L'usage de la grenade qui a tué Rémi Fraisse à Sivens (Tarn) en 2014 était-il nécessaire et proportionné? Saisie par la famille du militant écologiste, la Cour de cassation dira le 23 mars si elle confirme le non-lieu rendu en faveur du gendarme auteur du tir.
Rémi Fraisse, botaniste de 21 ans, avait succombé à l'explosion d'une grenade tirée par un gendarme lors de violents affrontements sur le chantier de la retenue d'eau controversée de Sivens, le 26 octobre 2014.
Le militaire qui avait lancé la grenade responsable du décès, qui n'avait pas été mis en examen, avait bénéficié en janvier 2018 d'un non-lieu, confirmé par la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Toulouse en janvier 2020.
C'est contre cette décision que la famille du jeune militant a formé un pourvoi devant la plus haute juridiction de l'ordre judiciaire.
Pour les proches de Rémi Fraisse, qui veulent "un procès public" dans cette affaire "emblématique" de l'usage des armes dans le cadre du maintien de l'ordre, la cour d'appel de Toulouse a prononcé un non-lieu sans que "tous les éléments du dossier aient bien été vérifiés", a déclaré à l'audience leur avocat Patrice Spinosi.
Il estime notamment que le recours à une grenade offensive OF-F1, de type explosive et dont l'utilisation a été suspendue puis interdite après le décès de Rémi Fraisse, était une "réponse inadaptée" car elle avait été choisie "faute de mieux", le gendarme n'étant alors pas doté d'autres types de grenades.
"Dans une obscurité totale", le gendarme avait d'autre part tiré "en cloche" et non au sol, et la grenade s'était coincée entre la veste et le sac à dos du jeune militant, avant d'exploser, a appuyé Me Spinosi, pour qui l'usage de cette arme n'était ni "absolument nécessaire, ni strictement proportionné".
"Il n'y a rien à reprocher aux gendarmes. Leur attitude a été exemplaire", a rétorqué Emmanuel Piwnica, l'avocat du gendarme. "La chambre de l'instruction l'a constaté. Les gendarmes devaient se défendre. (...) Ils n'ont fait que respecter la loi", a-t-il insisté.
Si le "dossier s'inscrit dans un débat d'intérêt général toujours d'actualité", les "faits ont déjà été soupesés par des juges d'instruction et en appel par la chambre de l'instruction" et leur décision était "motivée", a également souligné l'avocat général, qui a proposé le rejet du pourvoi.
Si la Cour de cassation suivait cet avis, la famille a d'ores et déjà prévenu qu'elle saisirait la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH).
asl/pga/mpm