Compétition durcie entre Etats, enhardissement de puissances régionales comme la Turquie, cyberattaques et désinformation croissantes: la pandémie a exacerbé les comportements agressifs sur la scène internationale, selon Paris, qui compte encore muscler son effort de défense sous peine de "déclassement stratégique".
"La pandémie a confirmé, conforté voire accéléré certaines tendances que nous avions identifiées en 2017", a déclaré jeudi la ministre des Armées Florence Parly en présentant l'actualisation de la Revue stragégique française, quatre ans après la publication de cette analyse des menaces.
Mardi, le président Emmanuel Macron avait déjà mis en garde contre cette aggravation des tensions internationales, sur fond de désengagement américain sous l'ère Trump.
"Le nouveau jeu des puissances (...) s'est non seulement confirmé, mais encore durci", affirmait-il. "En Indo-Pacifique, au Proche et Moyen-Orient, en Afrique, sur terre, en mer, dans le ciel, comme dans les nouveaux espaces de conflictualité, la crise sanitaire, sociale et économique a favorisé les réflexes de replis et les peurs obsidionales, attisé les braises des nationalismes, aiguisé des ambitions et accentué l'opposition des volontés".
Depuis 2017, trois grandes menaces perdurent, a rappelé Mme Parly: le terrorisme, alors que "Daech est toujours au Levant", la prolifération nucléaire alimentée par les programmes nord-coréen et iranien, et le "durcissement de la compétition entre puissances", avec la "posture d'intimidation stratégique de la Russie ou la forte montée en puissance militaire de la Chine" dont le budget de défense a doublé depuis 2012.
Mais la nouveauté réside dans le recours accrû à "des pratiques désinhibées qui peuvent affecter le fonctionnement de notre démocratie (...) dans de nouveaux champs: le cyber, l'espace, la désinformation", a averti la ministre, en constatant que "la pandémie a débridé les imaginations: cyberattaques contre des hôpitaux, désinformation massive".
Ces comportements déstabilisateurs, au mépris du droit, ont "visiblement inspiré d'autres Etats aux prétentions plus régionales", a-t-elle déploré. En ligne de mire, la Turquie, qui, aux porte de l'Europe, "a multiplié les actions inamicales et dangereuses en Libye, en Mediterranée orientale ou dans le Caucase".
Pour contrer ces menaces, la France "a plus que jamais besoin d'alliés et de partenaires solides" européens et américains, a souligné Mme Parly, en espérant que "l'administration Biden fasse soufler un vent nouveau et nous aide à redynamiser l'Alliance atlantique".
La France, elle, compte encore muscler ses efforts pour rester à la page. "Les ambitions de la LPM (loi de programmation militaire 2019-2025, ndr) conservent toute leur pertinence", mais "nous allons renforcer les priorités" données au renseignement, comme aux capacités défensives et offensives dans les champs du cyber et du numérique, et "renforcer la préparation opérationnelle de nos armées" pour qu'elles soient prêtes à faire face à l'ensemble des menaces, "y compris dans la haute intensité", en cas d'affrontements entre Etats, a-t-elle détaillé.
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