L'explosion dans un dépôt militaire russe mardi en Crimée relève d'une tentative ukrainienne de fragiliser les bases arrière russes dans le sud de l'Ukraine, tandis que la démotivation s'empare des milices prorusses dans l'Est, où les combats se poursuivent sans grandes avancées.
Voici un point de la situation au 175e jour de la guerre à partir d'informations des journalistes de l'AFP sur place, de déclarations officielles ukrainiennes et russes, de sources occidentales, d'analystes et d'organisations internationales.
- La Crimée encore attaquée -Mardi, l'armée russe a révélé qu'un dépôt militaire situé près de Djankoï, dans le nord de la Crimée, avait "été endommagé (...) à la suite d'un acte de sabotage", sans toutefois désigner de responsables.
Sur une vidéo obtenue par l'AFP, on aperçoit plusieurs importants panaches de fumée, d'où jaillissent de nombreuses boules de feu, les munitions ayant pris feu, dans une intense pétarade.
"Un certain nombre d'infrastructures civiles, parmi lesquelles une ligne à haute tension, une centrale électrique, une voie ferroviaire, ainsi que plusieurs maisons, ont également été endommagées", a raconté l'armée russe.
Andriï Iermak, le chef de l'administration présidentielle ukrainienne, a salué sur Telegram une "opération +démilitarisation+ façon travail d'orfèvre par les forces armées ukrainiennes".
D'après le ministère britannique de la Défense citant des médias russes, de la fumée a également été visible mardi au-dessus de Gvardeïskoïe, dont les installations et celles de Djankoï constituent les "deux des plus importants aéroports militaires russes en Crimée".
Ces explosions interviennent une semaine après qu'un autre aérodrome militaire russe avait été endommagé à Saki, en Crimée. Moscou avait alors mentionné un accident, quand experts et images satellites semblaient révéler le résultat d'une attaque ukrainienne.
Au moins neuf avions avaient été détruits, selon l'analyste danois Oliver Alexander.
Depuis l'invasion de l'Ukraine le 24 février, la Crimée sert de base arrière logistique aux forces russes. L'offensive sur le sud de l'Ukraine qui a permis à Moscou de conquérir de larges pans de territoires aux premières semaines de la guerre est partie de là.
Les attaques contre les positions russes en Crimée "font probablement partie d'une contre-offensive ukrainienne cohérente visant à reprendre le contrôle de la rive occidentale du Dniepr", observe l'Institut nord-américain sur l'étude de la guerre (ISW).
Les forces de Kiev, qui ont également tiré sur les ponts enjambant ce fleuve, cherchent à empêcher le ravitaillement et le renforcement des troupes russes présentes à l'ouest du Dniepr, notamment dans la région de Kherson, poursuit-il.
L'Ukraine a par ailleurs menacé mercredi de démanteler le pont de Kertch, construit à grands frais par Moscou pour connecter la Russie à la péninsule annexée de Crimée.
"Ce pont est une structure illégale et l'Ukraine n'a pas donné sa permission pour sa construction", a écrit sur Telegram le conseiller de la présidence ukrainienne Mikhaïlo Podoliak.
- Peur nucléaire dans le Sud -L'Otan a réclamé mercredi un "inspection" urgente par l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) de la centrale nucléaire de Zaporijjia (sud), cible de plusieurs frappes dont les deux belligérants s'accusent mutuellement, faisant craindre une catastrophe nucléaire.
"Il est urgent d'autoriser une inspection de l'AIEA", a jugé son secrétaire général Jens Stoltenberg, qui a également appelé au "retrait de toutes les forces russes" de la plus grande centrale nucléaire d'Europe, qu'elles contrôlent depuis début mars.
Mardi, l'opérateur public ukrainien des centrales nucléaires Energoatom avait dénoncé une cyberattaque russe "sans précédent" contre son site en ligne, précisant que son fonctionnement n'avait pas été perturbé.
Le groupe russe "Cyberarmée populaire" avait utilisé 7,25 millions de robots internet qui ont pendant trois heures attaqué le site d'Energoatom, avait assuré la société ukrainienne, mais sans "impact considérable".
Valentyn Reznitchenko, le gouverneur de la région de Dnipro, a de son côté fait état mercredi de huit frappes russes sur Nikopol, qui fait face à la centrale de Zaporijjia, et de 40 autres à Tchervonogrygorivka. Aucune victime n'a selon lui été recensée.
- Prorusses démotivés dans l'Est -Une partie de la milice prorusse de la "République" de Lougansk (LNR), qui compose le Donbass avec celle de Donetsk (DNR), refuse de se battre dans la DNR, estime l'ISW, se fondant sur une vidéo visible sur les réseaux sociaux ukrainiens.
"Les soldats affirment avoir célébré la victoire le 3 juillet, lorsque les forces de la LNR ont atteint les frontières de Lougansk, et que leur travail est terminé", raconte le centre de recherches américain, qui, s'il dit ne pouvoir vérifier l'authenticité de la vidéo, assure que cela s'inscrit dans une "tendance plus large de diminution de l'investissement" des milices prorusses.
Une partie des troupes de la DNR s'étaient plaintes de manière similaire ces derniers mois quand elles avaient été réaffectées dans la région de Lougansk ou encore à Kherson (sud), relève l'ISW.
Mercredi, le gouverneur pro-ukrainien de la région de Donetsk, Pavlo Kyrylenko, a fait état de plusieurs bombardements russes ayant localement fait au moins deux morts et 13 blessés.
- Frappe russe sur Kharkiv -Au moins six personnes ont été tuées et 16 blessées mercredi dans un bombardement russe sur Kharkiv, la deuxième ville d'Ukraine, ont annoncé les autorités locales, le président Volodymyr Zelensky dénonçant une "attaque ignoble et cynique".
"Il y a un puissant incendie sur les lieux de la frappe dans un immeuble d'habitation", a indiqué le maire de cette ville, Igor Terekhov. Volodymyr Zelensky a évoqué un immeuble d'habitation "totalement détruit" par la frappe.
Située à une quarantaine de kilomètres de la frontière russe dans le nord-est de l'Ukraine, Kharkiv est régulièrement pilonnée par l'armée russe depuis le début de l'invasion le 24 février, mais les troupes de Moscou n'ont jamais réussi à prendre la ville.
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