Le parlement sri-lankais doit élire mercredi un nouveau président pour remplacer Gotabaya Rajapaksa, qui s'est réfugié à Singapour la semaine dernière puis a démissionné après des mois de manifestations lui reprochant la faillite du pays.
Voici le point sur ce qui attend dans les prochaines semaines ce pays de 22 millions d'habitants où la crise économique sans précédent est aggravée par un système politique compliqué, marqué par la corruption et parfois la violence.
- Pourquoi Rajapaksa a-t-il fui ? -Sous Gotabaya Rajapaksa, le Sri Lanka a subi sa pire crise économique depuis l'indépendance et s'est déclaré en défaut de paiement. Depuis fin 2021, le pays est incapable de financer ses importations, même les plus essentielles.
Cette crise a été déclenchée par la pandémie de Covid-19, qui a ravagé le secteur touristique, grand pourvoyeur de devises pour l'île, mais a été aggravée par une série de mauvaises décisions politiques.
Même les plus fidèles alliés du président ont fini par le lâcher quand les pénuries de nourriture, d'électricité, de carburant et de médicaments se sont aggravées.
Le mécontentement populaire a explosé le 9 juillet: des centaines de manifestants ont pris d'assaut la résidence de M. Rajapaksa qui s'est enfui précipitamment et s'est réfugié dans une base de la marine, avant de partir pour Singapour via les Maldives, craignant pour sa vie.
- Le président était-il populaire ? -Gotabaya Rajapaksa était surnommé "Terminator" pour avoir écrasé la rébellion tamoule alors qu'il était ministre de la Défense, sous la présidence de son frère aîné Mahinda Rajapaksa entre 2005 et 2015.
S'il était apprécié par la majorité bouddhiste, il était au contraire honni par les minorités tamoule et musulmane qui voient en lui un raciste, un oppresseur et un criminel de guerre.
Le pays divisé a toutefois fini par s'unir contre M. Rajapaksa quand l'inflation a dépassé les 50%, avec quatre habitants sur cinq ne mangeant plus à leur faim.
- Qui va gouverner désormais ? -La Constitution sri-lankaise prévoit que le Premier ministre assure l'intérim de la présidence jusqu'à ce qu'un nouveau chef de l'Etat soit désigné, dans un délai d'un mois.
Ranil Wickremesinghe, 73 ans, assure cet intérim depuis la démission formelle de M. Rajapaksa le 14 juillet, deux ans et sept mois après le début de son mandat de cinq ans.
Les 225 membres du Parlement doivent se réunir mercredi pour désigner un nouveau président qui poursuivra le mandat de M. Rajapaksa jusqu'en novembre 2024.
- Qui sont les candidats à la succession ? -Le président par intérim Ranil Wickremesinghe, un pro-occidental qui a été six fois Premier ministre, est le grand favori. Il s'est assuré le soutien du SLPP, le parti de Gotabaya Rajapaksa, qui dispose d'une majorité relative d'une centaine de sièges au Parlement.
Rien n'est toutefois joué, le vote des députés étant secret. Dans le passé, certains ont été accusés d'avoir monnayé leur voix.
Pendant une crise constitutionnelle en octobre 2018, plusieurs députés avaient ainsi affirmé s'être vus offrir 3,5 millions de dollars et des appartements à l'étranger en échange de leurs votes.
Un autre candidat de poids est l'ancien ministre des Médias Dullas Alahapperuma, 63 ans, un dissident du SLPP.
Le principal dirigeant d'opposition, Sajith Premadasa, 55 ans, a annoncé mardi qu'il renonçait à sa candidature au profit de M. Alahapperuma.
Le troisième candidat Anura Dissanayake, 53 ans, est le chef du JVP (Front de libération du peuple), un parti de gauche qui dispose de trois sièges seulement au Parlement.
- Quel impact sur les discussions avec le FMI ? -Tous les partis politiques du Sri Lanka soutiennent les négociations en cours avec le Fonds monétaire international (FMI) en vue d'un plan de sauvetage.
Le pays, dont l'économie s'est complètement effondrée, s'est déclaré mi-avril en défaut de paiement de sa dette extérieure de 51 milliards de dollars.
Le FMI a espéré la semaine dernière que la crise au Sri Lanka serait rapidement résolue afin que les négociations, interrompues par les événements, puissent reprendre.
Mais l'adoption d'un plan de sauvetage risque d'être compliquée par les divisions au Parlement, où aucun parti ne dispose d'une majorité claire.
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