La cour d'appel de Paris a confirmé jeudi le non-lieu pour cause de légitime défense dont a bénéficié un policier qui était poursuivi pour la mort en 2018 d'un jeune homme noir, Gaye Camara, à Epinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis), a-t-on appris de source judiciaire.
La chambre de l'instruction de la cour d'appel a aussi refusé les nouvelles demandes d'actes de la famille de la victime, a précisé la même source à l'AFP.
"Je m'y attendais, ce n'est pas une surprise. La justice protège ce policier, elle ne veut pas donner les éléments qui permettent de dire la vérité. Tous les actes que notre avocat a demandés, la justice ne veut pas les donner", a réagi auprès de l'AFP Mahamadou Camara, le frère de Gaye.
"On va aller en cassation, jusqu'à la Cour européenne (des droits de l'Homme) s'il le faut", a-t-il ajouté.
Sollicités par l'AFP, l'avocat de la famille et l'avocate du policier n'ont pas souhaité s'exprimer.
Originaire de Seine-et-Marne, Gaye Camara, 26 ans, avait été tué d'une balle dans la tête au cours d'une opération de police, alors qu'il se trouvait au volant de sa voiture, dans la nuit du 16 janvier 2018 à Epinay-sur-Seine.
En août 2019, un juge d'instruction avait rendu un non-lieu au bénéfice du policier auteur du tir fatal, estimant qu'il avait agi en état de légitime défense.
La famille de Gaye Camara avait fait appel de cette décision. Elle réclame une "vraie enquête" sur les circonstances de la mort de la victime, notamment à travers une reconstitution des faits.
Dans une enquête publiée lundi, le média d'investigation Disclose, en partenariat avec l'agence d'expertise Index, a estimé qu'il existait "un doute sérieux sur la réalité de l'état de légitime défense du policier mis en cause".
Disclose a expliqué s'être appuyé sur des preuves recueillies pendant l'enquête judiciaire et des éléments de l'audition du policier devant l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) pour modéliser la scène de l'incident. Ce travail montre qu'au moment du tir, "le policier n'est pas face à la voiture de Gaye Camara", qui "n'est donc pas en train de lui foncer dessus", a conclu le média.
A la lumière de ces éléments, la famille de la victime a déposé une "plainte" cette semaine contre l'expert balistique qui "a menti sur la trajectoire de la balle qui a touché Gaye", a déclaré Mahamadou Camara.
"La justice a menti pour protéger les policiers. C'est inadmissible ce qui est arrivé, le combat continue", a affirmé à ses côtés Assa Traoré, militante antiraciste et soeur d'Adama, un jeune homme noir mort en 2016 à Beaumont-sur-Oise (Val-d'Oise) après son arrestation.
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