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Deux ans après l'explosion, des Libanais excédés réclament une enquête internationale #

Le deuxième anniversaire de l'explosion dévastatrice au port de Beyrouth a été marqué jeudi par des manifestations de proches des victimes réclamant une enquête internationale sur les raisons de la tragédie et par un nouvel effondrement de silos dans la zone portuaire.

Le 4 août 2020, des centaines de tonnes de nitrate d'ammonium stockées sans précaution dans un entrepôt près du port explosent faisant plus de 200 morts et 6.500 blessés et provoquant un traumatisme national.

Les causes exactes de cette explosion, qualifiée de l'une des plus importantes non nucléaires jamais enregistrées dans le monde, sont toujours inconnues tout comme l'identité des responsables, dans un pays où règne très souvent l'impunité.

Il faut "une enquête impartiale, approfondie et transparente sur l'explosion", a lancé jeudi le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, faisant écho à des appels d'ONG, d'experts et des familles des victimes.

Jeudi à 18H07 (15H07 GMT) précises, moment de l'explosion il y a deux ans, des manifestants ont observé une minute de silence suivie d'applaudissements devant le port où, quelques minutes plus tôt, une nouvelle partie des silos qui contiennent des milliers de tonnes de blé et autres céréales se sont effondrés suite à un incendie.

L'effondrement s'est produit alors que trois marches distinctes arrivaient au port de Beyrouth. Un énorme nuage de fumée a couvert la zone portuaire après l'effondrement et des manifestants sur place ont porté des masques en filmant la structure avec leur téléphones portables.

"Je vois la même scène, presque du même endroit, deux ans plus tard", a déclaré Lama Hachem, 30 ans, à l'AFP dans le centre-ville de Beyrouth en observant la fumée et la poussière qui se dégageaient du port.

"Nous avons le droit de connaître la vérité", a lancé Mireille Khoury, qui a perdu son fils dans l'explosion, devant des milliers de manifestants qui hissaient des drapeaux libanais.

Les participants ont ensuite prononcé un serment pour affirmer leur intention de continuer la lutte jusqu'à ce que l'identité du "criminel" soit révélée.

- Enquête internationale -

"Pas de justice sous le règne de la milice et de la mafia", pouvait-on lire sur une des banderoles brandie par les manifestants. Une référence à la classe dirigeante -- en place depuis des décennies --, accusée par une grande partie de la population de mauvaise gestion, de corruption et de négligence.

"Quand l'explosion s'est produite, on pensait que la vérité allait être connue au bout de cinq jours... deux ans se sont écoulés et on ne sait rien", a dit à l'AFP Aya Qassem, 21 ans, qui participait aux manifestations.

Une des marches s'est brièvement arrêtée devant l'ambassade de France, pour demander le soutien dans la relance de l'enquête.

"Ce que nous réclamons, c'est une enquête internationale contre les criminels," a lancé Tracy Naggear, qui a perdu sa fille Alexandra, 3 ans, dans l'explosion.

Dans un entretien au quotidien libanais L'Orient-Le Jour publié jeudi le président français Emmanuel Macron a insisté sur l'importance de connaître la vérité.

"Je le redis aujourd'hui avec force: justice doit être rendue. Pour faire leur deuil et se reconstruire, les Libanaises, les Libanais et tous ceux qui vivent dans ce pays (...) ont besoin de connaître la vérité", a-t-il dit.

Le Liban est aujourd'hui embourbé dans la pire crise économique de son histoire avec la chute vertigineuse de la monnaie locale, des pénuries en tout genre, des restrictions bancaires qui ont provoqué un appauvrissement de la population.

- "Seul espoir" -

En avril, le gouvernement a ordonné la démolition des silos, mais cette opération a été suspendue en raison d'objections de proches de victimes qui veulent en faire un lieu de mémoire. Mais il y a plus de deux semaines, un incendie s'est déclaré dans la partie la plus endommagée des silos, causant l'effondrement de silos dimanche suivis par un nouvel écroulement jeudi.

L'association des familles des victimes a dénoncé dans un communiqué jeudi "l'inaction" des responsables face à l'incendie. Même "si une partie (des silos) s'effondre, nous insistons (...) sur la préservation et la protection" du reste de la structure.

L'enquête elle aussi est suspendue depuis des mois en raison d'obstructions politiques. L'enquêteur principal, Tarek Bitar, a été empêché de poursuivre sa mission par une série de poursuites intentées contre lui et par une campagne dirigée par le puissant mouvement armé du Hezbollah qui accuse le juge de partialité.

"La justice libanaise doit pouvoir travailler et mener à son terme son enquête en toute transparence, à l'abri de toute interférence politique", a indiqué jeudi le porte-parole du Quai d'Orsay lors d'un point presse.

Quoiqu'il en soit, pour des ONG et des experts indépendants de l'ONU "il est clair aujourd'hui plus que jamais que l'enquête nationale ne peut rendre justice". Et qu'une enquête internationale "sans délai" est nécessaire.

bur-ho-lar/elw/vk

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AUG 4

Deux ans après l'explosion, des Libanais excédés réclament une enquête internationale #

Le deuxième anniversaire de l'explosion dévastatrice au port de Beyrouth a été marqué jeudi par des manifestations de proches des victimes réclamant une enquête internationale sur les raisons de la tragédie et par un nouvel effondrement de silos dans la zone portuaire.

Le 4 août 2020, des centaines de tonnes de nitrate d'ammonium stockées sans précaution dans un entrepôt près du port explosent faisant plus de 200 morts et 6.500 blessés et provoquant un traumatisme national.

Les causes exactes de cette explosion, qualifiée de l'une des plus importantes non nucléaires jamais enregistrées dans le monde, sont toujours inconnues tout comme l'identité des responsables, dans un pays où règne très souvent l'impunité.

Il faut "une enquête impartiale, approfondie et transparente sur l'explosion", a lancé jeudi le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, faisant écho à des appels d'ONG, d'experts et des familles des victimes.

Jeudi à 18H07 (15H07 GMT) précises, moment de l'explosion il y a deux ans, des manifestants ont observé une minute de silence suivie d'applaudissements devant le port où, quelques minutes plus tôt, une nouvelle partie des silos qui contiennent des milliers de tonnes de blé et autres céréales se sont effondrés suite à un incendie.

L'effondrement s'est produit alors que trois marches distinctes arrivaient au port de Beyrouth. Un énorme nuage de fumée a couvert la zone portuaire après l'effondrement et des manifestants sur place ont porté des masques en filmant la structure avec leur téléphones portables.

"Je vois la même scène, presque du même endroit, deux ans plus tard", a déclaré Lama Hachem, 30 ans, à l'AFP dans le centre-ville de Beyrouth en observant la fumée et la poussière qui se dégageaient du port.

"Nous avons le droit de connaître la vérité", a lancé Mireille Khoury, qui a perdu son fils dans l'explosion, devant des milliers de manifestants qui hissaient des drapeaux libanais.

Les participants ont ensuite prononcé un serment pour affirmer leur intention de continuer la lutte jusqu'à ce que l'identité du "criminel" soit révélée.

- Enquête internationale -

"Pas de justice sous le règne de la milice et de la mafia", pouvait-on lire sur une des banderoles brandie par les manifestants. Une référence à la classe dirigeante -- en place depuis des décennies --, accusée par une grande partie de la population de mauvaise gestion, de corruption et de négligence.

"Quand l'explosion s'est produite, on pensait que la vérité allait être connue au bout de cinq jours... deux ans se sont écoulés et on ne sait rien", a dit à l'AFP Aya Qassem, 21 ans, qui participait aux manifestations.

Une des marches s'est brièvement arrêtée devant l'ambassade de France, pour demander le soutien dans la relance de l'enquête.

"Ce que nous réclamons, c'est une enquête internationale contre les criminels," a lancé Tracy Naggear, qui a perdu sa fille Alexandra, 3 ans, dans l'explosion.

Dans un entretien au quotidien libanais L'Orient-Le Jour publié jeudi le président français Emmanuel Macron a insisté sur l'importance de connaître la vérité.

"Je le redis aujourd'hui avec force: justice doit être rendue. Pour faire leur deuil et se reconstruire, les Libanaises, les Libanais et tous ceux qui vivent dans ce pays (...) ont besoin de connaître la vérité", a-t-il dit.

Le Liban est aujourd'hui embourbé dans la pire crise économique de son histoire avec la chute vertigineuse de la monnaie locale, des pénuries en tout genre, des restrictions bancaires qui ont provoqué un appauvrissement de la population.

- "Seul espoir" -

En avril, le gouvernement a ordonné la démolition des silos, mais cette opération a été suspendue en raison d'objections de proches de victimes qui veulent en faire un lieu de mémoire. Mais il y a plus de deux semaines, un incendie s'est déclaré dans la partie la plus endommagée des silos, causant l'effondrement de silos dimanche suivis par un nouvel écroulement jeudi.

L'association des familles des victimes a dénoncé dans un communiqué jeudi "l'inaction" des responsables face à l'incendie. Même "si une partie (des silos) s'effondre, nous insistons (...) sur la préservation et la protection" du reste de la structure.

L'enquête elle aussi est suspendue depuis des mois en raison d'obstructions politiques. L'enquêteur principal, Tarek Bitar, a été empêché de poursuivre sa mission par une série de poursuites intentées contre lui et par une campagne dirigée par le puissant mouvement armé du Hezbollah qui accuse le juge de partialité.

"La justice libanaise doit pouvoir travailler et mener à son terme son enquête en toute transparence, à l'abri de toute interférence politique", a indiqué jeudi le porte-parole du Quai d'Orsay lors d'un point presse.

Quoiqu'il en soit, pour des ONG et des experts indépendants de l'ONU "il est clair aujourd'hui plus que jamais que l'enquête nationale ne peut rendre justice". Et qu'une enquête internationale "sans délai" est nécessaire.

bur-ho-lar/elw/vk

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AUG 4

Deux ans après l'explosion, des Libanais excédés réclament une enquête internationale #

Le deuxième anniversaire de l'explosion dévastatrice au port de Beyrouth a été marqué jeudi par des manifestations de proches des victimes réclamant une enquête internationale pour connaître la vérité sur la tragédie et par un nouvel effondrement de silos dans la zone portuaire.

Le 4 août 2020, des centaines de tonnes de nitrate d'ammonium stockées sans précaution dans un entrepôt près du port explosent. Plus de 200 morts et 6.500 blessés ont été dénombrés et des quartiers ont été entièrement dévastés, un évènement tragique qui a causé un traumatisme pour l'ensemble des Libanais.

Elle a été qualifiée de l'une des plus importantes explosions non nucléaires jamais enregistrées dans le monde. Mais deux ans plus tard, on ignore encore ses causes exactes ou l'identité des responsables dans un pays où règne très souvent l'impunité.

Il faut "une enquête impartiale, approfondie et transparente sur l'explosion", a lancé jeudi le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, faisant écho à des appels d'ONG, d'experts et des familles des victimes.

Jeudi à partir de 15H00 (12H00 GMT), trois marches distinctes organisées à l'appel des proches de victimes en direction du port ont démarré. Et en ce jour de commémoration comme un rappel malheureux de l'explosion d'il y a deux ans, une nouvelle partie des silos qui contiennent des milliers de tonnes de blé et autres céréales se sont effondrés suite à un incendie.

L'effondrement s'est produit alors que les marches des manifestants arrivaient au port de Beyrouth.

"Je vois la même scène, presque du même endroit, deux ans plus tard", a déclaré Lama Hachem, 30 ans, à l'AFP dans le centre-ville de Beyrouth en observant un nuage de poussière émanant du port.

"C'est choquant que la même scène se répète devant nous aujourd'hui", a-t-elle ajouté, retenant ses larmes sous le choc.

- Enquête internationale -

"Pas de justice sous le règne de la milice et de la mafia", pouvait-on lire sur une des banderoles brandie par les manifestants. Une référence à la classe dirigeante -- en place depuis des décennies --, accusée par une grande partie de la population de mauvaise gestion, de corruption et de négligence.

"Quand l'explosion s'est produite, on pensait que la vérité allait être connue au bout de cinq jours... deux ans se sont écoulés et on ne sait rien", a dit à l'AFP Aya Qassem, 21 ans, qui participait aux manifestations.

Une des marches s'est brièvement arrêtée devant l'ambassade de France, où des manifestants ont demandé le soutien de Paris pour le relance de l'enquête.

"Ce que nous réclamons, c'est une enquête internationale contre les criminels," a lancé Tracy Naggear, qui a perdu sa fille Alexandra, 3 ans, dans l'explosion.

Dans un entretien au quotidien libanais L'Orient-Le Jour publié jeudi le président français Emmanuel Macron a insisté sur l'importance de connaître la vérité.

"Je le redis aujourd'hui avec force: justice doit être rendue. Pour faire leur deuil et se reconstruire, les Libanaises, les Libanais et tous ceux qui vivent dans ce pays (...) ont besoin de connaître la vérité", a-t-il dit.

Le Liban est aujourd'hui embourbé dans la pire crise économique de son histoire: chute vertigineuse de la monnaie locale, pénuries de carburants, de médicaments, de pain et d'eau potable, restrictions bancaires et un appauvrissement de la population.

- "Seul espoir" -

L'explosion, "c'était un cauchemar", se souvient Lara Khatchikian dans son appartement face au port qui a été très endommagé mais qu'elle a restauré.

"Mes voisins et moi étions stressés en permanence. J'ai ressenti de la peur, nous ne pouvions pas dormir. Il faut une force surhumaine pour vivre quand on se souvient constamment de l'explosion", a-t-elle ajouté.

En avril, le gouvernement a ordonné la démolition des silos, mais cette opération a été suspendue en raison d'objections de proches de victimes qui veulent en faire un lieu de mémoire. Mais il y a plus de deux semaines, un incendie s'est déclaré dans la partie la plus endommagée des silos, causant l'effondrement de silos dimanche suivis par un nouvel écroulement jeudi.

L'enquête elle aussi est suspendue depuis des mois en raison d'obstructions politiques. L'enquêteur principal, Tarek Bitar, a été empêché de poursuivre sa mission par une série de poursuites intentées contre lui et par une campagne dirigée par le puissant mouvement armé du Hezbollah qui accuse le juge de partialité.

"La justice libanaise doit pouvoir travailler et mener à son terme son enquête en toute transparence, à l'abri de toute interférence politique", a indiqué jeudi le porte-parole du Quai d'Orsay lors d'un point presse.

Quoiqu'il en soit, pour des ONG et des experts indépendants de l'ONU "il est clair aujourd'hui plus que jamais que l'enquête nationale ne peut rendre justice". Et qu'une enquête internationale "sans délai" est nécessaire.

bur-ho-lar/elw/vk

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AUG 4

Deux ans après le drame, les Libanais attendent toujours vérité et justice #

8/4/2022, 9:22 AM
Beyrouth, LBN

Le Liban marque jeudi le deuxième anniversaire de la dévastatrice explosion au port de Beyrouth avec des manifestations de proches des victimes qui, excédés par le blocage de l'enquête, restent déterminés à poursuivre leur combat pour la justice.

Le 4 août 2020, des centaines de tonnes de nitrate d'ammonium stockées sans précaution dans un entrepôt explosent. Bilan: plus de 200 morts et 6.500 blessés et des quartiers entièrement dévastés. Sans oublier le traumatisme psychologique.

Elle a été qualifiée de l'une des plus importantes explosions non nucléaires jamais enregistrées dans le monde. Mais deux ans plus tard, on ignore encore ses causes exactes ou l'identité des responsables dans un pays où règne très souvent l'impunité.

Même si une grande partie de la population l'a imputée à une classe dirigeante, en place depuis des décennies, accusée de mauvaise gestion, de corruption et de négligence flagrante.

Il faut "une enquête impartiale, approfondie et transparente sur l'explosion", a lancé jeudi le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, faisant écho à des appels d'ONG, d'experts et des familles des victimes.

Jeudi à partir de 15H00 locales (12H00 GMT), les proches des victimes organisent trois marches distinctes en direction du port pour réclamer la relance de l'enquête locale, bloquée par les obstructions politiques.

Principal symbole qui reste de l'explosion: les dizaines de silos à grain qui ont été touchés de plein fouet par le souffle. Mais des tubes se sont effondrés cette semaine et d'autres risquent de s'écrouler après un incendie qui s'y est déclaré début juillet.

"J'espère que voir les silos tomber donnera aux gens la volonté de se battre avec nous pour la justice", a dit à l'AFP Tatiana Hasrouty, qui a perdu son père dans le drame. Les politiciens "font tout ce qui est en leur pouvoir pour arrêter l'enquête."

- "Ils nous tuent" -

Cette méga-explosion, ressentie jusqu'à l'île de Chypre en Méditerranée située à environ 200 km, est un cauchemar dans l'histoire déjà mouvementée du Liban.

Le pays est aujourd'hui embourbé dans la pire crise économique de son histoire: chute vertigineuse de la monnaie locale, pénuries de carburants, de médicaments et d'eau potable, restrictions bancaires étouffantes et un appauvrissement de la population.

Elle a encore plus affecté une population déjà éprouvée et provoqué un exode massif rappelant celui de la guerre civile (1975-1990).

"Cette classe dirigeante nous tue tous les jours", peste Mme Hasrouty. "Ceux qui ne sont pas morts dans l'explosion, meurent de faim."

Les boulangeries rationnent le pain, les coupures de courant peuvent aller jusqu'à 23 heures par jour, le prix de l'essence a flambé, les rues sont sombres la nuit et les feux de circulation hors service.

L'explosion, "c'était un cauchemar", se souvient Lara Khatchikian dans son appartement face au port qui a été très endommagé mais qu'elle a réparé.

L'incendie dans les silos l'a ravivé.

"Mes voisins et moi étions stressés en permanence. J'ai ressenti de la peur, nous ne pouvions pas dormir. Il faut une force surhumaine pour vivre quand on se souvient constamment de l'explosion", dit-elle.

- "Seul espoir" -

En avril, le gouvernement a ordonné la démolition des silos, mais celle-ci a été suspendue en raison d'objections de proches de victimes qui veulent en faire un lieu de mémoire.

L'ingénieur civil français Emmanuel Durand, qui surveille les silos, a averti que le risque d'un nouvel effondrement partiel ou total n'avait "jamais été aussi élevé".

L'enquête risque elle aussi de s'effondrer. L'enquêteur principal, Tarek Bitar, a été empêché de poursuivre sa mission par une série de poursuites intentées contre lui et par une campagne dirigée par le puissant mouvement armé du Hezbollah qui accuse le juge de partialité.

Poids lourd de la vie politique libanaise, le Hezbollah a dénoncé jeudi "les campagnes politiques et médiatiques" à l'encontre du mouvement accusé de bloquer le travail du juge.

Quoiqu'il en soit, pour des ONG et des experts indépendants de l'ONU "il est clair aujourd'hui plus que jamais que l'enquête nationale ne peut rendre justice". Et qu'une enquête internationale "sans délai" est nécessaire.

D'après Aya Majzoub, de Human Rights Watch, "une enquête internationale pourrait être le seul espoir" pour les millions de Libanais impactés par la tragédie.

bur-ho-lar/elw/tp

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AUG 4

Deux ans après le drame, les Libanais attendent toujours vérité et justice #

8/4/2022, 9:22 AM
Beyrouth, LBN

Le Liban marque jeudi le deuxième anniversaire de la dévastatrice explosion au port de Beyrouth avec des manifestations de proches des victimes qui, excédés par le blocage de l'enquête, restent déterminés à poursuivre leur combat pour la justice.

Le 4 août 2020, des centaines de tonnes de nitrate d'ammonium stockées sans précaution dans un entrepôt explosent. Bilan: plus de 200 morts et 6.500 blessés et des quartiers entièrement dévastés. Sans oublier le traumatisme psychologique.

Elle a été qualifiée de l'une des plus importantes explosions non nucléaires jamais enregistrées dans le monde. Mais deux ans plus tard, on ignore encore ses causes exactes ou l'identité des responsables dans un pays où règne très souvent l'impunité.

Même si une grande partie de la population l'a imputée à une classe dirigeante, en place depuis des décennies, accusée de mauvaise gestion, de corruption et de négligence flagrante.

Il faut "une enquête impartiale, approfondie et transparente sur l'explosion", a lancé jeudi le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, faisant écho à des appels d'ONG, d'experts et des familles des victimes.

Jeudi à partir de 15H00 locales (12H00 GMT), les proches des victimes organisent trois marches distinctes en direction du port pour réclamer la relance de l'enquête locale, bloquée par les obstructions politiques.

Principal symbole qui reste de l'explosion: les dizaines de silos à grain qui ont été touchés de plein fouet par le souffle. Mais des tubes se sont effondrés cette semaine et d'autres risquent de s'écrouler après un incendie qui s'y est déclaré début juillet.

"J'espère que voir les silos tomber donnera aux gens la volonté de se battre avec nous pour la justice", a dit à l'AFP Tatiana Hasrouty, qui a perdu son père dans le drame. Les politiciens "font tout ce qui est en leur pouvoir pour arrêter l'enquête."

- "Ils nous tuent" -

Cette méga-explosion, ressentie jusqu'à l'île de Chypre en Méditerranée située à environ 200 km, est un cauchemar dans l'histoire déjà mouvementée du Liban.

Le pays est aujourd'hui embourbé dans la pire crise économique de son histoire: chute vertigineuse de la monnaie locale, pénuries de carburants, de médicaments et d'eau potable, restrictions bancaires étouffantes et un appauvrissement de la population.

Elle a encore plus affecté une population déjà éprouvée et provoqué un exode massif rappelant celui de la guerre civile (1975-1990).

"Cette classe dirigeante nous tue tous les jours", peste Mme Hasrouty. "Ceux qui ne sont pas morts dans l'explosion, meurent de faim."

Les boulangeries rationnent le pain, les coupures de courant peuvent aller jusqu'à 23 heures par jour, le prix de l'essence a flambé, les rues sont sombres la nuit et les feux de circulation hors service.

L'explosion, "c'était un cauchemar", se souvient Lara Khatchikian dans son appartement face au port qui a été très endommagé mais qu'elle a réparé.

L'incendie dans les silos l'a ravivé.

"Mes voisins et moi étions stressés en permanence. J'ai ressenti de la peur, nous ne pouvions pas dormir. Il faut une force surhumaine pour vivre quand on se souvient constamment de l'explosion", dit-elle.

- "Seul espoir" -

En avril, le gouvernement a ordonné la démolition des silos, mais celle-ci a été suspendue en raison d'objections de proches de victimes qui veulent en faire un lieu de mémoire.

L'ingénieur civil français Emmanuel Durand, qui surveille les silos, a averti que le risque d'un nouvel effondrement partiel ou total n'avait "jamais été aussi élevé".

L'enquête risque elle aussi de s'effondrer. L'enquêteur principal, Tarek Bitar, a été empêché de poursuivre sa mission par une série de poursuites intentées contre lui et par une campagne dirigée par le puissant mouvement armé du Hezbollah qui accuse le juge de partialité.

Poids lourd de la vie politique libanaise, le Hezbollah a dénoncé jeudi "les campagnes politiques et médiatiques" à l'encontre du mouvement accusé de bloquer le travail du juge.

Quoiqu'il en soit, pour des ONG et des experts indépendants de l'ONU "il est clair aujourd'hui plus que jamais que l'enquête nationale ne peut rendre justice". Et qu'une enquête internationale "sans délai" est nécessaire.

D'après Aya Majzoub, de Human Rights Watch, "une enquête internationale pourrait être le seul espoir" pour les millions de Libanais impactés par la tragédie.

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Deux ans après l'explosion au port de Beyrouth, le Liban au bord du gouffre #

Le Liban marque jeudi le deuxième anniversaire de la gigantesque explosion au port de Beyrouth qui a dévasté des quartiers entiers de la capitale, avec des manifestations de proches de victimes déterminés à poursuivre leur combat pour la vérité et la justice.

La déflagration le 4 août 2020 dans un entrepôt abritant des centaines de tonnes de nitrate d'ammonium stockées sans précaution -- l'une des plus importantes explosions non nucléaires jamais enregistrées -- a fait plus de 200 morts et 6.500 blessés.

Pourtant, l'enquête ouverte au Liban a été entravée par des ingérences politiques et aucun représentant de l'Etat n'a jusqu'ici été tenu pour responsable de la tragédie qui a connu un nouveau développement la semaine dernière. Plusieurs silos à grain très endommagés dans l'enceinte du port se sont effondrés, et d'autres menacent de s'écrouler, selon des experts.

"J'espère que voir les silos tomber donnera aux gens la volonté de se battre pour la justice, de se battre avec nous", a déclaré à l'AFP Tatiana Hasrouty, une habitante qui a perdu son père dans l'explosion. Les politiciens "font tout ce qui est en leur pouvoir pour arrêter l'enquête", a-t-elle déploré.

Cette méga-explosion est un cauchemar dans l'histoire déjà mouvementée du Liban, aujourd'hui embourbé dans la pire crise économique de son histoire, confronté à d'incessantes coupures de courant, une inflation galopante et un désespoir généralisé.

Trois marches de protestation distinctes sont prévues jeudi en direction du port où de la fumée s'échappe encore des silos après un incendie provoqué par la fermentation des stocks de grains, dans la chaleur torride de l'été.

- "Stressés en permanence" -

L'énorme explosion il y a deux ans a été ressentie jusqu'à Chypre, île méditerranéenne située à environ 200 km. Elle a encore plus affecté une population déjà éprouvée par la crise et provoqué un exode massif du Liban rappelant celui de la guerre civile de 1975-1990.

Mais la classe dirigeante libanaise, accusée de mauvaise gestion, de corruption et de négligence flagrante, continue de s'accrocher au pouvoir alors que la population souffre de pénuries de carburant, de médicaments et d'eau potable.

"Cette classe dirigeante nous tue tous les jours", estime Mme Hasrouty. "Ceux qui ne sont pas morts dans l'explosion, meurent de faim", dit-elle.

Les boulangeries rationnent le pain, les coupures de courant peuvent aller jusqu'à 23 heures par jour, les rues sont sombres la nuit et les feux de circulation hors service.

L'explosion, "c'était un cauchemar", se souvient Lara Khatchikian, depuis son appartement très endommagé qu'elle a depuis réparé, d'où elle voit le port. L'incendie dans les silos l'a ravivé.

"Mes voisins et moi étions stressés en permanence. J'ai ressenti de la peur, nous ne pouvions pas dormir. Il faut une force surhumaine pour vivre quand on se souvient constamment de l'explosion", dit-elle.

En avril, le gouvernement a ordonné la démolition des silos, mais celle-ci a été suspendue, notamment en raison d'objections de proches de victimes qui veulent qu'ils soient conservés pour en faire un lieu de mémoire.

L'ingénieur civil français Emmanuel Durand, qui surveille les silos, a averti que le risque d'un nouvel effondrement partiel ou total n'avait "jamais été aussi élevé".

L'enquête risque elle aussi de s'effondrer, l'enquêteur principal, Tarek Bitar, ayant été empêché de poursuivre sa mission par une série de poursuites intentées contre lui et une campagne dirigée notamment par le puissant mouvement armé du Hezbollah, poids lourd de la vie politique locale.

Mercredi, des experts indépendants des Nations unies et des ONG ont appelé à l'ouverture d'une enquête internationale "sans délai", soulignant qu'il était "clair aujourd'hui plus que jamais que l'enquête nationale ne pouvait rendre justice".

bur-ho/elw/jos/bfi/am

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Deux ans après l'explosion au port de Beyrouth, le Liban au bord du gouffre #

Le Liban marque jeudi le deuxième anniversaire de la gigantesque explosion au port de Beyrouth qui a dévasté des quartiers entiers de la capitale, avec des manifestations de proches de victimes déterminés à poursuivre leur combat pour la vérité et la justice.

La déflagration le 4 août 2020 dans un entrepôt abritant des centaines de tonnes de nitrate d'ammonium stockées sans précaution -- l'une des plus importantes explosions non nucléaires jamais enregistrées -- a fait plus de 200 morts et 6.500 blessés.

Pourtant, l'enquête ouverte au Liban a été entravée par des ingérences politiques et aucun représentant de l'Etat n'a jusqu'ici été tenu pour responsable de la tragédie qui a connu un nouveau développement la semaine dernière. Plusieurs silos à grain très endommagés dans l'enceinte du port se sont effondrés, et d'autres menacent de s'écrouler, selon des experts.

"J'espère que voir les silos tomber donnera aux gens la volonté de se battre pour la justice, de se battre avec nous", a déclaré à l'AFP Tatiana Hasrouty, une habitante qui a perdu son père dans l'explosion. Les politiciens "font tout ce qui est en leur pouvoir pour arrêter l'enquête", a-t-elle déploré.

Cette méga-explosion est un cauchemar dans l'histoire déjà mouvementée du Liban, aujourd'hui embourbé dans la pire crise économique de son histoire, confronté à d'incessantes coupures de courant, une inflation galopante et un désespoir généralisé.

Trois marches de protestation distinctes sont prévues jeudi en direction du port où de la fumée s'échappe encore des silos après un incendie provoqué par la fermentation des stocks de grains, dans la chaleur torride de l'été.

- "Stressés en permanence" -

L'énorme explosion il y a deux ans a été ressentie jusqu'à Chypre, île méditerranéenne située à environ 200 km. Elle a encore plus affecté une population déjà éprouvée par la crise et provoqué un exode massif du Liban rappelant celui de la guerre civile de 1975-1990.

Mais la classe dirigeante libanaise, accusée de mauvaise gestion, de corruption et de négligence flagrante, continue de s'accrocher au pouvoir alors que la population souffre de pénuries de carburant, de médicaments et d'eau potable.

"Cette classe dirigeante nous tue tous les jours", estime Mme Hasrouty. "Ceux qui ne sont pas morts dans l'explosion, meurent de faim", dit-elle.

Les boulangeries rationnent le pain, les coupures de courant peuvent aller jusqu'à 23 heures par jour, les rues sont sombres la nuit et les feux de circulation hors service.

L'explosion, "c'était un cauchemar", se souvient Lara Khatchikian, depuis son appartement très endommagé qu'elle a depuis réparé, d'où elle voit le port. L'incendie dans les silos l'a ravivé.

"Mes voisins et moi étions stressés en permanence. J'ai ressenti de la peur, nous ne pouvions pas dormir. Il faut une force surhumaine pour vivre quand on se souvient constamment de l'explosion", dit-elle.

En avril, le gouvernement a ordonné la démolition des silos, mais celle-ci a été suspendue, notamment en raison d'objections de proches de victimes qui veulent qu'ils soient conservés pour en faire un lieu de mémoire.

L'ingénieur civil français Emmanuel Durand, qui surveille les silos, a averti que le risque d'un nouvel effondrement partiel ou total n'avait "jamais été aussi élevé".

L'enquête risque elle aussi de s'effondrer, l'enquêteur principal, Tarek Bitar, ayant été empêché de poursuivre sa mission par une série de poursuites intentées contre lui et une campagne dirigée notamment par le puissant mouvement armé du Hezbollah, poids lourd de la vie politique locale.

Mercredi, des experts indépendants des Nations unies et des ONG ont appelé à l'ouverture d'une enquête internationale "sans délai", soulignant qu'il était "clair aujourd'hui plus que jamais que l'enquête nationale ne pouvait rendre justice".

bur-ho/elw/jos/bfi/am

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AUG 4

Liban: les développements depuis l'explosion au port de Beyrouth #

Rappel des principaux développements au Liban depuis l'explosion au port de Beyrouth qui a fait plus de 200 morts il y a deux ans.

- Dévastation -

Le 4 août 2020, une explosion détruit le port de Beyrouth et dévaste des quartiers entiers de la capitale, faisant plus de 200 morts et plus de 6.500 blessés.

L'énorme déflagration a été déclenchée par un incendie dans un entrepôt qui abritait des tonnes de nitrate d'ammonium stockées, "sans mesures de précaution" selon les autorités.

Elle frappe un pays plongé dans une profonde crise économique.

- Aide internationale -

Le 6, le président français Emmanuel Macron, se rend à Beyrouth et réclame une enquête internationale, rejetée par le président Michel Aoun.

Le 9, quelque 280 millions d'euros d'aide sont collectés lors d'une visioconférence organisée par Paris et l'ONU. La communauté internationale exige que l'aide soit "directement" distribuée à la population ainsi qu'une enquête "transparente".

Sous pression de la rue, le gouvernement de Hassan Diab démissionne le 10 août.

Le 31, Moustapha Adib devient Premier ministre.

Le 1er septembre, M. Macron, de nouveau à Beyrouth, annonce avoir obtenu l'engagement des dirigeants libanais à favoriser la formation dans les 15 jours d'un gouvernement chargé de lancer des réformes et ainsi débloquer l'aide internationale.

Mais le 26, Moustapha Adib jette l'éponge, sur fond d'insistance des partis chiites Hezbollah et Amal, à obtenir le portefeuille des Finances.

Emmanuel Macron fustige la "trahison" de la classe politique libanaise.

Le 22 octobre, Saad Hariri, déjà trois fois Premier ministre, est désigné à ce poste.

- Enquête entravée -

Le 10 décembre, le juge Fadi Sawan chargé de l'enquête sur l'explosion inculpe Hassan Diab et trois anciens ministres.

Une semaine plus tard, l'enquête est suspendue, deux ministres accusés ayant réclamé la récusation du magistrat, laquelle a lieu en février 2021. Le juge Tareq Bitar est nommé pour enquêter.

Début juillet 2021, le juge Bitar annonce vouloir interroger Hassan Diab et demande au Parlement de lever l'immunité de trois députés ayant occupé des postes ministériels. Le Parlement réclame des "preuves" supplémentaires, ce que le juge refuse.

Le 15, Saad Hariri jette l'éponge après son échec à former un gouvernement.

Le 4 août, Emmanuel Macron parraine une troisième conférence internationale. Les donateurs promettent 370 millions de dollars.

Le 26, le juge Bitar émet un mandat d'amener à l'encontre de Hassan Diab.

Le 10 septembre, formation d'un nouveau gouvernement dirigé par Najib Mikati après treize mois d'attente.

- Affrontements sanglants -

Le 11 octobre, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, accuse le juge de politiser l'enquête, exigeant son remplacement.

Le lendemain, Tareq Bitar émet un mandat d'arrêt contre le député et ex-ministre des Finances Ali Hassan Khalil, membre du mouvement Amal. Il est contraint de suspendre son enquête après de nouvelles plaintes.

Le 14, la Cour de cassation rejette des plaintes déposées par deux anciens ministres contre le juge.

Des combats de rue opposent des hommes armés à Beyrouth après des tirs lors d'une manifestation organisée par le Hezbollah et Amal exigeant le remplacement du juge Bitar, faisant sept morts.

- Enquête suspendue -

Le 10 décembre, Tareq Bitar qui a repris son enquête, demande l'arrestation d'Ali Hassan Khalil.

Le 23, il est contraint pour la quatrième fois de suspendre ses investigations après un énième recours d'anciens ministres.

Le 7 avril 2022, accord de principe entre le FMI et Beyrouth pour un plan d'aide de trois milliards de dollars.

Le 21, Madrid annonce l'arrestation et le placement en liberté provisoire d'un Portugais recherché par Interpol en lien avec l'explosion dans le port de Beyrouth.

- Parlement sans majorité -

Les législatives du 15 mai débouchent sur un Parlement sans majorité, perdue par le Hezbollah et ses alliés.

Le 20, le gouvernement approuve un plan de redressement économique.

Le 23 juin, le Premier ministre sortant Najib Mikati est désigné pour former un nouveau gouvernement.

En juillet, des proches de victimes de l'explosion dans le port de Beyrouth engagent aux Etats-Unis une poursuite de 250 millions de dollars contre la compagnie américano-norvégienne de services géophysiques TGS pour ses liens présumés avec la tragédie. TGS "nie toutes les allégations".

- Des silos s'effondrent -

Le 31 juillet, des silos à grains endommagés au port de Beyrouth s'effondrent après un incendie qui a ravivé le traumatisme des proches des victimes.

acm-ang/ber/feb/am

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AUG 3

Deux ans après le drame de Beyrouth, des parents endeuillés entre ire et désespoir #

Deux ans après avoir perdu leur petite Alexandra âgée de trois ans dans l'explosion massive au port de Beyrouth, Paul et Tracy Naggear vivent dans le chagrin et leur colère est de plus en plus grande face à la paralysie de l'enquête.

"On peut apprendre à vivre dans la tristesse, mais il y a une angoisse et une colère qui ne cessent de grandir" en l'absence de justice, confie à l'AFP Tracy, la mère d'Alexandra, à l'approche de l'anniversaire du drame jeudi.

Le 4 août 2020, la vie du couple qui habitait une maison en face du port de Beyrouth, et celles des habitants de la capitale libanaise, a été bouleversée lorsqu'une gigantesque explosion a fait plus de 200 morts et 6.500 blessés et détruit des milliers de bâtiments.

Depuis, Paul et Tracy Naggear se sont embarqués dans une longue et difficile quête de justice dans un pays dirigé par une classe politique inchangée depuis des décennies et accusée de corruption, d'inertie et d'incompétence.

Comme des centaines de proches de victimes, ils n'ont reçu aucune réponse de leurs dirigeants quant à la présence des tonnes de nitrate d'ammonium stockées sans précaution à l'origine de l'explosion.

Et avec les enquêtes au point mort depuis fin 2021, en raison d'obstructions politiques, pas un seul fonctionnaire n'a été jugé.

L'enquêteur principal, Tarek Bitar, qui poursuivait certains hauts responsables, a été empêché de poursuivre sa mission par une série de poursuites intentées contre lui. Le puissant mouvement armé du Hezbollah, poids lourd de la politique libanaise, l'a accusé de partialité et a appelé à son remplacement.

- "Fatigués" -

"Au début, on avait de l'espoir parce que les gens étaient à nos côtés et manifestaient avec nous (...) mais aujourd'hui, on se sent seuls", dit Tracy, 36 ans, qui a déménagé avec son mari à la montagne de Beit Mery, à l'est de Beyrouth.

"Ce drame est la cause d'un pays, pas la cause" des familles des victimes uniquement, ajoute-t-elle.

"C'est fatiguant de vivre dans un pays où la justice n'existe pas (...)", renchérit M. Naggear.

"Le criminel ne se juge pas lui-même", continue le père endeuillé, en référence à la classe politique que de nombreux Libanais accusent de "complicité" et de négligence dans l'explosion.

Le drame avait à l'époque redonné un nouveau souffle au soulèvement populaire qui s'était déclenché en octobre 2019 contre la classe politique, largement accusée d'être responsable de la crise économique sans précédent au Liban.

Pendant plusieurs jours, des affrontements ont opposé des manifestants aux forces de sécurité, mais la contestation s'est graduellement essoufflée face à l'aggravation de la situation économique et la pandémie de coronavirus.

Aujourd'hui, Paul Naggear estime que la justice ne peut être rendue que par le biais d'une enquête internationale.

En juin 2021, plus d'une cinquantaine d'organisations libanaises et internationales, aux côtés des familles des victimes, ont appelé le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU à "mettre en place une mission d'enquête internationale, indépendante et impartiale". En vain.

- Jusqu'à la mort -

Sous l'impulsion de son chef de l'époque, le député et avocat libanais Melhem Khalaf, l'Ordre des avocats de Beyrouth avait porté plainte contre l'Etat libanais au nom d'un collectif de 1.200 victimes de l'explosion. Mais les investigations sont là aussi suspendues.

Plusieurs facteurs internes et externes ont entravé l'enquête, notamment "la politisation du dossier", explique M. Khalaf.

Plusieurs pays, dont les Etats-Unis et la France, n'ont pas répondu aux demandes du Liban de lui fournir des images satellites du moment de l'explosion, et la justice libanaise n'a toujours pas reçu les rapports finaux des experts étrangers qui ont participé aux enquêtes préliminaires.

Cela reflète "une volonté d'obstruction", estime M. Khalaf.

Avec l'espoir d'un jour obtenir justice, Tracy et Paul Naggear veulent que leur fils Axel, né en mars, soit impliqué dans leur quête.

"On se battra pour la justice et la vérité jusqu'à la mort", martèle Tracy. "Et si on meurt sans y parvenir, je voudrais qu'Axel reprenne le flambeau."

lar/elw/jos/awa/alc

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