Au coeur du procès de Nicolas Sarkozy dans l'affaire Bygmalion, le financement des campagnes électorales fait l'objet de règles très strictes en France, dont un plafond de dépenses qu'il est reproché à l'ancien président d'avoir largement dépassé lors de sa tentative ratée de réélection en 2012.
Contrôle et transparenceLe financement des activités politiques a longtemps relevé du non-dit, de la débrouille et des arrangements avec la loi, jusqu'à ce qu'une série de scandales retentissants - dont l'affaire Urba à la fin des années 1980 - contraignent les gouvernements à y mettre un peu d'ordre.
Première d'une longue série, la loi du 11 mars 1988 pose le principe du financement public des partis représentés au Parlement, ainsi que des scrutins présidentiel et législatifs (Assemblée nationale et Sénat). Elle met aussi en place un plafonnement des dépenses de campagne et impose à tous les candidats des déclarations de patrimoine.
Celle du 15 janvier 1990 étend le financement public à toutes les élections et tous les partis et les autorise à bénéficier de fonds privés - particuliers ou entreprises - mais limités. Elle instaure aussi une Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.
Depuis ces deux textes fondateurs, les modalités des dons et leur contrôle ont été amendés à plusieurs reprises. Toujours sous la pression des affaires, des lois de 2013 et 2016 ont également imposé la publicité des déclarations de patrimoine des ministres, élus et candidats.
Cet arsenal de plus en plus complet n'est toutefois pas parvenu à éviter les scandales, comme l'affaire Bygmalion ou les soupçons de financement de l'ex-Front national devenu Rassemblement national par des banques russes, ni supprimé les difficultés de financement de nombreux partis.
En arrivant en 2017 au ministère de la Justice, François Bayrou a proposé de nouvelles règles et la création d'une "banque de la démocratie". Son projet n'a pas survécu à son départ précipité de la Chancellerie quelques semaines plus tard... à cause de soupçons d'emplois fictifs visant son parti le MoDem.
Les règles de la présidentielleLe plafond des dépenses autorisées est de 22,509 millions d'euros pour chacun des deux candidats en lice au second tour et de 16,851 millions pour chacun des autres prétendants.
Les dons et aides matérielles des personnes morales, notamment des entreprises, sont strictement interdits. Ceux des particuliers sont autorisés mais dans une stricte limite: un citoyen peut donner 4.600 euros maximum, quel que soit le nombre de candidats qu'il soutient.
En plus de ces dons, le candidat peut recourir à des fonds personnels, des aides de partis ou à des emprunts bancaires.
Les dépenses sont remboursées par l'Etat à hauteur de 47,5% du plafond pour les candidats ayant obtenu plus de 5% des voix, et de 4,75% pour les autres.
Chacun d'entre eux reçoit une avance forfaitaire à partir du moment où il a réuni les 500 parrainages requis. Tout juste adopté au Parlement, un toilettage de la loi fait passer cette avance à 200.000 euros pour 2022, contre 153.000 auparavant. Les comptes de la campagne présidentielle à venir seront aussi publiés en "open data" (libre accès en ligne), comme c'est la règle pour les autres élections.
L'Etat prend en outre en charge les frais de la campagne officielle à la télévision et à la radio, les frais d'impression et de distribution des professions de foi, les frais d'impression et d'apposition des affiches sur les panneaux officiels.
Chaque candidat doit nommer un mandataire financier, personne physique ou association, qui est "l'intermédiaire obligatoire entre le candidat" et ceux qui le financent.
Le compte de campagne recense toutes les recettes et les dépenses, présentées ensuite à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CCNCFP), composée de neuf hauts magistrats nommés pour cinq ans renouvelables par décret du Premier ministre.
Cette commission approuve ou rejette les comptes, avec des conséquences financières lourdes: un rejet prive le candidat du remboursement public. S'il est prononcé pour dépassement du plafond, il entraîne une amende équivalente à ce dépassement.
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