La justice enjoint au département des Bouches-du-Rhône de prendre en charge des mineurs isolés #
Le tribunal administratif de Marseille a ordonné lundi au département des Bouches-du-Rhône d'actualiser la liste des mineurs isolés présents sur son territoire et de leur assurer dans les 15 jours une assistance et mise à l'abri.
Le tribunal avait été saisi en référé par plusieurs associations dont Médecins sans frontières et La Cimade. Elles reprochaient au conseil départemental de "se retrancher derrière une impossibilité matérielle ou un manque de moyens" pour ne pas assurer leur obligation, causant ainsi "une atteinte grave au droit à la vie et à la protection de la santé" inscrits dans la Constitution.
Cette saisine faisait suite à une mobilisation de mineurs non-accompagnés, le 2 mars devant la mairie de Marseille, qui réclamaient leur mise à l'abri dans un contexte d'urgence sanitaire liée à la crise du Covid-19.
La municipalité, contrôlée par la gauche, avait alors procédé dans l'urgence à l'hébergement de 38 jeunes dans un gymnase en dénonçant "le silence coupable" du conseil départemental dirigé par la droite. La présidente LR du département Martine Vassal --candidate malheureuse à la mairie au printemps-- avait répliqué en accusant la ville d'"instrumentaliser la misère".
Au final seuls 7 des 38 jeunes, placés sous ordonnance de placement provisoire, ont été pris en charge par le département qui a décidé d'attendre un "retour d'évaluation de la minorité des autres personnes".
Devant le tribunal, le conseil départemental a contesté toute "carence" de sa part en matière de prise en charge des mineurs non-accompagnés, "dans la mesure où des places existent en nombre": 955 en décembre 2020 auxquelles se sont ajoutées 135 places en 2021.
Le tribunal a cependant estimé que, "sans méconnaitre (...) la qualité des diligences accomplies par le département, le maintien sans abri de jeunes adolescents" caractérisait "une carence dans l'accomplissement de son obligation d'hébergement d'urgence".
Il a enjoint en conséquence la collectivité de "dresser contradictoirement avec les associations requérantes une liste nominative actualisée identifiant les jeunes reconnus mineurs" et d'assurer leur "mise à l'abri et assistance".
pr/mdm/cb
La CEDH condamne la Roumanie pour l'expulsion d'un Tunisien pour raisons de sécurité nationale #
La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a condamné mardi la Roumanie pour avoir expulsé de son territoire un Tunisien pour des raisons de sécurité nationale qui ne lui ont pas été spécifiées, car classées secrètes.
"Le requérant n'a reçu aucune information sur son comportement concret susceptible de mettre en danger la sécurité nationale et sur le déroulement des moments clés de la procédure", a indiqué la cour, instance judiciaire du Conseil de l'Europe installée à Strasbourg.
En conséquence, les sept juges de la CEDH ont estimé à l'unanimité que la Roumanie avait violé l'article 1 du protocole n°7 de la Convention européenne des droits de l'homme, portant sur les garanties procédurales en cas d'expulsion d'étrangers.
Le requérant est un Tunisien né en 1982 et arrivé en 2007 en Roumanie où il se maria avec une Roumaine et eut un enfant. En 2009, il obtint un titre de séjour pour "vie familiale" valable jusqu'en 2015, explique la CEDH dans un communiqué de presse.
En 2012, la justice roumaine le déclara "personne indésirable" et lui interdit de séjourner en Roumanie pendant cinq ans.
"Le parquet indiquait que, selon des informations classifiées de niveau secret mises à sa disposition par le Service roumain de renseignement, il existait des indices sérieux d'après lesquels (le requérant) menait des activités de nature à mettre en danger la sécurité nationale", poursuit la cour. Son avocat ne put avoir accès aux pièces classées secrètes du dossier et le requérant fut expulsé en Tunisie en décembre 2012.
"Au vu des informations très réduites et générales dont le requérant disposait, l'intéressé ne pouvait se fonder, pour défendre sa cause, que sur des suppositions, sans pouvoir contester concrètement tel ou tel comportement dont il aurait été affirmé qu'il mettait en danger la sécurité nationale", relève la cour.
La CEDH a condamné Bucarest à verser 5.000 euros au requérant pour dommage moral.
maj/bdx/lch
Protection des migrants en Méditerranée: "Il est urgent d'agir", alerte le Conseil de l'Europe #
Le Conseil de l'Europe a vilipendé mardi le "manque de volonté des Etats européens" à établir des politiques de protection des migrants traversant la Méditerranée, causant la perte de "milliers de vies humaines".
"Depuis des années, les pays d'Europe se sont engagés dans une course vers l'abîme, pour maintenir hors de nos frontières les personnes ayant besoin de notre protection, avec des conséquences désastreuses", déplore Dunja Mijatovic, commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, en introduction d'un rapport publié mardi.
"Leur réponse est l'un des exemples les plus flagrants de la façon dont les mauvaises politiques migratoires portent atteinte aux droits humains et coûtent la vie à des milliers d'êtres humains".
Le document dresse le bilan de la mise en place des recommandations publiées en 2019, dans un précédent rapport, par le Conseil de l'Europe. Et le constat est sans appel: "la situation des droits humains dans la région méditerranéenne reste déplorable", et s'est "encore détériorée".
Sur la période observée, entre juillet 2019 et fin 2020, plus de 2.600 décès ont été comptabilisés par l'Organisation internationale pour les migrations (OIM). Le rapport souligne que ce chiffre est sans doute sous-estimé, les noyades se produisant bien souvent hors des radars. "Les naufrages en Méditerranée demeurent tragiquement fréquents".
Le Conseil de l'Europe énumère plusieurs raisons à la détérioration de la situation, notamment "le retrait progressif des navires affrétés par les Etats", en même temps que les entraves, administratives et judiciaires, posées aux opérations de sauvetage menées par les ONG.
"L'approche des Etats consiste encore à limiter le travail vital des ONG, plutôt que de considérer qu'elles comblent les lacunes laissées par leur propre désengagement".
L'institution estime que ce désengagement des Etats européens vise à "accroître la possibilité" que les personnes en mer soient interceptées par les garde-côtes libyens et ramenées dans ce pays, malgré les "graves violations des droits humains" qui y sont commises contre les migrants. Certains pays n'ont d'ailleurs pas hésité à signer ou renouveler des accords avec Tripoli, et à "externaliser" certaines responsabilités.
Elle dénonce également la pratique, "en augmentation", des refoulements d'embarcations de migrants, documentée dans le cas des autorités maltaises, grecques et chypriotes, et suspectées de la part de l'agence Frontex.
Le Conseil de l'Europe souligne que le contexte d'épidémie de Covid-19 a encore dégradé la situation: ainsi, en novembre 2020, un navire a été utilisé pour maintenir 1.195 migrants en quarantaine au large de la Sicile, et les délais de débarquement ont été allongés pour d'autres bateaux, quand les ports n'étaient pas tout simplement rendus inaccessibles.
Le rapport invite donc les Etats européens à "développer des voies de migration sûres et légales", par exemple en développant les "visas humanitaires", encore "sous-utilisés", ou en assouplissant les règles permettant le regroupement familial. De telles réformes permettraient de limiter les "trafics et la traite d'êtres humains".
En conclusion, Dunja Mijatovic appelle les pays membres du Conseil de l'Europe, tous signataires de la Convention européenne des droits de l'homme, à prendre des mesures pour préserver la vie des migrants tentant de traverser la Méditerranée.
"Il s'agit là d'une question de vie ou de mort - et il en va de la crédibilité de l'engagement des pays européens en faveur des droits humains", prévient-elle.
apz/bdx/mba
Protection des migrants en Méditerranée: "Il est urgent d'agir" (Conseil de l'Europe) #
Le Conseil de l'Europe a vilipendé, dans un rapport publié mardi, le "manque de volonté des Etats européens" d'établir des politiques de protection des migrants traversant la Méditerranée, causant la perte de "milliers de vies humaines".
"Depuis des années, les pays d'Europe se sont engagés dans une course vers l'abîme, pour maintenir hors de nos frontières les personnes ayant besoin de notre protection, avec des conséquences désastreuses", déplore Dunja Mijatovic, commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, en introduction du rapport.
"Leur réponse est l'un des exemples les plus flagrants de la façon dont les mauvaises politiques migratoires portent atteinte aux droits humains et coûtent la vie à des milliers d'êtres humains", poursuit-elle.
Le document dresse le bilan de la mise en place des recommandations publiées en 2019, dans un précédent rapport, par le Conseil de l'Europe. Et le constat est sans appel: "la situation des droits humains dans la région méditerranéenne reste déplorable", et s'est "encore détériorée".
Sur la période observée, entre juin 2019 et fin 2020, plus de 2.600 décès ont été comptabilisés par l'Organisation internationale pour les migrations (OIM). Le rapport souligne que ce chiffre est sans doute sous-estimé, les noyades se produisant bien souvent hors des radars.
Le Conseil de l'Europe énumère plusieurs raisons à la détérioration de la situation, notamment "le retrait progressif des navires affrétés par les Etats", en même temps que les entraves, administratives et judiciaires, posées aux opérations de sauvetage menées par les ONG.
"L'approche des Etats consiste encore à limiter le travail vital des ONG, plutôt que de considérer qu'elles comblent les lacunes laissées par leur propre désengagement".
L'institution estime que ce désengagement des Etats européens vise à "accroître la possibilité" que les personnes en mer soient interceptées par les garde-côtes libyens et ramenées dans ce pays, malgré les "graves violations des droits humains" qui y sont commises contre les migrants.
En conclusion, Dunja Mijatovic appelle les pays membres du Conseil de l'Europe, tous signataires de la Convention européenne des droits de l'homme, à prendre des mesures pour préserver la vie des migrants tentant de traverser la Méditerranée.
"Il s'agit là d'une question de vie ou de mort - et il en va de la crédibilité de l'engagement des pays européens en faveur des droits humains", prévient-elle.
apz/bdx/mba
La justice enjoint au département des Bouches-du-Rhône de prendre en charge des mineurs isolés #
Le tribunal administratif de Marseille a ordonné lundi au département des Bouches-du-Rhône d'actualiser la liste des mineurs isolés présents sur son territoire et de leur assurer dans les 15 jours une assistance et mise à l'abri.
Le tribunal avait été saisi en référé par plusieurs associations dont Médecins du monde et La Cimade. Elles reprochaient au conseil départemental de "se retrancher derrière une impossibilité matérielle ou un manque de moyens" pour ne pas assurer leur obligation, causant ainsi "une atteinte grave au droit à la vie et à la protection de la santé" inscrits dans la Constitution.
Cette saisine faisait suite à une mobilisation de mineurs non-accompagnés, le 2 mars devant la mairie de Marseille, qui réclamaient leur mise à l'abri dans un contexte d'urgence sanitaire liée à la crise du Covid-19.
La municipalité, contrôlée par la gauche, avait alors procédé dans l'urgence à l'hébergement de 38 jeunes dans un gymnase en dénonçant "le silence coupable" du conseil départemental dirigé par la droite. La présidente LR du département Martine Vassal --candidate malheureuse à la mairie au printemps-- avait répliqué en accusant la ville d'"instrumentaliser la misère".
Au final seuls 7 des 38 jeunes, placés sous ordonnance de placement provisoire, ont été pris en charge par le département qui a décidé d'attendre un "retour d'évaluation de la minorité des autres personnes".
Devant le tribunal, le conseil départemental a contesté toute "carence" de sa part en matière de prise en charge des mineurs non-accompagnés, "dans la mesure où des places existent en nombre": 955 en décembre 2020 auxquelles se sont ajoutées 135 places en 2021.
Le tribunal a cependant estimé que, "sans méconnaitre (...) la qualité des diligences accomplies par le département, le maintien sans abri de jeunes adolescents" caractérisait "une carence dans l'accomplissement de son obligation d'hébergement d'urgence".
Il a enjoint en conséquence la collectivité de "dresser contradictoirement avec les associations requérantes une liste nominative actualisée identifiant les jeunes reconnus mineurs" et d'assurer leur "mise à l'abri et assistance".
pr/mdm/pb
France: appels à mieux protéger les femmes exilées #
Les ressortissantes étrangères, qui représentent la moitié de la population immigrée en France, sont souvent en grande précarité et victimes de violences, dénoncent lundi des associations qui appellent à les protéger "indépendamment de leur nationalité".
"L'accès aux droits pour les femmes étrangères n'est pas toujours effectif et les politiques publiques actuelles ne proposent pas de modifications significatives pour améliorer leur protection et leur situation", a déploré La Cimade, l'une des principales associations de défense des personnes migrantes, à l'occasion de la Journée internationale des droits des femmes.
Les femmes s'exilent pour étudier mais aussi pour "se soustraire à des pratiques néfastes", poursuit l'association, réclamant que leur situation "soit mieux prise en considération pour qu'elles (...) puissent être protégées indépendamment de leur nationalité".
La France, premier pays d'asile pour les femmes victimes de mutilations sexuelles, dont l'excision, veut encore renforcer la protection des exilées touchées par ce "fléau", avait affirmé en février la ministre déléguée à la Citoyenneté Marlène Schiappa.
De nombreuses exilées, qui représentent 51% des personnes immigrées et un tiers des demandeurs d'asile en France, "peuvent se retrouver en situation de grande précarité et vulnérabilité, victimes de violence ou de traite", a estimé pour sa part Delphine Rouilleault, directrice générale de l'association France terre d'asile, opératrice de l'Etat.
La dirigeante appelle à "favoriser l'autonomisation des femmes, développer des programmes spécifiques, offrir du répit et des solutions de garde pour les mères isolées".
"Il faut désormais se donner les moyens d'une politique d'intégration digne et ambitieuse", poursuit-elle, "qui commence par sortir ces femmes de l'invisibilisation".
sha/lbx/pb/cls
Les associations appellent à mieux protéger les femmes exilées, vulnérables et précaires #
Les ressortissantes étrangères, qui représentent la moitié de la population immigrée en France, sont souvent en grande précarité et victimes de violences, dénoncent lundi des associations qui appellent à les protéger "indépendamment de leur nationalité".
"L'accès aux droits pour les femmes étrangères n'est pas toujours effectif et les politiques publiques actuelles ne proposent pas de modifications significatives pour améliorer leur protection et leur situation", a déploré La Cimade, l'une des principales associations de défense des personnes migrantes, à l'occasion de la Journée internationale des droits des femmes.
Les femmes s'exilent pour étudier mais aussi pour "se soustraire à des pratiques néfastes", poursuit l'association, réclamant que leur situation "soit mieux prise en considération pour qu'elles (...) puissent être protégées indépendamment de leur nationalité".
La France, premier pays d'asile pour les femmes victimes de mutilations sexuelles, dont l'excision, veut encore renforcer la protection des exilées touchées par ce "fléau", avait affirmé en février la ministre déléguée à la Citoyenneté Marlène Schiappa.
De nombreuses exilées, qui représentent 51% des personnes immigrées et un tiers des demandeurs d'asile en France, "peuvent se retrouver en situation de grande précarité et vulnérabilité, victimes de violence ou de traite", a estimé pour sa part Delphine Rouilleault, directrice générale de l'association France terre d'asile, opératrice de l'Etat.
La dirigeante appelle à "favoriser l'autonomisation des femmes, développer des programmes spécifiques, offrir du répit et des solutions de garde pour les mères isolées".
"Il faut désormais se donner les moyens d'une politique d'intégration digne et ambitieuse", poursuit-elle, "qui commence par sortir ces femmes de l'invisibilisation".
sha/lbx/pb
Mayotte: destruction de 230 habitations dans un bidonville en application de la loi Elan #
La préfecture de Mayotte a lancé une vaste opération de destructions d'habitat illégaux lundi dans un bidonville du nord de l'île, qui doit permettre la démolition de 230 cases en trois jours, la plus grosse action du genre depuis l'entrée en vigueur de la loi Élan dans le département.
"Cette opération loi Élan à Koungou est la plus importante depuis octobre dans le sens où c'est aussi la plus difficile, et elle est emblématique, tant nous connaissons les troubles à l'ordre public qui agitent cette commune", a déclaré le préfet, Jean-François Colombet, lundi lors d'une conférence de presse.
Cette opération réunit deux critères demandés par la loi Elan à savoir des "risques pour la sécurité des occupants" et aussi "pour la sécurité et ordre public", a souligné le préfet en faisant référence au fait que le bidonville a été construit sur une zone instable, alors que la la saison des pluies bat son plein à Mayotte. C'est dans ce quartier qu'une coulée de boue avait provoqué la mort d'une mère et de ses quatre enfants en janvier 2018.
Selon la préfecture, 230 cases doivent être rasées entre lundi et mercredi dans ce quartier dit de la "Jamaïque", ce qui concerne un total d'environ 450 personnes. Et 184 étrangers en situation irrégulière ont été interpellés en amont de l'opération, grâce à l'important dispositif de gendarmerie et de police déployé depuis une semaine: chaque jour, une centaine de gendarmes et une quarantaine de policiers du Groupe d'appui opérationnel (GAO) quadrillent la zone.
Le 26 février dernier, une opération d'interpellation d'étrangers en situation irrégulière dans ce quartier informel, prévue en amont de la destruction, avait provoqué un déferlement de violences. En représailles, des bandes de jeunes s'étaient attaquées aux résidences situées à l'entrée du bidonville, brûlant les maisons et provoquant le départ de plusieurs habitants.
Prévue initialement le 9 mars, dans le respect du délai d'un mois et huit jours fixé par la loi, l'opération de "la Jamaïque" a finalement eu lieu dès ce lundi, prenant de court certains habitants, occupés à déménager leurs meubles dans la boue ce lundi dès l'aube, a constaté une journaliste de l'AFP.
Votée en novembre 2018, la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ÉLAN) permet au représentant de l'Etat d'ordonner par arrêté aux occupants de locaux illégaux et indignes d'évacuer les lieux afin de lutter contre l'habitat insalubre.
cod/etr/cg/pb
Luttopia, itinéraire d'un collectif pirate, du squat à la reconnaissance #
Avec ses réquisitions "humanistes et solidaires" de bâtiments publics pour héberger les personnes à la rue, le collectif pirate Luttopia à Montpellier a "fait suer" les autorités. Mais son travail pour loger les plus démunis est désormais reconnu.
"Il y a eu un retournement de situation vraiment inattendu, une ouverture et une forme de reconnaissance de notre travail par les autorités", raconte Gwendal Lasne, l'une des chevilles ouvrières du collectif, en recevant l'AFP dans l'immense squat "Utopia 003".
Des milliers de personnes, "étudiants en galère, punks à chiens, familles françaises et migrantes, demandeurs d'asile" ont trouvé refuge depuis des années dans ce bâtiment aux murs décorés d'immenses fresques de street-art, souligne Gwen, militante quadragénaire.
Luttopia a investi ces lieux fin 2016. Les anciennes archives départementales étaient alors vides depuis des années aux Beaux-Arts, quartier en voie de "gentrification", tout près du centre historique de Montpellier.
Depuis 2014, Luttopia avait déjà occupé un bâtiment de l'ordre des avocats puis des locaux de l'ancienne Direction départementale des Affaires Sanitaires et Sociales dans une ville où les difficultés de logement et la pauvreté sont souvent dissimulées derrière une image d'eldorado.
Après avoir été expulsés, ils ont investi les anciennes archives, déclenchant l'ire de la municipalité de l'époque, propriétaire des lieux et dirigée par Philippe Saurel (DVG).
Mais depuis, la pandémie de Covid-19 a "rendu plus visible la grande précarité", souligne Jonathan Hardy, autre co-fondateur de Luttopia.
Alors que la menace d'une expulsion ordonnée par la justice pesait sur l'Utopia 003, une concertation avec les autorités s'est amorcée fin 2020.
Un accord pour une sortie sans expulsion doit être signé le 11 mars par Luttopia, la préfecture, la nouvelle municipalité socialiste de Montpellier et la Fondation Abbé Pierre, qui oeuvre contre le mal-logement. Environ 90 personnes encore hébergées à Utopia 003 seront relogées et pour certaines régularisées.
"Le lieu sera vidé, ce qui est important pour les riverains et pour la municipalité, mais on accompagne les personnes qui vivaient là et on est respectueux du travail qu'ont porté le collectif Luttopia et la Fondation Abbé Pierre", précise le maire PS de Montpellier Michaël Delafosse.
Cet accord est "l'illustration concrète" de la volonté de "définir une stratégie sur chaque squat qui ne peut pas être "la norme de l'habitat".
Sa priorité, assure M. Delafosse, est que les familles logées par Luttopia aient "des situations stables pour que les enfants puissent aller à l'école régulièrement".
Luttopia, passé de collectif au statut d'association, s'engage à quitter "le paquebot" d'ici à la date symbolique du 31 mars marquant la fin de la trêve hivernale et se verra attribuer par la ville trois maisons pour trois ans pour poursuivre hébergement et travail social.
"On est de l'ultra-gauche par nos idées politiques mais on est pour le dialogue avec les institutions", souligne Gwen.
"Forcément à certains moments il y a eu confrontation mais à aucun moment on a usé de la violence: c'est ce qui a amené les institutions à se dire +d'accord c'est un squat, oui il nous font suer mais en même temps sans eux on aurait encore plus de gens à la rue+".
"Luttopia compte dans le paysage montpelliérain. Ils ont ouvert le lieu à d'autres", souligne Sylvie Chamvoux, directrice de la Fondation Abbé Pierre pour l'Occitanie, une des partenaires avec qui le collectif a travaillé, aux côtés du Secours populaire, de la Cimade ou Médecins du Monde.
A ses yeux, la solution trouvée à Montpellier pourrait servir de "modèle" pour d'autres squats au niveau régional ou national.
Dans ses trois nouvelles maisons, Luttopia proposera toujours "un accueil inconditionnel". Comme elle l'a fait pour Leonora, originaire d'Albanie, arrivée un soir de 2017 dans le vaste hall de "l'Uto 003" avec ses parents. "Elle avait 15 ans, elle était déterminée à obtenir un toit pour sa famille", se souvient Gwen.
"Je me sens chez moi ici, c'est dur de devoir quitter ce lieu mais on espère un avenir meilleur, plus stable", explique dans un français parfait la jeune fille aux longs cheveux bruns ondulés qui préfère taire son nom de famille. Aujourd'hui âgée de 18 ans, elle est scolarisée en bac pro gestion et administration.
Fustigeant "le décalage hallucinant" entre certains budgets alloués à des associations et les actions effectivement réalisées contre la précarité, les militants de Luttopia comme Gwen rappellent: "Depuis des années, on fait beaucoup avec rien ou plus exactement avec des dons. Il n'est pas question qu'on soit là pour ramasser de l'argent".
il/iw/or
Suspension taxe Trump: une "excellente nouvelle" pour les vins de Bordeaux #
La suspension pour quatre mois des taxes douanières américaines sur les vins européens est une "excellente nouvelle", avant un accord définitif, a estimé samedi le président du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB) Bernard Farges.
"Nous l'attendions depuis l'instauration de cette taxe le 18 octobre 2019. C'est un soulagement qui va nous permettre de reconquérir les parts de marché aux États-Unis", a précisé à l'AFP le président du CIVB.
Selon l'interprofession, les pertes liées à cette taxe s'élèvent à 100 millions d'euros de chiffre d'affaires pour la filière bordelaise en 2020 et à 400 millions d'euros pour l'ensemble des vins français.
Concernant les ventes en volumes, les vins de Bordeaux avaient réussi à "limiter la casse" en 2020 en diminuant les prix des vins "pour encaisser les 25% de taxe", a résumé Bernard Farges.
Cette suspension pour quatre mois des taxes douanières américaines a été annoncée vendredi après-midi à la suite d'un échange téléphonique entre la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen et le président des Etats-Unis Joe Biden.
"Nous sommes dans un contexte compliqué en Chine et en Europe à cause du Covid", a expliqué Bernard Farges, précisant que ce moratoire permettra de "relancer l'activité" aux Etats-Unis, deuxième marché pour le vin de Bordeaux après la Chine.
Sur Twitter, le ministre de l'Économie et des Finances, Bruno Lemaire s'est réjoui pour les "viticulteurs français" de la fin de la "guerre commerciale" entre l'Europe et les Etats-Unis.
Airbus et son concurrent américain Boeing, et à travers eux l'Union européenne et les Etats-Unis, s'affrontent depuis octobre 2004 devant l'OMC sur les aides publiques versées aux deux groupes, jugées illégales.
Les Etats-Unis avaient été autorisés en octobre 2019 à imposer des taxes sur près de 7,5 milliards de dollars (6,8 milliards d'euros) de biens et services européens importés chaque année, dont les vins à hauteur de 25%.
Plus tôt dans la semaine, Londres et Washington avaient réussi à trouver un accord permettant notamment de suspendre les droits de douane sur des produits britanniques comme le whisky écossais.
lpb/pjl/rhl