Un collaborateur d'Emmanuel Macron filmé en train de frapper des manifestants : deux ans et demi après le scandale, le parquet de Paris demande un procès en correctionnelle pour Alexandre Benalla dans l'emblématique affaire des violences du 1er mai 2018 dans la capitale.
Le 18 juillet 2018, le quotidien Le Monde identifie le collaborateur du chef de l'Etat dans une vidéo tournée et diffusée le 1er mai par Taha Bouhafs, militant de La France insoumise devenu depuis journaliste.
Dans ce document, Alexandre Benalla, coiffé d'un casque à visière des forces de l'ordre, s'en prend à un jeune homme à terre, sur la place de la Contrescarpe à Paris.
En quelques heures, l'affaire se transforme en scandale politique et crée une crise sans précédent pendant la mandature d'Emmanuel Macron.
Le parquet de Paris ouvre une enquête préliminaire le 19 juillet sur les faits de "violences".
Rapidement élargie à des faits de détournements d'images de vidéo-surveillance dont sont soupçonnés de hauts responsables policiers, cette affaire très sensible est confiée trois jours plus tard à des juges d'instruction.
Dans son réquisitoire définitif du 2 février, le parquet de Paris demande un procès en correctionnelle pour quatre des cinq mis en cause dans l'enquête, dont M. Benalla, âgé aujourd'hui de 29 ans.
L'ex-chargé de mission, depuis reconverti dans le privé, est accusé notamment de "violences volontaires", d'"immixtion sans titre dans l'exercice d'une fonction publique" ou encore de "port d'arme" non-autorisé.
Contactée, son avocate, Me Jacqueline Laffont, n'a pas répondu à l'AFP.
Le parquet demande également un procès pour ces mêmes infractions pour son acolyte Vincent Crase, ex-salarié de la République en marche.
- Une semaine en prison -Les deux sont accusés d'avoir molesté des manifestants en marge du défilé du 1er Mai, non seulement place de la Contrescarpe à Paris mais aussi, depuis d'autres révélations d'août 2018, au Jardin des plantes.
MM. Benalla et Crase contestent les violences, estimant avoir aidé les forces de l'ordre à interpeller des manifestants qui leur jetaient des projectiles.
Un troisième volet dans cette enquête concerne le selfie que M. Benalla a pris, en exhibant une arme, durant la campagne présidentielle de 2017.
En février 2019, MM. Benalla et Crase ont passé une semaine en détention provisoire dans ce dossier, après que Mediapart avait dévoilé des enregistrements clandestins d'une conversation entre eux - datée du 26 juillet 2018, quatre jours après leur mise en examen - prouvant qu'ils avaient enfreint leur contrôle judiciaire et l'interdiction de se parler.
Deux anciens hauts gradés de la Préfecture de police de Paris, impliqués dans la remise des images des incidents de la place de la Contrescarpe à M. Benalla, font également l'objet de réquisitions de renvoi, notamment pour "violation du secret professionnel".
Il s'agit de Laurent Simonin, alors chef d'état-major adjoint de la puissante Direction de l'ordre public et de la circulation (DOPC) de la Préfecture de police, et de Maxence Creusat, commissaire de police de cette même DOPC.
Le parquet de Paris demande en revanche un non-lieu pour un troisième fonctionnaire de police.
Cinq manifestants se sont portés parties civiles dans ce dossier, dont un couple interpellé place de la Contrescarpe par MM. Benalla et Crase.
La décision finale sur un procès revient désormais aux juges d'instruction chargés de ces investigations.
- Autres enquêtes -L'affaire Benalla, lancée par ce dossier de violences emblématique, vaut à l'ex-chargé de mission quatre autres procédures.
Il devra déjà affronter un procès en correctionnelle pour l'utilisation frauduleuse de passeports diplomatiques et de service.
Il est également visé par une enquête du parquet national financier sur des soupçons de "corruption" après un contrat passé entre l'entreprise de Vincent Crase, Mars, et un oligarque russe.
Un juge d'instruction enquête également depuis novembre 2019 pour savoir si M. Benalla a dissimulé des preuves, notamment des coffres-forts ou leur contenu, dans le cadre de l'enquête initiale sur les violences du 1er Mai.
Enfin, le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire pour des soupçons de "faux témoignage devant le Sénat".
Une procédure pour "manquement aux obligations déclaratives à la HATVP (Haute autorité pour la transparence de la vie publique)" a elle été classée sans suite en février 2020.
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