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Cinq choses à savoir sur le Kenya #

8/4/2022, 7:26 AM
Nairobi, KEN

Le Kenya, riche de sa faune, ses plages et ses terres agricoles, est un moteur économique de l'Afrique de l'Est, et ce malgré la pandémie et une sécheresse inédite depuis 40 ans.

Voici cinq choses à savoir sur ce pays niché entre les Grands Lacs et l'océan Indien.

Le Kenya accède à l'indépendance en 1963 après huit ans de rébellion contre le régime colonial britannique. Jomo Kenyatta devient le premier président de cette jeune République, remplacé à sa mort en 1978 par Daniel arap Moi.

En 2002, onze ans après l'abandon du régime du parti unique, première alternance démocratique: l'opposant Mwai Kibaki remporte la présidentielle.

Mais en 2007, l'annonce contestée de sa réélection entraîne des violences politico-ethniques inédites qui se soldent par plus de 1.100 morts. En 2008, un gouvernement d'union nationale est mis en place, dont Raila Odinga, aujourd'hui candidat, est Premier ministre.

Ce dernier est battu à la présidentielle de 2013 par le fils de Jomo Kenyatta, Uhuru, pourtant alors inculpé par la Cour pénale internationale pour son rôle présumé dans les violences post-électorales de 2007-2008.

Bis repetita en août 2017. La présidentielle est cependant annulée pour "irrégularités" par la Cour suprême, une première en Afrique. Uhuru Kenyatta est élu lors d'un nouveau scrutin, boycotté par son opposant de toujours.

Les deux hommes scellent une alliance surprenante en 2018, aux dépens du vice-président et dauphin désigné William Ruto.

Le pays compte une cinquantaine de parcs et réserves naturelles qui ont attiré 1,5 million de visiteurs en 2021. Parmi ses joyaux, plus de 30.000 girafes et le célèbre "Big five": lion, éléphant, rhinocéros, buffle et léopard.

Wangari Maathai est une des ambassadrices les plus connues de cette biodiversité, récompensée en 2004 par le prix Nobel de la paix pour, entre autres, son travail autour de la plantation d'arbres.

Le Kenya est aussi surnommé "le berceau de l'humanité".

La vallée du Rift, qui s'étend de la Tanzanie à l'Éthiopie en passant par le Kenya, a été le théâtre de découvertes majeures de fossiles. Des restes d'hominidés vieux de près de 6 millions d'années ont été trouvés dans la région du Turkana.

Le Kenya est une des économies les plus dynamiques d'Afrique de l'Est et soigne son image de hub régional.

Son profil est atypique en Afrique: relativement peu de ressources naturelles mais un dynamisme économique et un secteur des services remarquables. L'agriculture est aussi un de ses piliers (plus de 22% du PIB) et la source principale des exportations (thé, fleurs, café).

Après un recul de 0,3% en 2020 lié à la pandémie, l'économie du Kenya a amorcé une reprise en 2021. Mais les prix du carburant et des denrées alimentaires ont explosé, en particulier celui de la farine de maïs - nourriture de base -, attisant la frustration dans ce pays rongé par une corruption endémique. En 2021, il était classé 128e sur 180 pays et territoires par Transparency International.

Les inégalités sont criantes au Kenya, où golfs et bidonvilles peuvent être mitoyens et où le salaire minimum mensuel est de 15.120 shillings (124 euros). Selon l'ONG Oxfam, la fortune des deux Kényans les plus riches est supérieure aux revenus cumulés de 30% de la population, soit 16,5 millions de personnes.

La population d'environ 50 millions d'habitants, selon les chiffres officiels, est en majorité jeune et chrétienne.

Sur les plus de 40 ethnies recensées, les Kikuyu sont le premier groupe numériquement, devant les Luhya, les Kalenjin et les Luo.

Le Kenya fait partie des grandes nations de la course de fond et demi-fond, avec des champions comme Eliud Kipchoge ou Faith Kipyegon.

Le sprinter Ferdinand Omanyala s'est également fait un nom au pays des coureurs de fond, en signant le record d'Afrique du 100 m en 2021 (9.77), puis en réalisant la troisième meilleure performance mondiale en 2022 (9.85).

Mais l'ombre du dopage plane régulièrement. Le pays a été à deux doigts de l'exclusion des Jeux de Rio en 2016 avant d'annoncer l'introduction de mesures spécifiques comme l'adoption d'une loi antidopage.

Le 7 août 1998, un attentat visant l'ambassade américaine à Nairobi fait 213 morts et 5.000 blessés. Il est revendiqué par Al-Qaïda.

Après l'entrée en 2011 de l'armée kényane en Somalie pour y combattre les islamistes radicaux shebab, les attaques se sont multipliées, avec notamment celles du Westgate à Nairobi en 2013 puis de Garissa en 2015. Elles feront respectivement 67 et 148 morts.

En 2019, 21 personnes meurent dans un nouvel attentat mené contre le complexe hôtelier Dusit, à Nairobi.

Depuis les attaques se font plus sporadiques, concentrées dans l'est du pays.

bur-al/sva/md/cl/jhd

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AUG 4

Cannabis et T-shirt fluo: Wajackoyah, intrigant candidat à la présidentielle kényane #

T-shirt fluo, jogging noir et déhanché nonchalant, George Wajackoyah pimente la campagne présidentielle kényane en proposant de légaliser la marijuana et d'exporter serpents et testicules de hyènes pour éponger la dette nationale. Pur excentrique ou pion politique, sa candidature intrigue.

A coups de déclarations fantasques et de meetings express, le novice en politique de 63 ans qui a troqué les costumes trois pièces pour militer parfois pieds-nus, s'est non seulement fait un nom mais pourrait aussi bousculer le 9 août le duel annoncé entre Raila Odinga et William Ruto.

Avec son parti "Roots" aux influences rasta fondé en 2013, il pourrait contraindre les deux poids-lourds à un second tour, ce qui serait une première pour ce pays d'Afrique de l'Est.

Quand son camion de campagne à la tôle rouillée s'arrête sur les bords de route poussiéreux en banlieue de Nairobi, des dizaines de jeunes s'agglutinent.

Les sonos crachent du reggae, la clameur monte devant le candidat Wajackoyah qui distribue sourires, salutations du poing et pour seul slogan: "Bhang", en référence au cannabis qu'il entend légaliser pour alléger le fardeau exponentiel de la dette kényane (estimée à 70 milliards de dollars).

"Je serai le président de tout le monde", lance, jovial, l'excentrique avocat à la barbe grisonnante, "j'aimerais que les gens fassent une chose: voter pour une personne et non pour un parti".

Quelques pas de danse, et le voilà déjà reparti sur la route, sans autre interaction avec la poignée de curieux ni de débat autour de son programme.

Dans son manifeste, George Wajackoyah promet une semaine de travail à quatre jours.

Il présente l'exportation de testicules de hyènes - réputées prisées dans la médecine chinoise -, ainsi que celle de venin, de viande et de peau de serpent comme des remèdes pour l'économie kényane fragilisée par la sécheresse et la guerre en Ukraine.

Ce programme lui a permis d'attirer l'attention du public, contrairement au quatrième candidat David Mwaure, ancien avocat dont la campagne est passée sous les radars. Il pourrait aussi séduire quelques électeurs, en particulier dans les rangs d'une jeunesse en grande majorité sans emploi et plus préoccupée par l'inflation galopante que par le scrutin.

Stephen Kariuki, rencontré au meeting, est l'un d'eux. Selon ce trentenaire sans travail, Wajackoyah a le mérite de "ne pas être milliardaire" contrairement à Odinga et Ruto, et apporte "l'espoir" dans un Kenya où "même si on a des diplômes, on n'a pas de travail".

La trajectoire de Wajackoyah est tout aussi surprenante que son programme.

Parachuté sur la scène politique en février, au moment de l'annonce de sa candidature, il assure lors d'interviews être resté dix mois et demi dans le ventre de sa mère, ou avoir été sauvé de la rue par le paléoanthropologue kényan Richard Leakey et des fidèles de la communauté Hare Krishna.

A sa sortie du lycée en 1980, il intègre la police puis s'impose comme un des meilleurs agents de renseignement sous l'ère du président autocrate Daniel Moi.

Son enquête sur l'assassinat en 1990 du ministre des Affaires étrangères, Robert Ouko, lui vaut d'être arrêté, torturé, et de s'exiler en Grande-Bretagne. Là, il occupe de petits boulots, dont celui de fossoyeur, pour financer ses études avant de retourner au Kenya en 2010.

Durant la campagne, la cote de popularité de ce père de trois enfants n'a jamais décollé, les sondages le créditant tout au plus de quelques centaines de milliers de voix. De quoi peser toutefois en cas d'écart serré entre les deux favoris.

L'ambiguïté récurrente du candidat rasta par rapport à Raila Odinga a alimenté les suspicions sur la sincérité de sa candidature.

La presse nationale questionne l'existence d'un "pacte secret" entre lui et Raila Odinga, la candidature du premier servant à siphonner, au profit du second, quelques voix à William Ruto, vice-président sortant.

Le quotidien Daily Nation titrait ainsi en juin: "Wajackoyah: marionnette de Raila ou troisième force?"

"L'idée que le professeur soutient Odinga est (...) un voeu pieux qui n'existe que dans l'esprit de médias biaisés", s'est défendue jeudi l'équipe de Wajackoyah.

al-oh/sva/cl/jhd

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AUG 4

Kenya: William Ruto, porte-parole des "débrouillards" à la réputation sulfureuse #

8/4/2022, 7:21 AM
Nairobi, KEN

L'ambitieux et fortuné vice-président William Ruto se présente en challenger du pouvoir à l'élection présidentielle du 9 août, se posant en porte-parole des "débrouillards" du petit peuple et tentant de polir son image sulfureuse.

La voie semblait tracée pour que ce fin stratège de 55 ans, aux costumes toujours élégants, accède au sommet de l'Etat.

Le chef de l'Etat Uhuru Kenyatta - dont il est le vice-président depuis 2013 - l'avait adoubé, l'assurant du soutien du parti présidentiel pour l'élection de 2022 à laquelle lui n'a pas le droit de briguer un troisième mandat.

Mais après sa réélection en 2017, suivie de violences causant des dizaines de morts, Kenyatta s'est progressivement rapproché de son opposant historique Raila Odinga, à qui il a finalement donné son soutien.

Pour beaucoup d'observateurs, une des raisons de ce revirement d'alliances est l'incontrôlable ambition de Ruto.

"Ce qui rend Ruto singulier, c'est la rapidité de son ascension, son ambition", souligne l'analyste politique kényane Nerima Wako-Ojiwa: "Il est allé à contre-courant (des pratiques). Il est passé devant beaucoup de gens sans demander l'autorisation".

"Beaucoup de gens ont peur que s'il arrive au pouvoir, il soit impossible à déloger ensuite", explique-t-elle.

Ruto se présente en opposant aux "dynasties" incarnées par Kenyatta et Odinga, héritiers de deux familles au coeur de la politique kényane depuis l'indépendance en 1963.

Il s'est fait le héraut des "débrouillards" ("hustlers") de la rue comme lui, issu d'une famille modeste de la vallée du Rift.

Ce diplômé en sciences, professeur avant de se lancer en politique dans les années 1990, au sein des jeunesses du parti de l'autocrate Daniel arap Moi, aime à rappeler qu'il n'a eu sa première paire de chaussures qu'à l'âge de 15 ans et qu'il vendait des poulets en bord de route.

Il est aujourd'hui à la tête d'une grande entreprise de volailles, un des piliers de sa fortune - une des plus grandes du pays - qui comprendrait également des hôtels, des milliers d'hectares de terres...

L'étendue de ses actifs a fait l'objet d'une controverse entre le ministère de l'Intérieur et le "DP" (pour Deputy President, vice-président), qui accuse le pouvoir de vouloir le discréditer.

Sa rupture avec Kenyatta est consommée. Il a été un des plus virulents opposants à un projet de révision constitutionnelle défendu par le duo Kenyatta-Odinga et finalement invalidé par la Cour Suprême au terme d'une féroce bataille judiciaire.

En août 2021, Kenyatta avait mis son vice-président au défi de démissionner "s'il n'est pas content". "Désolé, mais je suis en mission", avait répondu celui qui prône une économie "du bas vers le haut (...) afin de sortir des millions de personnes du désespoir".

Kenyatta le Kikuyu - la première ethnie du pays - et Ruto le Kalenjin - la troisième en nombre - s'étaient alliés en 2012 pour conquérir le pouvoir, dans ce qui avait été surnommé la "coalition des accusés".

Ils étaient tous deux poursuivis pour crimes contre l'humanité par la Cour pénale internationale (CPI) pour leur rôle dans les violences post-électorales de 2007-2008, les pires depuis l'indépendance (plus de 1.100 morts et 600.000 déplacés). Les deux hommes étaient à l'époque dans des camps opposés.

La CPI avait décrit Ruto comme le principal planificateur des violences contre la communauté kikuyu dans son fief kalenjin de la vallée du Rift, avant d'abandonner toutes les poursuites en 2016.

Celui qui était un des hommes les plus craints du pays s'emploie à polir sa réputation sulfureuse, mêlant accusations de violences, de corruption, d'appropriation de terres et de détournement de fonds qu'il ne cesse de démentir.

Dès les prémisses du rapprochement Odinga-Kenyatta, il est parti en campagne, sillonnant le pays en casquette et polo, s'affichant sur les réseaux sociaux.

Ce quinquagénaire, chrétien "born again" revendiqué et père de six enfants, s'affiche en homme affable. Sa rhétorique des "débrouillards", misant sur un clivage social plus qu'ethnique, trouve notamment un écho chez les jeunes.

Ce discours n'est "pas nouveau", estime Nerima Wako-Ojiwa, mais "c'était le timing parfait" dans un pays durement frappé par la crise du Covid-19 et les répercussions économiques de la guerre en Ukraine.

"Il est considéré comme un des stratèges les plus efficaces de la politique kényane", rappelle Nic Cheeseman, professeur à l'université de Birmingham (Royaume-Uni).

"il a une grande expérience des campagnes électorales", souligne-t-il: "Il a été aux côtés d'Odinga, il a été aux côtés de Kenyatta, (...) il connaît leurs forces et leurs faiblesses".

sva/md/cl/jhd

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AUG 4

Kenya: Raila Odinga, l'inusable vétéran de la politique kényane #

8/4/2022, 7:20 AM
Nairobi, KEN

Candidat pour la cinquième fois à la présidence du Kenya, Raila Odinga est une figure historique de la politique kényane, qui a incarné durant des décennies l'opposition avant de se rapprocher ces dernières années du pouvoir.

La présidentielle du 9 août constitue probablement la dernière chance d'entrer à State House, le palais présidentiel, pour ce vétéran de la politique aujourd'hui âgé de 77 ans, dont l'ambition et la détermination sont au coeur de l'histoire récente du Kenya.

Engagé dès le début des années 80 contre le régime de parti unique, Raila Amolo Odinga a connu la détention, un bref exil en Norvège, avant d'entrer au Parlement lors des premières élections multipartites de 1992.

C'est lors des scrutins présidentiels de 1997, 2007, 2013 et 2017 que ce leader de la communauté Luo s'imposera comme un acteur politique incontournable, toujours candidat opposé au pouvoir.

En 2007, sa contestation de la victoire de Mwai Kibaki dégénère en sanglantes violences ethniques, faisant plus de 1.100 morts et des centaines de milliers de déplacés.

La crise se résoudra par un accord de partage du pouvoir, avec Odinga Premier ministre (2008-2013). Durant cette période, il est un des artisans de la Constitution de 2010, considérée comme une des plus progressistes du continent.

En 2013 et 2017, il a pour adversaire Uhuru Kenyatta, avec qui la rivalité est historique.

Son père, Jaramogi Oginga Odinga, fut le grand perdant de la lutte pour le pouvoir après l'indépendance du Kenya en 1963, au profit du premier président Jomo Kenyatta... père d'Uhuru.

En 2017, Raila Odinga fait invalider le scrutin par la Cour Suprême, une première en Afrique, à la fureur d'Uhuru Kenyatta, arrivé en tête. Ce dernier sera réélu quelques semaines plus tard lors d'un nouveau vote boycotté par Odinga.

Contestant la légitimité du chef de l'État, "RAO" se fait symboliquement investir "président du peuple".

Mais aujourd'hui, pour de nombreux Kényans, Odinga n'est plus un challenger du pouvoir. Son image d'éternel opposant a été écornée par son rapprochement avec Uhuru Kenyatta depuis quatre ans.

Après les violences post-électorales en 2017 qui ont fait des dizaines de morts, les deux rivaux ont, à la surprise générale, décidé d'une trêve, symbolisée en mars 2018 par une poignée de main restée célèbre.

Certains ont vu dans ce rapprochement avec Kenyatta - qui ne peut briguer un troisième mandat et soutient Odinga pour le scrutin du 9 août - un ralliement opportuniste pour enfin accéder au pouvoir.

Odinga assure avoir agi pour éviter une fracture profonde dans le pays. Les Kényans "savent que je suis une personne indépendante, une personne de conscience avec de très fortes convictions", a-t-il répété devant la presse en juillet: "Je ne peux pas être le larbin ou le candidat de quelqu'un".

"Raila est tout à fait conscient qu'une grande partie du soutien dont il bénéficie vient du fait qu'il est une figure anti-establishment depuis si longtemps. Le +handshake+ a sapé ce récit", explique à l'AFP Gabrielle Lynch, professeure à l'Université de Warwick (Grande-Bretagne).

Surnommé "Agwambo" ("le mystérieux" en langue luo), Raila Odinga est un homme de contradictions.

Ses plus fidèles partisans le considèrent toujours comme un combattant de la démocratie et un réformateur social indispensable dans un pays profondément inégalitaire. Ses détracteurs décrivent un agitateur populiste, prompt à jouer des rivalités ethniques pour assouvir son ambition.

Ces derniers l'ont également souvent épinglé comme "socialiste". S'il a certes suivi des études d'ingénieur à Leipzig, en Allemagne de l'Est communiste et prénommé Fidel son fils aîné - décédé en 2015 - en hommage à Fidel Castro, ce riche homme d'affaires est à la tête d'un solide patrimoine économique, notamment dans le secteur de l'éthanol et du pétrole.

Réputé pour ses talents d'orateur, il a vu son charisme s'éteindre quelque peu avec l'âge. Lors de la campagne, ce grand-père de cinq petits-enfants est apparu vieillissant, bredouillant, l'élocution parfois confuse.

Mais il ne se départit pas de sa passion pour le club d'Arsenal et surtout pour le reggae.

Depuis plusieurs années, il a fait sienne la chanson de Lucky Dube, dont il martèle le titre comme une devise: "Nobody can stop reggae" ("Personne ne peut arrêter le reggae").

bur-sva/md/cl/jhd

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AUG 4

Kenya: l'élection présidentielle de nouveau au défi de l'électronique #

8/4/2022, 7:18 AM
Nairobi, KEN

Censée apporter fiabilité, crédibilité et rapidité aux scrutins, l'introduction de dispositifs électroniques dans les élections au Kenya a régulièrement été source de controverses et de suspicions, qui restent vives avant l'élection présidentielle du 9 août.

Après les sanglantes violences post-électorales de 2007-2008, les autorités ont introduit une part de technologie dans le processus électoral pour tenter de crédibiliser les résultats et limiter les délais d'annonce sources de tensions.

Elle concerne l'inscription sur les listes électorales, l'identification au bureau de vote et la transmission des résultats.

L'enregistrement des électeurs via des kits biométriques mobiles a permis de gonfler le nombre d'inscrits, passé de 14,3 millions en 2013 à 19,6 millions en 2017 et 22,1 millions cette année, dans ce qui est unanimement reconnu comme une avancée démocratique majeure.

Ce registre de données biométriques (empreintes digitales, photo) est utilisé le jour de l'élection pour identifier électroniquement les électeurs au bureau de vote, avant une procédure de vote classique avec un bulletin papier déposé dans l'urne.

La technologie intervient à nouveau à la fermeture du bureau de vote. Après le dépouillement manuel, les résultats sont transmis électroniquement à l'échelon de la circonscription pour être compilés, puis au niveau national pour aboutir au résultat final.

En 2013, le système informatique avait largement failli, contraignant la commission électorale à basculer sur un système manuel. L'opposition, emmenée par Raila Odinga, avait dénoncé une action délibérée de sabotage en faveur du vainqueur Uhuru Kenyatta.

En 2017, l'identification biométrique avait correctement fonctionné mais la transmission des résultats avait été au coeur de la contestation de la réélection de Kenyatta.

Le camp Odinga affirmait notamment que le système avait été piraté pour favoriser le président sortant. Après audit, le fournisseur français, OT-Morpho, avait démenti toute manipulation ou piratage.

La Cour suprême avait invalidé le résultat et demandé un nouveau vote, évoquant notamment des "irrégularités" dans la transmission des résultats.

Dans un rapport publié en 2018, la mission d'observation de l'UE avait noté une "amélioration" dans l'usage de technologies, mais pointé des "tests insuffisants en termes de capacité et de sécurité".

La commission électorale (IEBC) a mené des tests de transmission de résultats en juin sur 2.900 bureaux de vote, avec un taux de réussite de 46%, puis fin juillet sur un échantillon réduit de 580 bureaux, avec 92% de succès.

"Mais il y a 46.233 bureaux de vote (...) donc ça reste une zone grise. Nous ne sommes pas sûrs que le système de transmission fonctionnera à 100%", note Mulle Musau, du Groupe d'observation des élections (Elog), association qui scrute depuis 2010 le bon déroulement des votes.

Cette année, 1.272 bureaux de vote se trouvent dans des zones avec une couverture internet faible ou nulle (contre environ 11.000 en 2017). Selon l'IEBC, les transmissions depuis ces bureaux seront assurées par des modems-satellite.

L'IEBC assure avoir paré à toute défaillance.

Les plus de 55.000 kits électroniques déployés fonctionnent avec deux batteries autonomes. Chaque circonscription sera dotée de six kits de secours et en ultime recours, un retour à un système manuel, tel un registre électoral papier, sera possible.

"Un kit n'a besoin d'internet que lorsqu'il transmet les résultats. Il fonctionne hors ligne, il ne peut pas être piraté", a également affirmé Justus Nyang'aya, un des responsables de l'IEBC.

Pour limiter les possibilités de fraude, les formulaires de résultats seront photographiés et envoyés sous forme de photo - et non en fichier texte comme en 2017. Ils seront ensuite recoupés avec les originaux papier, acheminés physiquement.

D'une manière générale, la technologie "a rendu nos élections beaucoup plus complexes, (...) plus floues et donc opaques", estime Mulle Musau.

"Quand les gens ont le sentiment que les choses sont floues, ça devient très dangereux", ajoute-t-il. "Le plus gros problème de nos élections tient en un mot: la confiance".

La société britannique Smartmatic, qui a remplacé OT-Morpho, a fait l'objet de critiques, qui affirment que plusieurs élections dans lesquelles elle a été impliquée - notamment en Ouganda, aux Philippines, au Venezuela - ont connu des failles.

"Les processus électoraux, d'une manière générale, sont vulnérables à la désinformation. Les acteurs malveillants diffusent systématiquement des mensonges pour saper les élections en alimentant la peur, l'anxiété et la méfiance", a répondu une porte-parole, Samira Saba, dans un courriel à l'AFP.

En juin, il a également été découvert qu'un million d'électeurs avaient été illégalement changés de circonscriptions dans la base de données l'IEBC.

Si trois employés de l'IEBC ont été arrêtés et les transferts d'électeurs annulés, l'affaire est venue alimenter un climat de suspicion croissante envers la fiabilité du système.

sva/md/cl/jhd

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AUG 4

Le Kenya appelé à voter, malgré l'apathie et la crise économique #

8/4/2022, 7:16 AM
Nairobi, KEN

Les Kényans se rendent aux urnes mardi pour des élections présidentielle, législatives et locales à forts enjeux dans ce pays d'Afrique de l'Est en proie à une certaine désillusion politique et une explosion du coût de la vie.

Quatre candidats sont en lice pour la fonction suprême, dont l'actuel vice-président William Ruto, et Raila Odinga, ancien leader de l'opposition désormais soutenu par le pouvoir.

Les avocats David Mwaure et George Wajackoyah - un ancien espion excentrique qui veut légaliser le cannabis - sont également dans la course, mais la présidentielle s'annonce comme un duel, serré, entre Ruto et Odinga.

"Il est très difficile de dire qui va gagner l'élection, c'est à pile ou face pour celui qui sera le plus attirant émotionnellement", affirme à l'AFP l'universitaire et analyste Macharia Munene.

Les deux favoris, dont les portraits s'étalent sur d'immenses panneaux à travers tout le pays, sont des visages bien connus des Kényans.

Odinga, 77 ans, est un vétéran de la lutte démocratique, qui a connu la prison avant d'accéder à la Primature (2008-2013) et qui se présente à la présidence pour la cinquième fois.

Ruto, 55 ans, occupe la vice-présidence depuis près d'une décennie et s'était vu promettre par le président sortant Uhuru Kenyatta de lui succéder en 2022. Mais une alliance inattendue entre Kenyatta et Odinga l'a marginalisé à partir de 2018.

Aujourd'hui, dans un retournement de situation typique de la très versatile politique kényane, Odinga est soutenu par l'appareil étatique tandis que Ruto fait figure de challenger du pouvoir.

La victoire du premier, un Luo, ou du second, un Kalenjin, ouvrira quoi qu'il en soit une nouvelle page après plus de vingt ans de présidences kikuyu, la première et très influente communauté du pays.

Ces manoeuvres politiciennes ont alimenté une certaine apathie au sein de la population, notamment chez les jeunes, moins nombreux qu'attendu à s'inscrire sur les listes électorales.

Au total, les 22,1 millions d'électeurs devront voter six fois mardi pour choisir leur président, mais aussi leurs parlementaires, gouverneurs et quelque 1.500 élus locaux.

Mais pour beaucoup, "la politique ne semble pas résoudre les problèmes", estime le chercheur indépendant en politique publique Alex Awiti.

"Le prochain président, le prochain sénateur, le prochain gouverneur fera juste la même chose" que son prédécesseur, ajoute-t-il à propos de la désillusion des électeurs dans ce pays notamment miné par la corruption.

Odinga a fait de la lutte contre ce fléau sa priorité, nommant comme colistière Martha Karua, une ancienne ministre réputée inflexible, et dénonçant les procédures judiciaires en cours contre le colistier de Ruto, Rigathi Gachagua.

En face, Ruto, sulfureux homme d'affaires parti de rien, se pose en champion des petites gens, leur promettant aides et emplois quand trois Kényans sur dix vivent avec moins de 1,90 dollars par jour selon la Banque Mondiale.

Le thème du pouvoir d'achat est devenu majeur dans cette locomotive économique régionale secouée par les conséquences du Covid-19, de la guerre en Ukraine et d'une grave sécheresse.

Derrière son petit kiosque à légumes dans une rue de Nairobi, Peter Kibacia constate avec dépit que les clients achètent moins qu'avant en raison de l'explosion des prix alimentaires.

"Personne n'économise en ce moment", affirme cet homme de 40 ans, père de trois enfants.

Dans ce contexte, l'enjeu économique pourrait même, selon certains experts, supplanter cette année le vote tribal, un facteur-clé depuis toujours dans les isoloirs kényans.

Quinze ans ont passé depuis les violences post-électorales de 2007-08 qui avaient fait plus de 1.100 morts principalement dans des affrontements entre Kikuyu et Kalenjin.

Mais cette blessure profonde continue de faire peser le spectre de nouvelles violences sur le Kenya, un îlot de stabilité démocratique dans une région tourmentée.

Lors de la dernière présidentielle, en 2017, la contestation des résultats par Raila Odinga avait débouché sur une sévère répression policière, faisant des dizaines de morts.

Depuis vingt ans, chaque élection a été contestée - jusque devant la Cour Suprême en 2013 et de 2017. Ce dernier avait même été annulé en raison d'"irrégularités" - une première en Afrique.

La Commission nationale de cohésion et d'intégrité, un organisme de promotion de la paix créé après 2007-08, a estimé dans un récent rapport à 53% la probabilité de violences au cours de la période électorale.

Des sources diplomatiques ont affirmé à l'AFP être confiantes dans le fait que le calme prévaudra le jour du scrutin.

Les écoles, qui accueillent la plupart des bureaux de vote, sont d'ores et déjà fermées et une grande enseigne de supermarchés a invité les clients à faire des provisions.

"C'est précaire (...) Mais nous allons prier pour une élection pacifique", estime de son côté Suzana Napwora, une étudiante de 22 ans qui votera mardi pour la première fois.

md-amu-al/sva/jhd

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AUG 3

Six mois de campagne électorale tout-terrain au Kenya #

8/3/2022, 7:09 AM
Nairobi, KEN

Aux enterrements, en chanson ou même en nettoyant des toilettes publiques: les candidats aux élections présidentielle, législatives et locales au Kenya n'ont négligé aucun moyen pour rallier un maximum de voix.

Le 9 août, 22,1 millions de Kényans désigneront l'ensemble de leurs représentants, du président de la République aux assemblées de comté, en passant par les députés, sénateurs et gouverneurs. Six scrutins au total, terme de six campagnes qui ont rythmé la vie du pays ces derniers mois.

Ce géant d'Afrique de l'Est a paru moins passionné cette année que lors de précédentes élections. Outre les habituels convois électoraux crachant musique et slogans et les portraits géants le long des rues, les candidats se sont démenés pour tenter de sortir les électeurs d'une certaine apathie.

Dans la capitale Nairobi, la course au poste de gouverneur a parfois pris un tour inattendu avec Polycarp Igathe, candidat du parti présidentiel.

Cet ancien responsable commercial d'une grande banque est un visage connu des Nairobiens. Il avait été élu vice-gouverneur en 2017 sur le ticket du sulfureux Mike Sonko, avant de démissionner en raison de désaccords.

Cette année, Igathe a été vu passant la serpillère dans des toilettes publiques, donnant un coup de main pour laver des voitures, vendant des chapatis dans la rue, servant des bières dans un bar-restaurant...

Cette campagne inhabituelle a déclenché un torrent de commentaires sur les réseaux sociaux, parfois enthousiastes, le plus souvent ironiques.

"Nairobiens, sachez qu'il y a quelqu'un du nom de Polycarp Igathe, il peut facilement entrer chez vous dès 05H00 du matin pour préparer le petit-déjeuner et même faire la vaisselle. Il est accompagné de dix caméras et de sécurité. Ne les confondez pas avec des CAMBRIOLEURS", a raillé un internaute sur Twitter.

"Je prévois d'aller au salon de coiffure demain. Pourquoi je vous dis ça ? Je poste juste ça là au cas où Polycarp Igathe serait de service pour les shampooings", blaguait une autre.

Le candidat a revendiqué cette stratégie. "La façon dont j'ai conçu ma campagne, ma première phase était de m'ancrer et de m'enraciner dans le quotidien des Nairobiens", expliquait-il en mai.

Au Kenya, un autre lieu pour être vu et entendu du plus grand nombre sont les enterrements.

Sous le règne de l'autocrate Daniel Arap Moi (1978-2002), ces cérémonies étaient un des rares espaces où la parole se libérait.

"Faire campagne aux enterrements, c'est devenu une culture. C'est un endroit où beaucoup de personnes sont réunies, un public clé en main. Vous avez juste à venir et parler", explique l'analyste politique Nerima Wako-Ojiwa.

Fin avril, les funérailles de l'ancien président Mwai Kibaki (2002-20013), auxquelles assistaient le chef de l'Etat sortant Uhuru Kenyatta et les deux principaux concurrents à la présidentielle Raila Odinga et William Ruto, ont ainsi donné lieu à des hommages funèbres aux accents électoraux, chacun revendiquant son héritage dans son fief du Mont Kenya, région réputée stratégique électoralement.

Depuis l'avènement du tube "Unbwogable" qui a porté la victoire de Kibaki en 2002 et mis fin aux 24 années de pouvoir de Moi, la musique est devenue un élément-clé des stratégies électorales.

Cette année, on a pu voir Odinga, 77 ans, dans plusieurs clips musicaux, dont le hit "Leo ni Leo" ("C'est aujourd'hui") où il apparaît en blouson bombers entouré de jeunes. Certains observateurs ont vu dans ces déhanchements une tentative du septuagénaire de se montrer en prise avec la nouvelle génération.

Une chanson a été au coeur de controverses: le tube de rap "Sipangwingwi".

Depuis sa sortie à l'automne 2021, ce titre de deux lycéens - qui peut se traduire par "On décide pas pour moi" - a cumulé plus de 7,5 millions de vues sur YouTube et été reprise sur des dizaines de milliers de vidéos TikTok.

Le duo s'est déchiré, l'un soutenant Odinga, l'autre Ruto, chacun venant interpréter le tube à leurs conventions d'investiture respectives.

William Ruto en a fait un slogan de campagne, avec la variante "Hatupangwingwi" ("On décide pas pour nous"), en défiance aux "dynasties" politiques représentées par Odinga et son soutien Kenyatta.

Mais en avril, la formule "hatupangwingwi" a été classée par une commission gouvernementale parmi 12 expressions interdites car susceptibles d'alimenter des discours de haine.

Dans les heures suivant l'annonce, Ruto postait sur Twitter le message "Hatupangwingwi !" accompagné d'un remix du clip de "Sipangwingwi", le mettant en scène avec un des auteurs.

En juillet, un tribunal a invalidé l'interdiction de la formule, relançant la viralité du slogan à moins d'un mois du jour J.

sva/md/cpy/jhd

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AUG 2

Kenya: ONG et société civile appellent à un scrutin pacifique et transparent #

ONG et société civile kényanes ont appelé mardi à des élections pacifiques et transparentes, à une semaine d'une présidentielle à forts enjeux pour ce pays d'Afrique de l'Est plusieurs fois meurtri par des violences et des contentieux post-électoraux.

Le scrutin du 9 août est "un des plus complexes de l'histoire du pays" depuis l'instauration du multipartisme en 1991 et "collectivement nous pouvons avoir une élection crédible", a déclaré mardi Felix Owuor, représentant de l'Institut de droit et de gouvernance pour l'Afrique (Elgia).

Cette organisation de la société civile s'est unie à une quinzaine d'autres pour lancer mardi un site internet destiné à collecter et géolocaliser des incidents avant, pendant et après les élections.

Plus de 22 millions d'électeurs sont appelés aux urnes mardi prochain, pour désigner leur prochain président pour les cinq années à venir, ainsi que des centaines de parlementaires et quelque 1.500 élus locaux.

Or, le spectre des violences passées plane sur ces élections scrutées par la communauté internationale, le Kenya étant une locomotive économique et un îlot de stabilité démocratique dans une région tourmentée.

Une des inquiétudes soulevées mardi par Human Rights Watch (HRW) est liée à l'impunité de la police.

"L'échec à lutter contre les abus des policiers lors de précédentes élections kényanes risque de les encourager à continuer leur mauvaise conduite lors des élections générales de cette année", déclare dans un communiqué Otsieno Namwaya, directeur de HRW pour l'Afrique de l'Est.

La police kényane est souvent accusée par les ONG d'usage excessif de la force et de mener des exécutions extra-judiciaires, notamment dans les quartiers populaires.

Ses agents ont également été soupçonnés d'avoir formé des escadrons visant notamment des militants et des avocats qui enquêtaient sur ces abus.

HRW affirme avoir recensé le décès d'au moins 104 personnes, selon elle du fait de la police, lors des dernières élections de 2017, principalement des partisans de Raila Odinga, alors candidat de l'opposition.

Après une annulation du scrutin par la Cour Suprême et une deuxième élection, les tensions électorales ne s'étaient apaisées que début 2018 à la suite d'une alliance surprise entre le président Uhuru Kenyatta et Odinga.

Ce dernier, aujourd'hui soutenu par Kenyatta et son parti, est un des favoris à la présidentielle face à William Ruto, vice-président sortant devenu challenger du pouvoir.

Si la campagne n'a pour l'instant été émaillée que d'échauffourées sporadiques, les craintes demeurent que plus d'incidents n'éclatent.

Marqué par le vote communautaire, le Kenya et sa quarantaine d'ethnies a en effet à plusieurs reprises souffert de violences post-électorales, notamment en 2007-2008, où plus de 1.100 personnes sont décédées lors d'affrontements à caractère ethnique. Et tous les scrutins depuis 2002 ont été contestés.

Déjà les écoles, dans lesquelles sont installés la plupart des bureaux de vote, sont fermées et une grande enseigne de supermarchés a invité les clients à faire des provisions.

Pour recenser les incidents éventuels dans les plus de 46.000 bureaux de vote, des groupes de la société civile ont ainsi décidé de s'unir pour "infuser un peu de confiance", a expliqué mardi devant la presse Angela Lungati, directrice de Ushahidi, plate-forme de partage de l'information créée au Kenya en 2008.

Ensemble elles ont lancé le site uchaguzi.or.ke dont le but est d'"encourager les citoyens ordinaires à participer activement afin de garantir un résultat libre et équitable en partageant des données sur ce qui se passe autour d'eux", résume Mme Lungati.

Les poches de tensions ou anomalies susceptibles de perturber le processus électoral peuvent être signalées via des SMS et des service téléphonique gratuits, ou sur les réseaux sociaux.

Une équipe vérifiera notamment la véracité des faits évoqués grâce à des centaines de volontaires sur le terrain, aux côtés de dizaines d'observateurs internationaux.

"La responsabilité de tenir des élections pacifiques, crédibles et intègres" n'incombe pas à la seule la Commission électorale indépendante, "c'est aussi la responsabilité de la société civile", veut croire Felix Owuor.

En 2017, la Commission électorale avait largement été pointée du doigt pour les irrégularités dénoncées par la Cour Suprême dans son jugement.

al-ho/jhd

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AUG 2

Kenya: l'impunité de la police renforce les risques d'abus liés aux élections, selon HRW #

8/2/2022, 9:32 AM
Nairobi, KEN

L'échec du Kenya à avoir tenu la police pour responsable des décès survenus pendant les dernières élections de 2017 augmente le risque que des agents abusent de leur pouvoir lors du scrutin de la semaine prochaine, affirme mardi Human Rights Watch (HRW).

Pour l'ONG de défense des droits de l'homme, les autorités ne sont parvenues ni à enquêter sur les accusations de violences policières, ni à mettre en place des réformes.

"L'échec à lutter contre les abus des policiers lors de précédentes élections kényanes risque de les encourager à continuer leur mauvaise conduite lors des élections générales de cette année" convoquées le 9 août, déclare dans un communiqué Otsieno Namwaya, directeur de HRW pour l'Afrique de l'Est.

La police kényane est souvent accusée par les ONG d'usage excessif de la force et de mener des exécutions extra-judiciaires, notamment dans les quartiers populaires.

Ses agents ont également été soupçonnés dans le passé de former des escadrons visant notamment des militants et des avocats qui enquêtaient sur ces abus.

HRW affirme avoir recensé le décès d'au moins 104 personnes, selon elle du fait de la police, lors des dernières élections de 2017, principalement des partisans de Raila Odinga, alors candidat de l'opposition.

Des policiers lourdement armés avaient été déployés pour disperser les manifestations après le refus d'Odinga d'accepter la victoire proclamée du président sortant Uhuru Kenyatta.

Après une annulation du scrutin par la Cour Suprême et une deuxième élection, les tensions électorales ne s'étaient apaisées que début 2018 à la suite d'une alliance surprise entre Kenyatta et Odinga.

"A seulement sept jours d'une nouvelle élection générale, les autorités kényanes n'ont pas encore pris de mesures pour garantir la justice contre les abus policiers qui ont caractérisé les élections générales de 2017", affirme l'ONG.

Mardi 9 août, le Kenya élira un nouveau président ainsi que des centaines de parlementaires et quelque 1.500 élus locaux.

La course présidentielle se jouera essentiellement entre deux candidats : le vice-président sortant William Ruto, qui fait figure de challenger, et Raila Odinga, désormais soutenu par Kenyatta et le parti au pouvoir.

Composé de plus de 40 tribus et marqué par le vote communautaire, le Kenya a plusieurs fois souffert de violences post-électorales, notamment en 2007-2008, où plus de 1.100 personnes sont décédées lors d'affrontements à caractère ethnique.

ho/amu/md/al/jhd

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AUG 2

Elections test au Kenya, îlot de stabilité dans une région tourmentée #

8/2/2022, 6:33 AM

Durant ses dernières semaines à la tête du Kenya, le président Uhuru Kenyatta a joué plus que de coutume les médiateurs dans la Corne de l'Afrique, multipliant les interventions dans les crises en Somalie, en République démocratique du Congo ou en Éthiopie.

Faute de pouvoir briguer un troisième mandat, il s'apprête à quitter ses fonctions et les alliés du Kenya scrutent avec inquiétude la manière dont s'écrira le prochain chapitre de l'histoire du pays, devenu point un d'ancrage démocratique dans une région stratégique mais instable.

L'élection présidentielle du 9 août alimente les interrogations chez les observateurs et les diplomates, notamment autour d'une passation de pouvoir pacifique dans un pays qui a connu plusieurs crises post-électorales.

Les deux principaux candidats, William Ruto et Raila Odinga, se sont engagés à respecter le résultat des urnes. Mais tous deux ont été accusés d'inciter à la violence lors de précédents scrutins et les capitales occidentales redoutent le pire dans une élection qui s'annonce serrée.

Le Kenya est devenu une épaule sur laquelle les partenaires étrangers se sont appuyés dans une Afrique de l'Est instable.

"Les États faibles, les États en conflit, ne peuvent pas jouer le rôle de point d'ancrage diplomatique", estime Cameron Hudson, du Centre pour les études stratégiques et internationales (CSIS) Afrique.

Selon lui, le Kenya a endossé ce rôle de "nouvelle puissance diplomatique" autrefois dévolu à l'Ethiopie.

Pour ce faire, Uhuru Kenyatta est intervenu dans des crises où des institutions régionales telles que l'Union africaine (UA) et l'organisation régionale est-africaine Igad - historiquement proches d'Addis Abeba - ont tardé à agir.

Fin 2021 par exemple, quand une avancée des rebelles tigréens approchait de la capitale éthiopienne, Uhuru Kenyatta s'est rendu à l'improviste sur place pour exhorter le Premier ministre Abiy Ahmed à trouver une solution pacifique.

En juillet, les rebelles ont posé comme condition à d'éventuels pourparlers de paix qu'ils se tiennent sous l'égide de Kenyatta, et non de l'UA dont le siège est à Addis Abeba.

Sur le plan international également, le Kenya a cherché à étendre son influence. En février, contrairement à la position équivoque d'autres États africains, Nairobi a fermement condamné l'invasion russe en Ukraine au Conseil de sécurité de l'ONU.

Ce type d'intervention a été chaleureusement accueilli par les partenaires étrangers, et notamment les Etats-Unis.

Washington a des troupes stationnées dans le pays, un allié capital dans la lutte contre les islamistes radicaux dans la Somalie voisine.

Les Etats-Unis considèrent Kenyatta comme un émissaire de confiance dans des crises régionales où ils peinent à faire bouger les choses, décryptent des analystes.

"Il est probablement le dirigeant africain avec qui le président américain a le plus parlé", commente M. Hudson, selon qui Washington a "beaucoup investi pour s'assurer que la stabilité se poursuive après ces élections".

Courant 2022, William Ruto et Raila Odinga ont voyagé à Londres et Washington pour assurer aux décideurs politiques que Nairobi continuerait à jouer un rôle central dans la région.

Si les diplomates jugent peu probable un revirement de politique étrangère, ce dossier ne sera cependant "pas une priorité", assure Macharia Munene, professeur d'histoire et de relations internationales à l'Université internationale des États-Unis à Nairobi.

"Je ne pense pas que Raila ou Ruto aient une passion pour ce genre de choses", contrairement à Uhuru Kenyatta, commente-t-il.

Le nouveau président aura de toute manière "d'autres chats à fouetter" que de panser les plaies de la région.

La principale économie d'Afrique de l'Est est en effet criblée de dettes et son prochain gouvernement sera sous la pression des bailleurs internationaux pour réduire les subventions populistes récemment accordées pour atténuer les effets de l'inflation.

"Nous sommes juste préoccupés par le temps que le Kenya pourra consacrer à la politique étrangère et à la médiation régionale s'il est accaparé par tant de dossiers au niveau national", souligne Meron Elias, analyste au centre de réflexion International Crisis Group.

La stature internationale du Kenya était entamée lorsqu'Uhuru Kenyatta a pris ses fonctions en 2013.

Il a été inculpé de crimes contre l'humanité par la Cour pénale internationale, tout comme William Ruto, pour leur rôle présumé dans des violences post-électorales en 2007.

Ces affaires ont été abandonnées en 2016, après ce que la procureure générale eut dénoncé comme "une campagne d'intimidation des témoins" qui aurait contraint à un non-lieu.

Certains craignent aujourd'hui que "les relations qui se sont améliorées ces dernières années ne déraillent à nouveau" après le 9 août, glisse sous couvert anonymat un analyste américain et observateur chevronné des élections au Kenya.

Selon lui, "tout le monde est évidemment nerveux".

np/txw/al/sva/jhd

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LocationNairobi - KEN
Date8/2/2022, 6:33 AM