Qui est vraiment Brigitte Gruel? Une sage responsable municipale ou une maîtresse de Georges Tron impliquée dans des scènes de triolisme forcé ? Jugée en appel au côté du maire de Draveil, son ex-adjointe a de nouveau démenti jeudi toute complicité de viols ou d'agressions sexuelles.
En l'appelant à la barre, la cour d'assises de Paris s'est confrontée aux deux visages contradictoires, inconciliables, de cette femme de 63 ans, dans le dossier qui avait forcé Georges Tron à démissionner du gouvernement Fillon en 2011. Clamant son innocence depuis le début, elle avait été acquittée en première instance en 2018, tout comme l'ex-secrétaire d'État.
D'un côté, il y a la Brigitte Gruel telle qu'elle se présente. Une simple adjointe à la Culture de Georges Tron à la mairie de de Draveil (Essonne), sans pouvoir particulier. Une administratrice réservée qui ne comprend pas ce qu'elle fait devant la justice, en sorte.
Lorsqu'elle découvre en 2011 que deux ex-employées de Draveil l'accusent avec le maire LR de leur avoir imposé des attouchements et pénétrations digitales entre 2007 et 2010, "le monde s'écroule. Je ne comprends rien", affirme cette femme fluette.
Coupe au carré, doudoune sans manches et pantalon de velours noir, Brigitte Gruel renvoie devant la cour l'image d'une grand-mère au style classique, qui n'aspire qu'à passer du temps avec ses petits-enfants. Une femme sans histoires que son mari vient soutenir tous les jours à l'audience.
Mais il y a aussi Brigitte Gruel telle que décrite par les plaignantes, diamétralement différente. Une participante active à des scènes de triolisme avec Georges Tron. Une amante du maire, toute-puissante dans le petit monde de la municipalité de Draveil au point que la rumeur la surnommait dans son dos "La Pompadour" - l'influente maîtresse de Louis XV.
Or pour Brigitte Gruel, ses deux accusatrices ont monté des "scénarios" pour "faire tomber Georges Tron" dans le cadre d'un "complot" lié à la vie politique de Draveil. Et elles l'ont mise en cause en raison des griefs professionnels qu'elles lui portaient, avance-t-elle.
- Souvenirs flous -Les deux accusés nient toute relation sexuelle avec les plaignantes, ou même entre eux. "J'aime mon mari depuis 42 ans, même si on a eu petit accroc à un moment", mais pas Georges Tron, soutient Brigitte Gruel à la barre.
Point par point, la présidente de la cour la confronte longuement aux récits de scènes sexuelles faits par ses contradictrices. Mme Gruel lui oppose dénégations et une mémoire présentée comme floue. "C'est faux", "jamais !", "je n'ai pas de souvenirs précis", "je ne me rappelle pas"...
- "Avez-vous pénétré le sexe de (la plaignante) Virgine Ettel d'un doigt, au moins partiellement ?", insiste la présidente, pugnace.
- "C'est des choses... C'est pas moi ça... Ça n'a jamais eu lieu", répond Brigitte Gruel, la voix chevrotante et outrée.
Cependant pourquoi une témoin la compare-t-elle, dans une conversation téléphonique écoutée par les enquêteurs, à "la pute de service" au sein de la mairie ? Et pourquoi donc ce surnom pour le moins sibyllin de "La Pompadour" ?
À la référence historique, Brigitte Gruel préfère une explication géographique: "je pense que ça vient du fait que Mme de Pompadour a habité à Étiolles", ville proche de Draveil dans l'Essonne. Les commérages sur son compte, "j'étais au courant" mais "je ne sais pas comment faire taire une rumeur".
En première instance, la cour d'assises de Seine-Saint-Denis avait jugé crédible l'existence de scènes sexuelles mais écarté la présence d'une situation de contrainte entre l'élu et les deux femmes. Les parties civiles espèrent en appel prouver une "emprise" du maire.
Le verdict est attendu en milieu de semaine prochaine.
Si Brigitte Gruel n'a rien vu, rien fait, "pourquoi vous faire subir une telle procédure, c'est très lourd, se retrouver dix ans après devant une cour d'assises ?", interroge la présidente.
"Je ne sais pas", lâche une nouvelle fois l'accusée.
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