Délit réprimant la haine en ligne, contrôle renforcé des associations, meilleure transparence des cultes... Voici les principaux points du projet de loi "confortant le respect des principes de la République", soumis à partir de lundi en commission spéciale aux députés.
- Neutralité du service public -- Le texte inscrit le principe de neutralité (religieuse) des agents de droit privé chargés d'une mission de service public (entreprises de transport, Aéroports de Paris,...). Jusqu'ici seule la jurisprudence faisait référence en la matière. Via des amendements, les débats devraient porter sur l'extension de ce principe aux bénévoles et collaborateurs occasionnels du service public. Dans le viseur de certains députés, les mères voilées accompagnatrices de sorties scolaires. Le gouvernement et l'état-major du groupe LREM sont opposés à cette interdiction du voile.
- Est créée une procédure de "carence républicaine", permettant au préfet de suspendre les décisions ou les actions de toute collectivité qui méconnaîtrait gravement la neutralité du service public, sous contrôle du juge administratif.
- Le champ d'application du fichier des auteurs d'infractions terroristes (FJIAIT) est modifié pour y intégrer "les délits relatifs à la provocation et à l'apologie d'actes terroristes". Leurs auteurs seront interdits "d'exercer des fonctions au contact du public".
- Meilleur encadrement des associations -- "Toute demande de subvention fait désormais l'objet d'un engagement de l'association à respecter les principes et valeurs de la République. La violation de ce contrat d'engagement républicain a pour conséquence la restitution de la subvention". Dans la rédaction actuelle, certains termes font tiquer, comme l'impératif fixé de "sauvegarde de l'ordre public".
- Les motifs de dissolution d'une association en Conseil des ministres sont élargis. Il sera aussi possible "d'imputer à une association (...) des agissements commis par ses membres et directement liés aux activités de cette association".
- Réorganiser les cultes -Il s'agit de "garantir la transparence des conditions de l'exercice du culte".
Alors que les lieux de culte musulmans sont, pour des raisons historiques, en majorité sous le régime des associations prévu par la loi de 1901, le projet de loi les incite à s'inscrire sous le régime de 1905, plus transparent sur le plan comptable et financier.
En contrepartie, elles pourront avoir accès à des déductions fiscales ou encore tirer des revenus d'immeubles acquis à titre gratuit. De gauche comme de droite, les opposants à cette mesure y voient une violation de la loi de 1905.
Les dons étrangers dépassant 10.000 euros seront soumis à un régime déclaratif de ressources. En outre, "la certification des comptes annuels par un commissaire aux comptes est prévue dès lors que l'association bénéficie d'avantages ou de ressources provenant de l'étranger".
Une disposition "anti-putsch" est prévue pour éviter toute prise de contrôle d'une mosquée par des extrémistes.
Un autre article prévoit qu'une "interdiction de paraître dans les lieux de cultes peut être prononcée par le juge (...) en cas de condamnation pour provocation à des actes de terrorisme ou provocation à la discrimination, la haine ou la violence".
Autre disposition: le droit d'opposition du service de renseignement financier Tracfin va être élargi, pour contrer les "flux indésirables", selon le ministre Gérald Darmanin.
- Combattre la haine en ligne -Est créé un "nouveau délit de mise en danger de la vie d'autrui par diffusion d'informations relatives à la vie privée, familiale ou professionnelle d'une personne permettant de l'identifier ou de la localiser". Cette disposition a été ajoutée après la décapitation du professeur Samuel Paty en octobre.
- Education -Le projet de loi, qui a été réécrit après son passage au Conseil d'Etat, durcit les règles sur la scolarisation à domicile, en passant d'un régime de déclaration à un régime d'autorisation de la part des académies. Des dérogations sont prévues pour raison de santé, de handicap, de pratique artistique ou sportive et enfin "pour des situations particulières, sous réserve que les personnes en charge de l'enfant puissent justifier de leur capacité à assurer l'instruction dans le respect des intérêts de l'enfant".
Il renforce l'encadrement des écoles hors contrat, notamment en introduisant "un régime de fermeture administrative" en cas de "dérives".
Le texte pourrait être amendé pour favoriser l'enseignement et la formation au fait religieux et à la laïcité, tant pour les élèves que pour les enseignants.
Les fédérations sportives reconnues par l'Etat passent d'un "régime de tutelle" à un "régime de contrôle". Pour les fédérations agréées, le "respect des principes et valeurs de la République" sera inscrit dans l'agrément.
- Dignité et égalité de tous -Un article entend "interdire à l'ensemble des professionnels de santé l'établissement de certificats attestant de la virginité d'une personne".
Le texte renforce son arsenal sur la polygamie - interdite en France - en généralisant l'interdiction de délivrer un quelconque titre de séjour aux étrangers vivant en France en état de polygamie.
Pour lutter contre les mariages forcés, l'officier d'état civil a pour obligation de "s'entretenir séparément avec les futurs époux lorsqu'il existe un doute sur le caractère libre du consentement", et de "saisir le procureur de la République aux fins d'éventuelle opposition à mariage s'il conserve ses doutes".
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