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A Halabja, 33 ans après l'attaque chimique, la justice se fait toujours attendre #

3/16/2021, 9:36 AM
Halabja, IRQ

Plus de 20 heures par jour, Hawker Saber est sous respirateur. Trente-trois ans après l'attaque chimique du régime de Saddam Hussein, ce Kurde souffre encore, comme toute sa ville de Halabja, où nombreux sont ceux qui demandent toujours justice.

Hawker avait trois ans, mais garde des souvenirs du terrible 16 mars 1988. Ce jour-là, pendant cinq heures, l'aviation irakienne a déversé sur hommes, femmes, enfants, élevages et habitations un mélange de gaz de combat, dont du gaz moutarde, selon des experts.

Parce que les peshmergas, les combattants kurdes, avaient soutenu l'armée iranienne dans sa guerre contre l'Irak, environ 5.000 Kurdes irakiens, en majorité des femmes et des enfants, ont été tués dans la plus importante attaque aux gaz de combat contre des civils.

Si beaucoup sont morts ce jour-là, les autres habitants de Halabja -- aujourd'hui 200.000 -- semblent n'en avoir jamais fini avec cette journée de malheur.

"Il y a encore 486 grands malades de l'attaque chimique à Halabja", à moins de 250 kilomètres au nord-est de Bagdad, explique à l'AFP Loqman Abdelqader, président de l'association des victimes de l'attaque.

"Ils ont des difficultés respiratoires et des problèmes de vue", poursuit ce Kurde qui a lui-même perdu six membres de sa famille dans l'attaque.

"Ni les autorités fédérales ni les autorités kurdes d'Irak n'ont mis en place de programme de soins pour les sauver", accuse-t-il encore, alors que jusqu'à la pandémie de Covid-19, c'est l'Iran qui, chaque année, prenait à sa charge les soins de plusieurs malades, mais toujours au compte-gouttes.

Outre les malades, une autre question épineuse est toujours en suspens à Halabja: celle des enfants qui ont officiellement été mis à l'abri en Iran, à moins de dix kilomètres de là.

Trente-trois ans plus tard, "142 enfants sont toujours portés disparus", assure à l'AFP Ayad Arass, en charge de la Commission locale de protection de l'enfance.

La justice après tous ces crimes, Souiba Mohammed y a cru un temps. Cette Kurde de 60 ans est même allée en 2006 à Bagdad pour témoigner contre le cousin et homme de main de Saddam Hussein, le général Ali Hassan al-Majid, le fameux "Ali le chimique".

Quatre ans plus tard, l'homme était pendu notamment pour le massacre de Halabja -- qu'il maintenait avoir mené pour la sécurité de l'Irak alors aux prises avec son puissant voisin iranien -- mais la vie de Souiba, qui a perdu cinq de ses enfants dans l'attaque, tout comme sa vue, n'a pas changé.

"Depuis des années, des responsables me promettent de m'envoyer à l'étranger pour me faire opérer et voir enfin les visages de mes enfants encore en vie", dit-elle à l'AFP. "Mais aucun d'eux n'a tenu parole", lâche-t-elle entre deux sanglots.

Quant à Saddam Hussein, condamné à mort pour le massacre de 148 villageois chiites, il a été pendu fin 2006. Sa pendaison a mis fin aux poursuites engagées contre lui pour "génocide" pour la mort d'environ 180.000 Kurdes, parmi lesquels les 5.000 de Halabja, dans le cadre de sa "campagne Anfal" en 1987 et 1988.

Faute de pouvoir obliger le dictateur à répondre devant un juge de ce massacre, Halabja essaye maintenant de forcer ses complices à sortir du bois.

Le 13 mars 2018, 5.500 proches de victimes ont assigné en justice 25 entreprises européennes et personnes, parmi lesquelles des Irakiennes, ayant aidé, selon eux, le régime de Saddam Hussein à développer son stock d'armes chimiques, rapporte à l'AFP l'un de leurs avocats, Me Ayad Ismaïl.

"Il y a déjà eu huit audiences et la prochaine est prévue en juin", assure l'avocat, et "des convocations seront envoyées aux entreprises citées qui ont demandé à consulter les preuves".

Mais pour M. Abdelqader, le temps presse. Déjà, dit-il, depuis la chute de Saddam Hussein en 2003, "116 survivants de l'attaque sont morts", autant de preuves vivantes en moins pour la ville martyre.

str/sbh/hj/bfi

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MAR 15

Sept roquettes visent une base abritant des Américains en Irak #

3/15/2021, 7:28 PM
Samarra, IRQ

Sept roquettes ont visé lundi soir une base aérienne abritant des soldats américains au nord de Bagdad, dernier épisode en date d'une série d'attaques dont Washington fait porter la responsabilité à des factions pro-Iran.

Le 3 mars déjà, un sous-traitant américain avait été tué lors d'une attaque contre une autre base aérienne, celle d'Aïn al-Assad, dans l'ouest désertique de l'Irak.

L'attaque de lundi soir n'a fait ni victime ni dégât à l'intérieur de la base de Balad, a précisé à l'AFP un responsable de la sécurité.

Selon lui, seules deux roquettes étaient bien tombées dans l'enceinte de la base, tandis que cinq autres s'étaient écrasées sur le village proche d'al-Bou Hassan.

Les roquettes, de type Katioucha, ont été tirées depuis un village de la province voisine de Diyala, plus à l'est, un lieu où d'autres lancements de roquettes sur Balad ont déjà été localisés, a poursuivi la même source.

Les derniers tirs n'ont pas été revendiqués dans l'immédiat mais Washington pointe à chaque fois les nombreux groupes armés entraînés et financés par l'Iran.

Depuis mi-février, les tirs de roquettes en Irak contre des troupes américaines ou l'ambassade des Etats-Unis ont repris.

Des roquettes sont ainsi tombées près de l'ambassade américaine à Bagdad et d'autres avaient déjà visé la base aérienne de Balad, blessant un employé irakien d'une entreprise américaine chargée de la maintenance de F-16.

Des roquettes ont également touché une base militaire abritant la coalition à l'aéroport d'Erbil, la capitale du Kurdistan irakien dans le nord. Deux personnes ont péri, dont un entrepreneur civil étranger travaillant pour la coalition.

Avant cela, durant près de deux mois, les pro-Iran avaient respecté une trêve qu'ils avaient annoncé unilatéralement.

Si les installations militaires ou diplomatiques américaines avaient été épargnées durant cette période, des bombes ont à plusieurs reprises explosé au passage de convois irakiens de soutien logistique aux troupes de la coalition formée en 2014 par Washington pour défaire le groupe Etat islamique (EI).

Ennemis jurés, la République islamique d'Iran et les Etats-Unis ont tous deux une présence ou des alliés en Irak.

Washington y déploie quelque 2.500 militaires et l'Iran a entre autres le soutien du Hachd al-Chaabi, puissante coalition de paramilitaires intégrée à l'Etat irakien, composée principalement de factions armées et financées par Téhéran.

Et à chaque attaque meurtrière, Washington menace de faire "le nécessaire" et promet de faire payer le prix fort à l'Iran.

Fin février, les Etats-Unis ont ainsi mené un raid contre des miliciens irakiens pro-Iran en Syrie. Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), 22 miliciens irakiens avaient péri. Selon le Pentagone, la frappe n'avait fait qu'un mort.

Le porte-parole du Pentagone, John Kirby, a reconnu que cette frappe n'avait pas eu l'effet dissuasif escompté mais plaidé que "personne ne veut d'une escalade".

En janvier 2020, une telle spirale avait failli dégénérer en conflit ouvert en Irak, après qu'un drone américain avait tué le général iranien Qassem Soleimani à Bagdad, en riposte à la mort d'Américains en Irak.

str-sbh/feb

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MAR 15

Irak: sept roquettes visent une base abritant des Américains (sécurité) #

3/15/2021, 7:01 PM
Samarra, IRQ

Sept roquettes ont visé lundi soir une base aérienne abritant des soldats américains au nord de Bagdad, a indiqué à l'AFP un responsable de la sécurité, dernier épisode en date d'une série d'attaques dont Washington fait porter la responsabilité à des factions pro-Iran.

Le 4 mars déjà, un sous-traitant américain avait été tué lors d'une attaque contre une autre base aérienne, celle d'Aïn al-Assad, dans l'ouest désertique de l'Irak.

str-sbh/feb

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MAR 13

En Irak, un village en deuil après huit morts dans une attaque de l'EI #

3/13/2021, 1:22 PM
Al-Bou Dor, IRQ

Des centaines de personnes ont enterré samedi huit Irakiens tués par des jihadistes qui les accusaient de renseigner le Hachd al-Chaabi, coalition de paramilitaires désormais intégrée à l'Etat, au nord de Bagdad, a constaté un correspondant de l'AFP.

Six membres d'une même famille, parmi lesquels deux femmes, ainsi qu'un avocat et un policier du voisinage, ont été tués vendredi dans une attaque revendiquée 24 heures plus tard par l'agence de propagande de l'organisation de l'Etat islamique (EI).

Des témoins ont expliqué à l'AFP que des hommes vêtus en habits militaires s'étaient présentés dans les trois maisons visées avant d'abattre les huit victimes.

Le commandement militaire irakien a expliqué avoir déterminé que les assaillants avaient agi sous les ordres d'un habitant du village d'Al-Bou Dor, chassé par ses voisins qui l'accusaient d'appartenir à l'EI.

"Il est revenu se venger", affirme le communiqué du commandement militaire.

Dans un communiqué publié en ligne, l'EI a de son côté accusé les victimes d'être "des espions du Hachd al-Chaabi".

Le Hachd, composé principalement de paramilitaires chiites pro-Iran, a été intégré aux troupes irakiennes à l'issue de la guerre pour bouter les jihadistes (sunnites) hors d'Irak. L'EI a ravagé les provinces sunnites du pays de 2014 à 2017, parmi lesquelles Salaheddine où se trouve Al-Bou Dor.

"Les victimes étaient des gens simples et sans histoire", a assuré à l'AFP le cheikh Ayed al-Abassi, chef de la tribu locale, dénonçant une "attaque dont les motifs restent incompréhensibles".

Cette attaque est la première menée par des jihadistes depuis la visite du pape François il y a une semaine, la première d'un souverain pontife de l'histoire en Irak.

Fin 2017, l'Irak a annoncé sa "victoire" face à l'EI. Les attaques jihadistes dans les villes ont considérablement diminué depuis, mais les troupes irakiennes continuent de combattre des cellules dormantes dans les zones montagneuses et désertiques.

Régulièrement, des jihadistes parviennent à tuer, principalement des militaires mais aussi des civils, lors d'attaques perpétrées généralement de nuit et dans des zones reculées.

str-sbh/sc/bfi

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MAR 13

Après la visite du pape en Irak, des chrétiens ravis mais sans illusion #

3/13/2021, 1:00 PM

La première visite d'un pape en Irak a ravi les chrétiens de ce pays à écrasante majorité musulmane où nombre d'entre eux ont été persécutés, mais sa venue et ses appels à la liberté religieuse ne changeront rien, estiment des fidèles sans illusions.

C'est le cas de Wajdane Nouri qui ne veut surtout "pas oublier la joie" apportée par François à Bagdad, mais après des années "d'injustice", cette chrétienne ira bientôt rejoindre ses filles aux Etats-Unis.

Dans la cathédrale Saint-Joseph où elle anime depuis longtemps la chorale et d'autres activités, tout porte encore la trace du pape argentin: immenses posters à son effigie, tapis rouge d'honneur et bouquets en masse...

Le souverain pontife est entré dans l'histoire le 6 mars en prononçant une messe dans la capitale ravagée depuis 40 ans par des guerres, crises économiques et autres affrontements confessionnels. Auparavant, il a prié dans une église théâtre il y a dix ans du pire attentat anti-chrétiens en Irak.

Mme Nouri a vécu toutes ces années de disette et de peur, et après "les persécutions et les injustices, il faut tirer des leçons", estime cette quinquagénaire.

Pour elle comme pour les 400.000 chrétiens d'Irak, les mots du pape sur le fait que personne ne devrait être un "citoyen de deuxième classe" ou sur "la plaie de la corruption", ont particulièrement résonné. Leurs griefs, le souverain pontife en personne les a prononcé à haute voix.

Mais en 20 ans, la communauté chrétienne est passée de 6% à 1% de la population irakienne. Et il faudra lancer de grands chantiers pour stopper l'hémorragie, prévient le père Nadheer Dakko, prêtre à Saint-Joseph.

Le grand ayatollah chiite Ali Sistani a dit oeuvrer pour que les chrétiens d'Irak vivent "en paix" et avec "tous leurs droits constitutionnels", et le Premier ministre Moustafa al-Kazimi a décrété une "journée de la tolérance".

Mais "il ne nous faut pas que des journées nationales, les grandes théories doivent être transformées en actes. Jusqu'ici on n'a ressenti aucun changement dans notre vie de tous les jours", déclare à l'AFP le père Dakko.

En Irak, "il n'y a aucune opportunité pour les gens brillants", déplore Mme Nouri en pointant du doigt un système réputé pour son clientélisme, aux mains de partis majoritairement musulmans excluant de fait les chrétiens.

Sara, une autre chrétienne de la petite poignée de fidèles venus assister à une messe, a vu presque toute sa famille et ses amis s'exiler. "Ils ne pensent pas du tout à revenir", assure à l'AFP cette fonctionnaire.

Et dans un pays où la Constitution affirme que "l'islam est la religion d'Etat et la source de la législation", les appels du pape à la "liberté religieuse et de conscience" risquent fort de rester lettre morte, prévient William Warda, de l'ONG Hammourabi de défense des minorités.

Depuis des années, ce militant chrétien tente de faire changer la loi dite de la "carte d'identité" préjudiciable aux chrétiens. Ce texte prévoit le changement automatique de religion sur un document d'état civil d'une personne dont l'un des parents s'est converti à l'islam. Ainsi "des chrétiens ont été inscrits comme musulmans contre leur gré", assure le père Dakko.

Quant à Saadallah Mikhaïl, il n'a toujours pas pu reconstruire sa maison à Mossoul, dans le Nord, qu'il a abandonnée en 2014 quand le groupe Etat islamique (EI) a débarqué. A la libération trois ans plus tard, ce chrétien de 61 ans a été parmi les premiers à être revenu. Mais il a dû louer une nouvelle maison car la sienne dans le Vieux Mossoul n'était plus qu'un tas de ruines encore miné aujourd'hui et dont personne ne peut approcher.

"Les maisons de mes proches et de 3.000 chrétiens sont toujours en ruine et je ne pense pas qu'elles seront reconstruites bientôt", poursuit l'homme.

Si le pape était entouré de chrétiens à Mossoul et dans d'autres localités du Nord où il est passé, beaucoup étaient venus en visiteurs après s'être installés depuis plusieurs années au Kurdistan irakien voisin.

Devant le pape, les responsables locaux n'ont cessé d'appeler les chrétiens à revenir "chez eux, à Mossoul. Mais on ne peut pas dire aux gens de revenir sans leur fournir la sécurité, des hôpitaux, des écoles et des infrastructures", martèle M. Warda.

lk/sbh/bfi

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