2022 acte I? Avec trois candidats de gauche sur la ligne de départ, les élections régionales en Ile-de-France s'annoncent comme un baromètre du rapport de force entre écologistes, communistes, socialistes et insoumis, à un an et demi de la présidentielle.
"Compte tenu de la visibilité de l'Ile-de-France et de certains des candidats, le scrutin va servir à tester des scénarios et donnera notamment des clefs sur le rapport de force à l'intérieur de la gauche", souligne le politologue et chercheur au Cevipof Bruno Cautrès. "Il permettra notamment de savoir où on en est entre écologistes et socialistes".
A ce stade, trois candidats de gauche sont officiellement en lice pour un scrutin dont la tenue - en juin - reste conditionnée à l'évolution de l'épidémie: Audrey Pulvar, dont la liste "Ile-de-France en commun" est soutenue par le PS, Place publique et le PRG ; le numéro un d'Europe Ecologie-Les Verts Julien Bayou et la députée de la France insoumise (LFI) Clémentine Autain.
Les rares sondages montrent pour l'instant un coude-à-coude entre l'adjointe d'Anne Hidalgo et l'écologiste (14% et 15%), devant Clémentine Autain autour des 10%. Tous sont donnés largement battus par l'actuelle présidente de région Valérie Pécresse (ex-LR, Libres! 30%) et devancés par Jean-Michel Blanquer (16%) dont le nom circulait jusqu'à peu comme potentiel candidat pour LREM.
"Il y a une vraie compétition à gauche pour savoir qui va arriver en tête au premier tour", estime Jean-Daniel Lévy, directeur délégué d'Harris Interactive. "Il y a eu une petite prime aux écologistes dans un contexte où on parlait beaucoup d'environnement et d'écologie. Ce qui sera intéressant c'est de voir dans quelle mesure ça va se maintenir pour eux".
Laboratoire pour les uns en vue, match aller avant 2022 pour les autres, le scrutin régional ravive également le spectre d'une division mortifère à gauche qui plane sur la présidentielle.
"Ce que nous donnons à voir avec les régionales est une image d'éclatement et de divisions alors qu'à gauche monte la nécessité de se mettre d'accord sur un programme de rupture et de créer une alternative crédible en 2022", regrette ainsi Céline Malaisé, présidente du groupe communiste au Conseil régional d'Ile-de-France, dont le parti devrait, sauf coup de théâtre, annoncer son soutien à la liste LFI pour les régionales.
- "Jeu des sept différences" -Conscient des risques d'une lutte fratricide, les candidats de la gauche ont baissé d'un ton ces dernières semaines après un échange de piques à l'automne.
"Notre adversaire, c'est Valérie Pécresse qui abîme la Région", a martelé Julien Bayou début janvier, assurant ne pas "avoir d'ennemis à gauche".
"Je ne doute pas que nous parvenions à trouver un chemin commun (avec EELV) s'il faut faire barrage à la droite de Valérie Pécresse et de la République en Marche", souligne pour sa part Audrey Pulvar.
Les divergences ne manquent pas toutefois entre les différentes sensibilités. Julien Bayou relève auprès de l'AFP l'absence de "la social-démocratie" au rassemblement de la mi-février contre le projet de gare en plein champ à Gonesse, après l'annulation d'Europa city.
Audrey Pulvar insiste pour sa part sur "la justice sociale", jugeant "irresponsable et injuste de refuser la construction de logements sociaux au nom de l'écologie". Et fait remarquer, dans le Parisien, qu'il reste à "aplanir certains désaccords" avec les Verts, "en particulier sur les questions fondamentales comme la laïcité", source de nombreuses frictions entre les deux camps cet automne.
Clémentine Autain estime qu'il faut à tout prix éviter "le jeu des sept différences avec les autres candidats de gauche". "Les électeurs de gauche seront découragés si on passe nos journées à se taper dessus", dit-elle à l'AFP.
Reste à savoir quel impact le scrutin régional aura sur de potentielles nouvelles candidatures pour la présidentielle. Un mauvais score d'Audrey Pulvar scellerait-il le sort d'une entrée en lice de la maire de Paris?
"Anne Hidalgo n'a pas besoin de moi pour devenir présidente de la République", réplique Audrey Pulvar dans le Parisien. "Je me suis déjà fait traiter d'alibi, de noire de service mais pas encore de marche pied".
mep-bap/jk/it