile et de la communauté internationale.

Une quinzaine d'ambassades, dont celle des Etats-Unis, ont ainsi plaidé vendredi dans un communiqué commun pour des élections "libres, justes et pacifiques" au Kenya, "point d'ancrage pour la stabilité, la sécurité et la démocratie, non seulement dans la région, mais aussi sur le continent ou à travers le monde".

La Commission électorale (IEBC) a, elle, assuré avoir mis en place les garde-fous nécessaires pour empêcher fraudes et manipulations et parer à d'éventuels problèmes techniques.

al/sva/blb/ybl

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AUG 6

Les crises électorales au Kenya #

8/6/2022, 2:00 AM
Nairobi, KEN

Le Kenya, qui élit mardi le successeur du président Uhuru Kenyatta, a connu plusieurs périodes électorales marquées par des violences meurtrières, notamment ethniques, et par des contestations de résultats qui ont abouti en 2017 à une annulation du scrutin.

Le 29 décembre 1992, Daniel arap Moi, au pouvoir depuis 1978, est élu président lors du premier scrutin multipartite face à une opposition divisée.

Des violences, opposant les Kalenjin, ethnie minoritaire du président, aux Kikuyu, majoritaires et soutenant les partis d'opposition, précèdent puis suivent le scrutin, faisant des centaines de morts dans la vallée du Rift.

Le 27 décembre 2007, des émeutes éclatent après la réélection contestée de Mwai Kibaki à la présidence, face à Raila Odinga, son ancien allié devenu son rival.

La vallée du Rift devient l'épicentre d'affrontements entre des membres des communautés kalenjin et luo, qui ont majoritairement soutenu M. Odinga, et leurs voisins kikuyu, l'ethnie de M. Kibaki.

En février 2008, les deux leaders signent un accord sous la pression de la communauté internationale, aboutissant à un gouvernement de coalition dirigé par Raila Odinga. Les violences ont fait plus de 1.100 morts et 600.000 déplacés, dans un pays jusqu'alors réputé stable.

En mars 2010, la Cour pénale internationale (CPI) autorise l'ouverture d'une enquête pour crimes contre l'humanité sur ces violences et en 2012, ses juges confirment les accusations contre quatre Kényans. Parmi eux, Uhuru Kenyatta, fils du premier président kényan et candidat à la présidentielle de 2013, ainsi que William Ruto, son colistier.

Le 4 mars 2013, Uhuru Kenyatta remporte la présidentielle.

Le 8 octobre 2014, il devient le premier chef d'Etat à comparaître en cours de mandat devant la CPI.

En décembre, la Cour abandonne les poursuites contre lui, faute de preuves suffisantes. En 2016, elle abandonne pour la même raison des poursuites contre son vice-président William Ruto.

La présidentielle du 8 août est remportée par Uhuru Kenyatta face à Raila Odinga, qui rejette les résultats, manipulés selon lui par piratage informatique, et dépose un recours.

L'annonce des résultats déclenche des émeutes et des pillages dans des fiefs de l'opposition.

Le 1er septembre, la Cour suprême invalide le scrutin pour "irrégularités" et ordonne une nouvelle élection, une première en Afrique.

En octobre, Uhuru Kenyatta est réélu lors d'un nouveau vote boycotté par l'opposition et marqué par une faible participation.

Des violences post-électorales font des dizaines de morts, principalement dans la brutale répression des manifestations de l'opposition par la police.

En 2018, les deux hommes sidèrent le pays en se serrant la main et en déclarant une trêve.

acm-ang/mw/sva/blb/ybl

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AUG 5

Kenya: des ONG alertent sur les violences faites aux femmes durant les élections #

8/5/2022, 1:12 PM
Nairobi, KEN

Attaque verbale, harcèlement et même viols: les femmes ont été victimes de violences durant la campagne électorale au Kenya, alertent deux organisations de défense des droits de l'homme vendredi, à trois jours du scrutin du 9 août.

La campagne "a été entachée de violences visant les femmes" malgré les avertissements et les promesses du gouvernement de s'attaquer au problème, affirment la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH) et l'ONG Commission des droits de l'homme du Kenya (KHRC) dans un communiqué.

Elles évoquent "plusieurs" cas de viol durant la campagne, dont quatre cas en marge d'un meeting finalement annulé le 19 juin.

Le Kenya tient mardi ses élections générales qui verront 22,1 millions d'électeurs désigner leur président, mais aussi leurs parlementaires, gouverneurs et quelque 1.500 élus locaux.

Les femmes candidates - dont trois figurent comme colistières de prétendants à la présidence - ont été "confrontées à un langage sexiste et agressif, (...) aux stéréotypes de genre, aux abus sexistes en ligne et au harcèlement sexuel", soulignent les deux organisations.

Elles estiment que "ces tactiques sont délibérément utilisées pour empêcher les femmes politiques ou les candidates de participer à la politique".

Les élections au Kenya ont à plusieurs reprises donné lieu à des explosions de violences, y compris à caractère sexistes et sexuelles.

Lors de la crise post-électorale de 2007-2008 qui avait fait plus de 1.100 morts, au moins 900 personnes avaient été victimes d'agressions sexuelles, notamment des viols collectifs et des actes de castration, selon des associations de défense des droits de l'homme.

Lors des violences qui ont suivi le scrutin de 2017, les violences sexuelles contre les femmes et les filles ont été répandues, selon la KHRC, qui a documenté 201 cas de violences sexuelles et sexistes liées aux élections.

Plus de la moitié des attaques impliquaient des forces de sécurité et "à ce jour, aucune mesure n'a été prise par le gouvernement pour garantir la justice aux victimes", souligne le communiqué.

"L'incapacité du gouvernement à freiner le ciblage des femmes en politique et à tenir les auteurs responsables (...) a permis la répétition des violences", affirme la vice-présidente de la FIDH Sheila Muwanga.

Le mois dernier, des experts de l'ONU ont exhorté les autorités kényanes à "veiller à ce que les femmes puissent participer librement au processus électoral sans discrimination, harcèlement ou crainte d'une éventuelle répétition de violences sexuelles et sexistes".

En 2020, un tribunal de Nairobi a ordonné au gouvernement d'indemniser quatre femmes victimes de la vague de violences sexuelles qui s'est déroulée après le vote de 2007.

ho/amu/sva/al/cl

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AUG 5

Pouvoir d'achat, dette, corruption: les défis du futur président kényan #

De la lutte contre la vie chère à celle contre la corruption endémique, nombreux sont les défis qui attendent le vainqueur de l'élection présidentielle convoquée mardi au Kenya, pour maintenir le cap de cette dynamique économie d'Afrique de l'Est.

"Pas de nourriture, pas d'élections". Des centaines de manifestants déjà durement touchés par les retombées économiques du Covid-19 ont menacé début juillet de bouder les urnes si les prix des produits essentiels (denrées alimentaires, essence...) ne baissaient pas.

Une aide gouvernementale a été promise le 20 juillet pour réduire le prix de la farine de maïs, qui sert à préparer l'ugali, plat de base dans le pays.

Mais ces coups de pouce sont temporaires, "populistes" et "simplistes" au moment où l'inflation grimpe à des niveaux inédits depuis cinq ans pour atteindre 8,3% en juillet, selon Jared Osoro, économiste à l'université de Nairobi.

Les impacts du conflit en Ukraine sont venus assombrir les perspectives de reprise économique.

De 7,5% en 2021, la croissance devrait s'établir à 5,2% en moyenne pour 2023-2024, selon la Banque mondiale qui prévoit par ailleurs une détérioration de la balance commerciale cette année. Le Kenya importe habituellement un cinquième de ses céréales de Russie et 10% d'Ukraine, selon les chiffres officiels.

L'agriculture (plus de 22% du PIB) pâtit aussi de l'envol des prix des engrais et se voit par ailleurs menacée par la sécheresse.

D'ici 2050, la moitié de la population vivra en ville, ce qui entraînera "une myriade de défis" dont l'éducation et l'accès à la santé, note Oxfam. Selon l'ONG, 34% des 17 millions de personnes pauvres au Kenya vivent dans des zones urbaines, pour la plupart dans des logements informels.

Pour accompagner le développement du pays, les gouvernements successifs depuis 2008 poursuivent l'ambitieux programme Vision2030, principalement axé sur les grands projets d'infrastructures.

Conséquence: sous les deux mandats d'Uhuru Kenyatta, la dette a plus que quadruplé pour avoisiner 70 milliards de dollars.

La Chine est désormais le deuxième bailleur du Kenya, derrière la Banque mondiale. Pékin a notamment prêté 5 milliards de dollars pour l'emblématique ligne de train reliant Nairobi au port de Mombasa.

Le Fonds monétaire international, qui a prêté l'année dernière 2,34 milliards de dollars au Kenya, a salué en juillet la poursuite du rebond économique et l'augmentation des recettes fiscales.

Mais "le Kenya reste exposé à des risques élevés de surendettement, et c'est pour cela qu'il est important qu'il reste fermement sur la trajectoire fixée pour réduire la vulnérabilité de la dette", commente Mary Goodman, cheffe de la mission du FMI.

Le bilan en la matière a "stagné", selon l'ONG Transparency International qui plaçait le pays 128e sur 180 dans son dernier index mondial de perception de la corruption.

Sous la pression internationale, de bailleurs et d'investisseurs en particulier, il y a eu un "renforcement des institutions de contrôle", une médiatisation du phénomène incrusté dans toutes les strates de la société et "un assainissement du milieu des affaires", énumère Alexia Van Rij, spécialiste en évaluation des politiques publiques du développement.

La justice s'est par ailleurs penchée sur quelques affaires troubles, dont le vol dans un entrepôt gouvernemental de l'agence kényane d'approvisionnement en médicaments (Kemsa) et l'enrichissement d'un candidat à la vice-présidence.

Si des dizaines de hauts responsables ont été inculpés depuis 2018, dont l'ex-ministre des Finances Henry Rotich, "aucun gros poisson n'a été pris", relève Alexia Van Rij.

Avec les trois-quarts de la population âgés de moins de 34 ans, la jeunesse est l'un des atouts du Kenya, son insertion dans l'emploi l'un de ses principaux défis.

Ils sont environ 500.000 chaque année à décrocher un diplôme dans le supérieur. Mais la corruption, le népotisme ou l'exigence d'expérience constituent autant d'obstacles à leur entrée dans la vie active.

Selon des chiffres officiels publiés en 2020, 5 millions de jeunes étaient sans emploi.

La jeunesse est une "bombe à retardement démographique, sociale et économique", estime Alex Awiti, chercheur kényan en politique publique.

Il appelle à "créer des emplois à une échelle industrielle" avec des incitations financières, notamment pour développer le secteur privé dans un pays où 80% de la main d'oeuvre se trouve dans l'économie informelle.

Il faut aussi développer l'agriculture et "renforcer les compétences dans le secteur industriel et les opportunités dans le secteur manufacturier", préconise-t-il, car "les jeunes croient encore en général que si vous ne connaissez pas quelqu'un dans un service public, vous ne pouvez pas avoir d'emploi".

Fait inédit depuis 2002, le prochain chef de l'Etat ne sera pas kikuyu, l'ethnie la plus nombreuse du pays.

Les deux grands favoris de l'élection, Raila Odinga et William Ruto, sont respectivement Luo et Kalenjin. Seuls leurs colistiers sont issus de cette influente communauté au solide réseau économique.

Le successeur de Kenyatta devra donc bâtir un nouvel équilibre politico-éthnique dans un pays aux 46 ethnies, où l'appartenance communautaire, instrumentalisée depuis les Britanniques, est un pion essentiel de l'échiquier politique.

al/md/sva/cl

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AUG 5

Uhuru Kenyatta, héritier millionnaire et président insondable #

8/5/2022, 8:17 AM

Marionnette ou stratège, héritier dilettante ou assoiffé de pouvoir ? Au soir d'une quasi-décennie de présidence du Kenya, Uhuru Muigai Kenyatta reste un chef d'Etat insondable, au bilan en demi-teinte.

Une chose est sûre: le "prince" de la politique kényane est indissociable de sa famille, la plus riche du pays et la seule qui lui ait donné deux présidents.

Silhouette massive, visage rond marqué de lourdes poches sous les yeux, cet homme de 60 ans a consacré son deuxième et dernier mandat à tenter de consolider son héritage politique, tout en gardant une main sur l'avenir en soutenant son ancien rival Raila Odinga pour la présidentielle du 9 août.

Depuis sa réélection en 2017, l'ancien golden boy éduqué aux Etats-Unis s'est notamment efforcé de renforcer la stature internationale du Kenya, qui siège actuellement au Conseil de sécurité de l'ONU et s'affiche fièrement comme la locomotive économique de l'Afrique de l'Est.

Au prix d'une explosion de la dette, l'ancien ministre des Finances (2009-2012) a également poursuivi le développement des infrastructures, dont une voie rapide inaugurée fin juillet à Nairobi, et affiché sa lutte contre la corruption.

Mais l'apathie, voire l'ironie, ont accueilli ce discours dans un pays où les Kenyatta sont perçus comme l'incarnation d'une élite politique corrompue et peu concernée par l'intérêt général.

Au-delà d'un empire financier qui s'étend de l'agroalimentaire (Brookside) à la banque (NCBA) en passant par les médias (Mediamax), la famille est le premier propriétaire terrien du pays - un patrimoine à l'origine critiquée.

La fortune du seul Uhuru, catholique pratiquant et père de trois enfants, était estimée à 500 millions de dollars par Forbes en 2011.

Uhuru ("liberté" en swahili) est le fils du président Jomo Kenyatta (1964-1978), considéré comme le père de l'indépendance, et de son influente quatrième épouse "Mama" Ngina.

Il se lancera en politique au milieu des années 90, poussé par le successeur de son père, l'autocrate Daniel arap Moi (1978-2002).

Battu à sa première tentative présidentielle en 2002, il soutiendra en 2007 le sortant Mwai Kibaki, dont la courte victoire va dégénérer en tueries politico-ethniques opposant Kikuyu et Kalenjin, deux des principales ethnies du pays.

Kenyatta intègre dans la foulée un gouvernement d'union nationale, puis remporte en 2013 la présidentielle.

Le leader kikuyu s'est opportunément allié dans cette course à William Ruto, meneur des Kalenjin. Tous deux sont alors poursuivis par la Cour pénale internationale pour leur rôle dans les tueries de 2007-2008.

Les charges contre le duo exécutif seront finalement abandonnées pendant ce premier mandat, le tribunal dénonçant des "intimidations de témoins".

Uhuru redevient alors fréquentable et accueille tour à tour Barack Obama, le pape François, ainsi qu'une kyrielle d'investisseurs impatients de gagner ce pays dynamique.

A Nairobi, observateurs et diplomates peinent à cerner sa personnalité. Certains décrivent "un fêtard porté sur la bouteille qui ne voulait pas le job", quand d'autres peignent un homme "assez charismatique", "politiquement capable et qui sait parler aux gens".

Mais la capitale bruisse des récits de ses virées nocturnes, incognito au volant d'une banale voiture, protégé par seulement quelques gardes du corps.

Le 1er septembre 2017, après l'annulation historique de sa réélection par la Cour suprême, un Uhuru étonnamment hilare, juché sur le toit d'un 4x4, traitera les juges d'"escrocs" devant les caméras.

Quelques heures plus tard, il acceptera cependant le verdict, et sera définitivement réélu deux mois plus tard.

Mais ses relations avec la justice restent amères. En 2020, il fait fi d'une décision de la Cour suprême de dissoudre le Parlement - qui ne respecte pas le quota de femmes fixé par la Constitution.

La réélection de 2017 a eu lieu dans un pays fracturé, où les manifestations de l'opposition - dont le leader Raila Odinga a boycotté le deuxième scrutin - ont été impitoyablement réprimées par la police.

Si bien que début 2018, le président prend tout le monde de court en concluant une trêve avec Odinga lors d'une poignée de main restée célèbre sous le nom de "Handshake".

Ce pacte a attiré au coeur du pouvoir M. Odinga, tout en mettant sur la touche l'ambitieux vice-président William Ruto - à qui Kenyatta avait initialement promis son soutien pour 2022.

Kenyatta et Odinga porteront ensemble un projet de réforme constitutionnelle, baptisé "Building Bridges Initiative" (BBI) et créant notamment un poste de Premier ministre que beaucoup voyaient destiné au président sortant. Il sera finalement retoqué par la justice.

Le président s'apprête aujourd'hui à quitter, du moins en apparence, la scène politique.

Interrogé l'année dernière sur son désir de rester au pouvoir, un Uhuru souriant déclarait à France 24, levant les yeux au ciel: "Oh, s'il vous plaît, s'il vous plaît ! J'aimerais mieux savourer des vacances en France chaque été."

md/sva/cl

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LocationNairobi - KEN
Date8/5/2022, 8:17 AM