Guerre en Ukraine: la situation sur le terrain au 146e jour #
La Russie continue de bombarder plusieurs régions de l'Ukraine, où le Parlement a voté mardi, confirmant la décision du président Zelensky, le limogeage du chef de la sécurité et de la procureure générale.
Voici un point de la situation de la guerre en Ukraine, au 146e jour de la guerre, à partir d'informations des journalistes de l'AFP sur place, de déclarations officielles ukrainiennes et russes, de sources occidentales, d'analystes et d'organisations internationales.
Dans le Donbass, que les forces ukrainiennes défendent principalement sur une ligne Sloviansk-Siversk-Bakhmout, Moscou semble considérer que la conquête de Sloviansk est une "moindre priorité" par rapport à des "gains localisés et discrets autour de Siversk et Bakhmout", sur lesquels des "ressources militaires" et des "dirigeants de haut niveau" sont engagés, selon l'Institut américain pour l'étude de la guerre (ISW).
Les troupes russes ont ainsi touché des bâtiments résidentiels à Avdiivka, Soledar, et Bakhmout, selon la présidence ukrainienne, qui recensait mardi "deux frappes de missiles sur Toretsk", derrière Bakhmout, ainsi que "des bombardements de zones industrielles" notamment à Kramatorsk.
Près de Bakhmout, l'armée ukrainienne affirme avoir "repoussé avec succès" plusieurs "tentatives d'assaut". Les forces russes affirment avoir tué 60 soldats ukrainiens à Dolina, dans la même zone.
D'après Kiev, Moscou a également tiré des obus et roquettes sur Kramatorsk, centre administratif de la partie du Donbass encore aux mains de Kiev, située à une vingtaine de km du front.
L'AFP a constaté les destructions causées par un missile tombé en fin de matinée dans un petit jardin entouré de barres d'immeubles de Kramatorsk. "A ce stade nous avons un mort", a déclaré à l'AFP Igor Ieskov, chargé de communication à la mairie de la ville, tandis qu'un haut responsable de la police a fait état de six blessés.
L'armée ukrainienne recense également des "pertes" russes lors d'une mission de "reconnaissance" "complètement ratée" dans le nord du pays.
L'armée russe a tiré sept missiles sur le Sud et particulièrement la région d'Odessa, blessant au moins six personnes dont un enfant, selon Kiev.
"Un missile a été détruit par la défense anti-aérienne. Six autres ont touché un village où plusieurs bâtiments résidentiels et d'autres structures ont été détruits", selon la présidence.
Le ministère russe de la Défense a pour sa part indiqué que des frappes sur Odessa avaient détruit un stock de munitions fournies par les Occidentaux.
Le Parlement ukrainien a voté mardi le limogeage du chef des services de sécurité (SBU), Ivan Bakanov, et de la procureure générale, Iryna Venediktova, proposé par le président Volodymyr Zelensky.
Andriy Smirnov, chef adjoint de la présidence, avait précisé lundi qu'il s'agissait "d'éviter toute influence de ces deux responsables sur les enquêtes criminelles contre des membres des services de sécurité et du parquet suspectés de coopération avec la Russie".
Lundi, M. Zelensky a encore annoncé une "révision des cadres" au sein du SBU, alors qu'au moins trois hauts responsables de cette organisation ont été soupçonnés de haute trahison ces derniers mois.
Le gouverneur de la région de Mykolaïv (sud), constamment bombardée, a annoncé une prime de 100 dollars pour ceux qui aideraient à identifier les collaborateurs des Russes, qui renseignent l'artillerie de Moscou sur les cibles.
Le président russe Vladimir Poutine a évoqué mardi des progrès dans les négociations pour l'exportation des céréales d'Ukraine via la mer Noire et remercié son homologue turc Recep Tayyip Erdogan pour sa "médiation" dans ce dossier, lors d'une rencontre à Téhéran.
Les deux dirigeants sont à Téhéran pour des discussions avec leur homologue iranien, Ebrahim Raïssi, sur le conflit en Syrie mais aussi sur la guerre en Ukraine.
L'objectif est de faire sortir quelque 20 millions de tonnes de céréales bloquées dans des silos ukrainiens, dont Kiev et les Occidentaux accusent Moscou de bloquer l'exportation, au risque de provoquer une crise alimentaire mondiale.
Il n'existe aucun bilan global des victimes civiles du conflit. L'ONU a recensé près de 5.000 morts confirmés, dont plus de 300 enfants, mais reconnaît que leur nombre véritable est sans doute largement supérieur.
Pour la seule ville de Marioupol (sud-est), tombée en mai au terme d'un terrible siège, les autorités ukrainiennes évoquaient quelque 20.000 morts.
Sur le plan militaire, le chef d'état-major des armées britannique, l'amiral Tony Radakin, a évalué dimanche à 50.000 le nombre de soldats russes tués ou blessés - ainsi que 1.700 chars et 4.000 blindés détruits. Des sources de sécurité occidentales évoquaient depuis des semaines de 15.000 à 20.000 soldats russes tués.
Kiev a fait état de 10.000 morts dans ses troupes.
Aucune statistique indépendante n'est disponible.
Plus de six millions d'Ukrainiens sont déplacés à l'intérieur de leur pays, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) et le Haut Commissariat aux réfugiés de l'ONU (HCR).
Ils s'ajoutent aux quelque 5,5 millions d'Ukrainiens enregistrés en tant que réfugiés dans d'autres Etats européens depuis le début de l'invasion.
bur-jf/dla/lpt
Guerre en Ukraine: la situation sur le terrain au 146e jour #
La Russie continue de bombarder plusieurs régions de l'Ukraine, où le Parlement a voté mardi, confirmant la décision du président Zelensky, le limogeage du chef de la sécurité et de la procureure générale.
Voici un point de la situation de la guerre en Ukraine, au 146e jour de la guerre, à partir d'informations des journalistes de l'AFP sur place, de déclarations officielles ukrainiennes et russes, de sources occidentales, d'analystes et d'organisations internationales.
Dans le Donbass, que les forces ukrainiennes défendent principalement sur une ligne Sloviansk-Siversk-Bakhmout, Moscou semble considérer que la conquête de Sloviansk est une "moindre priorité" par rapport à des "gains localisés et discrets autour de Siversk et Bakhmout", sur lesquels des "ressources militaires" et des "dirigeants de haut niveau" sont engagés, selon l'Institut américain pour l'étude de la guerre (ISW).
Les troupes russes ont ainsi touché des bâtiments résidentiels à Avdiivka, Soledar, et Bakhmout, selon la présidence ukrainienne, qui recensait mardi "deux frappes de missiles sur Toretsk", derrière Bakhmout, ainsi que "des bombardements de zones industrielles" notamment à Kramatorsk.
Près de Bakhmout, l'armée ukrainienne affirme avoir "repoussé avec succès" plusieurs "tentatives d'assaut". Les forces russes affirment avoir tué 60 soldats ukrainiens à Dolina, dans la même zone.
D'après Kiev, Moscou a également tiré des obus et roquettes sur Kramatorsk, centre administratif de la partie du Donbass encore aux mains de Kiev, située à une vingtaine de km du front.
L'AFP a constaté les destructions causées par un missile tombé en fin de matinée dans un petit jardin entouré de barres d'immeubles de Kramatorsk. "A ce stade nous avons un mort", a déclaré à l'AFP Igor Ieskov, chargé de communication à la mairie de la ville, tandis qu'un haut responsable de la police a fait état de six blessés.
L'armée ukrainienne recense également des "pertes" russes lors d'une mission de "reconnaissance" "complètement ratée" dans le nord du pays.
L'armée russe a tiré sept missiles sur le Sud et particulièrement la région d'Odessa, blessant au moins six personnes dont un enfant, selon Kiev.
"Un missile a été détruit par la défense anti-aérienne. Six autres ont touché un village où plusieurs bâtiments résidentiels et d'autres structures ont été détruits", selon la présidence.
Le ministère russe de la Défense a pour sa part indiqué que des frappes sur Odessa avaient détruit un stock de munitions fournies par les Occidentaux.
Le Parlement ukrainien a voté mardi le limogeage du chef des services de sécurité (SBU), Ivan Bakanov, et de la procureure générale, Iryna Venediktova, proposé par le président Volodymyr Zelensky.
Andriy Smirnov, chef adjoint de la présidence, avait précisé lundi qu'il s'agissait "d'éviter toute influence de ces deux responsables sur les enquêtes criminelles contre des membres des services de sécurité et du parquet suspectés de coopération avec la Russie".
Lundi, M. Zelensky a encore annoncé une "révision des cadres" au sein du SBU, alors qu'au moins trois hauts responsables de cette organisation ont été soupçonnés de haute trahison ces derniers mois.
Le président russe Vladimir Poutine est arrivé mardi à Téhéran, où il rencontrera le président turc Recep Tayyip Erdogan pour la première fois depuis le début de l'invasion russe de l'Ukraine.
Ils discuteront notamment l'accord en cours de négociation par la Russie, l'Ukraine, la Turquie et les Nations unies, qui vise à faire sortir par la mer Noire quelque 20 millions de tonnes de céréales bloquées dans des silos ukrainiens.
Il n'existe aucun bilan global des victimes civiles du conflit. L'ONU a recensé près de 5.000 morts confirmés, dont plus de 300 enfants, mais reconnaît que leur nombre véritable est sans doute largement supérieur.
Pour la seule ville de Marioupol (sud-est), tombée en mai au terme d'un terrible siège, les autorités ukrainiennes évoquaient quelque 20.000 morts.
Sur le plan militaire, le chef d'état-major des armées britannique, l'amiral Tony Radakin, a évalué dimanche à 50.000 le nombre de soldats russes tués ou blessés - ainsi que 1.700 chars et 4.000 blindés détruits. Des sources de sécurité occidentales évoquaient depuis des semaines de 15.000 à 20.000 soldats russes tués.
Kiev a fait état de 10.000 morts dans ses troupes.
Aucune statistique indépendante n'est disponible.
Plus de six millions d'Ukrainiens sont déplacés à l'intérieur de leur pays, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) et le Haut Commissariat aux réfugiés de l'ONU (HCR).
Ils s'ajoutent aux quelque 5,5 millions d'Ukrainiens enregistrés en tant que réfugiés dans d'autres Etats européens depuis le début de l'invasion.
bur-jf/dla/lpt
France: les six canons Caesar supplémentaires "en route" pour l'Ukraine #
Les six canons Caesar supplémentaires, fleuron de l'artillerie française promis par Emmanuel Macron mi-juin, sont "en route" vers l'Ukraine, a déclaré mardi la cheffe de la diplomatie française Catherine Colonna.
Douze canons Caesar ont "d'ores et déjà été livrés" et "les six autres sont en route", a-t-elle annoncé devant la commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées du Sénat, à Paris.
Elle n'a pas précisé la date prévue d'arrivée sur le sol ukrainien de ce renfort qui avait été annoncé par le chef de l'Etat français le 16 juin lors de sa visite à Kiev.
Depuis le début de l'offensive militaire lancée par Moscou en Ukraine le 24 février, Paris a livré à Kiev, au-delà des canons Caesar, des missiles anti-chars Milan et des missiles anti-aériens Mistral.
Fin juin, le ministre des Armées Sébastien Lecornu avait annoncé que la France allait, en plus, envoyer dans des "quantités significatives" des véhicules blindés de transport de troupes.
Il avait également indiqué que la livraison de missiles anti-navires, demandée par Kiev pour "ouvrir des brèches dans ce blocus maritime imposé par la Russie et qui prive de nombreux pays de livraisons de céréales et de matières premières", faisait "partie des dossiers examinés".
"A titre national, la France prend toute sa part même si nous soulignons moins que d'autres ce que nous faisons. Nous avons fait le choix de ne pas communiquer sur la totalité de notre contribution militaire" et de réserver ces informations "à nos partenaires", a fait savoir Mme Colonna.
mep/dla/dlm
Adhésion de la Suède et de la Finlande à l'Otan: projet de loi de ratification le 2 août à l'Assemblée nationale #
Le projet de loi de ratification pour permettre l'accession de la Suède et de la Finlande à l'Otan sera examiné le 2 août à l'Assemblée nationale, après le Sénat le 21 juillet, a-t-on appris de source parlementaire.
Ainsi, la ratification par la France devrait être effective à l'issue de cet examen le 2 août au soir, selon l'ordre du jour fixé mardi en conférence des présidents au Palais-Bourbon.
La signature à Bruxelles des protocoles d'adhésion par les ambassadeurs des trente pays membres avait ouvert, le 5 juillet, le processus de ratification. Le Canada a été le premier pays à ratifier le jour-même les deux protocoles d'adhésion.
La signature des protocoles d'adhésion accorde le statut de pays invité à la Suède et à la Finlande. Mais elles ne bénéficieront pas de la protection de l'article 5 de la Charte de l'Otan en cas d'attaque tant que les 30 États membres n'auront pas ratifié leur adhésion.
"Beaucoup d'alliés se sont préparés pour que la ratification soit la plus rapide possible, mais cela va prendre plusieurs mois", avait prévenu Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l'Alliance. "La dernière fois (pour la Macédoine du Nord), cela a pris douze mois", avait-il rappelé.
Les deux pays nordiques ont confirmé avoir renoncé à leur neutralité et décidé de rejoindre l'Otan à cause de la dégradation de la situation sécuritaire en Europe provoquée par la Russie.
reb/cs/tes
L'EI en Afrique: une "marque" en développement, une coordination faible #
Le groupe Etat islamique enregistre une croissance spectaculaire sur le continent africain, mais le rôle de la centrale jihadiste au Levant reste minime et la coordination inter-filiales embryonnaire, explique à l'AFP l'expert Hans-Jakob Schindler.
Le directeur de l'ONG Counter-Extremism Project (CEP), ancien expert des Nations unies sur le jihadisme, décrit une dynamique d'opportunités qui ne témoigne pas d'une montée en puissance de cadres africains dans l'organisation.
QUESTION : Les filiales de l'EI en Afrique sont-elles en lien direct avec l'EI centrale au Levant ?
REPONSE : Il y a un point de contact mais essentiellement pour la propagande, il n'y a pas d'instructions opérationnelles. Entre les filiales, il y a très peu de coordination. Ces gens se connaissent mais je n'ai pas entendu qu'ils se parlaient. Aucune de ces provinces, à part en Libye, n'a été fondée par l'EI. Ce sont d'anciens groupes locaux qui ont prêté allégeance. Si elles devaient se coordonner (...), quel serait l'intérêt de l'EI centrale ? Cela aurait plutôt tendance à en réduire l'importance (et) l'EI est désormais très faible en Irak et en Syrie.
Q: Que peut faire l'EI pour se développer en Afrique ?
R: Peu de choses. Ce qui pour moi explique en grande partie leur croissance est liée à la gouvernance, qui s'est dégradée ces dernières années. Vous avez de grandes expansions, des filiales qui émergent, des chiffres imposants, des territoires contrôlés au moins partiellement (...) Mais il y a peu de choses que la centrale puisse faire sinon utiliser la propagande (...) Intrinsèquement, l'EI comme al-Qaïda relèvent d'une idéologie salafiste dominée par les Arabes, qui n'est pas commune en Afrique de l'Ouest et ne s'est développée que depuis 10 ou 20 ans. Il y a plus de combattants de l'EI de descendance africaine qu'arabe aujourd'hui. Mais (...) le nouveau leader, censé être irakien, connait très mal les particularités des problèmes d'Afrique subsaharienne.
Q: L'Afrique peut-elle monter en puissance dans l'EI centrale ?
R: C'est très difficile d'aller en Irak et Syrie, surtout si vous êtes Africain, et vice versa. Pour faire partie du sommet de la hiérarchie, vous devez vous trouver physiquement là où elle se trouve. Donc je ne vois pas très bien comment cela pourrait se jouer (...). Ils sont impliqués dans les conflits locaux et enregistrent de grands succès. Ils utilisent l'EI comme une marque, sont satisfaits de placer tout ça dans une échelle mondiale. Mais en terme de leadership, je n'ai eu vent d'aucune ambition ni demande de la part des filiales africaines pour intégrer le sommet de la direction. L'EI en Syrie et en Irak est maintenant une histoire de survie. Je ne dis pas que cela n'arrivera jamais, mais si cela arrive, cela ne sera pas dans l'intérêt de la centrale.
Q: Les franchises du continent collaborent-elles entre elles ?
R: Nul ne se soucie du voisin sauf si les zones (d'activité) se touchent (...). Quand ces groupes se rencontrent, il y a des conflits sur qui garde telle mine et qui contrôle tel village, parce que cela apporte du revenu (...). La marque n'est pas assez forte pour vous faire sentir que votre frère a besoin de cette mine, ou que vous devriez attaquer pour l'aider. Si la centrale les finançait, elle pourrait donner des instructions mais ce n'est pas le cas.
dla/mep/jhd
L'Afrique, zone de croissance exponentielle du groupe Etat islamique #
Le temps est loin du califat autoproclamé du groupe Etat islamique (EI) en Syrie et en Irak. Aujourd'hui, la centrale jihadiste surnage au Levant mais s'étend en Afrique, où ses filiales valorisent une "marque" mortifère et florissante.
Deux nouvelles provinces ("wilayas") officielles de l'EI ont été créées en mars au Sahel et en mai au Mozambique. Peu après, un éditorial dans l'hebdomadaire officiel de l'EI al-Naba encourageait les musulmans à rejoindre le continent, avant que des vidéos de Syrie et d'Irak ne félicitent les frères combattants en Afrique.
"Le fait qu'ils appellent à rejoindre l'EI en Afrique est très significatif", estime Damien Ferré, fondateur de la société Jihad Analytics, qui analyse le jihad mondial et cyber. "Ils reconnaissent qu'il n'y a pas la capacité aujourd'hui à poursuivre le projet califal (...) mais il y a vraiment une volonté de mettre des billes sur l'Afrique".
En 2021, al-Naba a consacré 28 unes sur 52 à l'Afrique, précise-t-il. Désormais, la majorité des provinces de l'EI, soit 7 sur 13, sont basées sur le continent.
Mais les experts sont unanimes: le jihad africain n'est pas le jumeau de son avatar au Levant. Ses ressorts sont profondément divers car imprégnés de dynamiques locales. Et l'hypothèse, un temps brandie, d'un "Sahélistan" cohérent et géré comme tel, est hors de portée.
"Le jihad africain est teinté de quelque chose en plus du radicalisme", résume Hassane Kone, chercheur à l'Institut des études de sécurité (ISS) à Dakar. "Beaucoup de gens ont mis le pied à l'étrier pour des raisons pas forcément religieuses", ajoute-t-il à l'AFP en citant l'exclusion, la pauvreté, les exactions des militaires. Pour autant, "l'EI capitalise sur le jihad africain pour continuer à exister".
Djallil Lounnas, chercheur à l'université marocaine d'Al Akhawayn, confirme une stratégie délibérée de l'EI depuis 2017 "face à la certitude de la chute" du califat. Les allégeances africaines à la centrale sont "mutuellement bénéfiques: l'un continue d'exister et de donner une impression de puissance, et les seconds de bénéficier de la marque EI".
En terme de propagande, la centrale impose un visuel, une signalétique, des thématiques dans ses textes et vidéos. En République démocratique du Congo (RDC), les Forces démocratiques alliées (ADF), officiellement liées à l'EI depuis 2017, en ont depuis singé les méthodes, selon la revue Combating Terrorism Center (CTC) de l'académie militaire américaine West Point.
"Les ADF ont commencé à l'été 2021 à diffuser des vidéos de décapitation", témoignant de leur volonté de "s'aligner" sur "la marque mondiale de l'EI", estime-t-elle, analysant de la même façon leur recours aux attentats-suicide.
Les ADF ont aussi connu, selon le CTC, un afflux de combattants venus de Tanzanie, du Burundi, du Kenya et d'Afrique du Sud. Et des liens ont été établis avec des membres arabes de l'EI. L'armée congolaise a annoncé l'arrestation en quelques mois d'un Kenyan d'origine omanaise, d'un Egyptien et d'un Jordanien.
Dans une vidéo de propagande, on voit le premier superviser l'exécution à la machette d'un militaire congolais. Le second avait été semble-t-il dépêché "pour aider le groupe à améliorer ses capacités technologiques", précise le CTC.
D'autres échanges d'un théâtre à l'autre sont évoqués ici et là. Autour du lac Tchad sont parfois évoqués "des conseillers et experts qui viennent aider dans des moments difficiles sur des décisions, des réorganisations", explique Vincent Foucher, chercheur au Centre national de recherche scientifique français (CNRS).
"Il y a une circulation d'individus entre le jihad arabe et le lac", fait-il valoir, mais la "logique relève plus de la franchise que du commandement".
Plus à l'ouest, des habitants ont fait état de bruits de moto entre nord-ouest du Nigéria et Niger. Mais rien n'a été confirmé dans cette zone désertique où les frontières sont des passoires.
Sur l'Est enfin, poursuit Elie Tenenbaum, de l'Institut français des relations internationales (IFRI), "il y a des Ougandais qui circulent dans toute l'Afrique australe. Ils passent par le Malawi et ça peut descendre très au sud".
"Ce sont des lieux de passage mal contrôlés", précise-t-il, évoquant des "points de passage de trafic anciens" et des individus qui agissent "parfois en électron libre".
Mais aussi peu structurée qu'elle soit, la croissance de l'EI profite, en miroir, de la faiblesse de la lutte anti-terroriste. Rares sont les actions conjointes entre Etats, comme entre armées congolaises et ougandaises contre les ADF, ou comme l'intervention rwandaise face à l'EI au Mozambique. Au Sahel, la France quitte le Mali après neuf ans d'antiterrorisme et la mission onusienne, la Minusma, est en suspens.
"La coordination va mal", tranche Hans-Jakob Schindler, directeur de l'ONG Counter-Extremism Project (CEP) et ex-expert de l'ONU sur le jihadisme. Il regrette le départ des Français, tant les Etats africains semblent impuissants face au fléau jihadiste.
Et "à part la France, dans l'Union européenne, est-ce que c'est un sujet prioritaire ? Non ! Nous l'ignorons à notre propre détriment".
dla/mep/jhd
Guerre en Ukraine: la situation sur le terrain au 145e jour #
Six personnes ont été tuées lors d'un bombardement russe à Toretsk, ville du Donbass, où les bombardements ont repris depuis quelques jours avec plus d'intensité, Moscou ayant fait du contrôle total de cette région de l'est de l'Ukraine son principal objectif à court terme.
Voici un point de la situation de la guerre en Ukraine, au 145e jour de la guerre, à partir d'informations des journalistes de l'AFP sur place, de déclarations officielles ukrainiennes et russes, de sources occidentales, d'analystes et d'organisations internationales.
"Un immeuble a été détruit par un obus à Toretsk, bombardée dans la matinée. Les sauveteurs ont récupéré cinq corps. Trois personnes ont été dégagées des décombres dont une est décédée à l'hôpital", selon le service d'Etat ukrainien des Situations d'urgence.
Toretsk se trouve à 20 km environ derrière la ligne Sloviansk-Siversk-Bakhmout, sur laquelle les troupes ukrainiennes s'arcboutent pour empêcher les forces russes de conquérir toute la région de Donetsk, l'une des deux régions composant le Donbass avec celle de Lougansk.
Depuis début juillet, et la prise de Severodonetsk et Lyssytchansk, Moscou contrôle intégralement la région de Lougansk.
Lundi, le porte-parole du ministère russe de la Défense, Igor Konachenkov, a affirmé que 250 "mercenaires étrangers" avaient été tués lors d'une frappe aérienne russe sur le village de Konstantinovka, voisin de Toretsk, ce que l'AFP n'a pu vérifier.
M. Konachenkov a également fait état de frappes sur des objectifs ukrainiens près de Kramatorsk et à Novyi Donbass, dans la région de Donetsk, mentionnant aussi des duels d'artillerie à Siversk.
D'après l'Institut américain pour l'étude de la guerre (ISW), les forces russes ont mené dimanche des assauts terrestres "limités et infructueux" contre Siversk et Bakhmout.
Les forces russes continuent à bombarder la région de Kharkiv (Nord), d'où elles se sont retirées il y a plusieurs mois.
Ces frappes "défensives", selon l'ISW, visent pour Moscou à s'assurer que les troupes ukrainiennes ne se rapprocheront ni trop près de la frontière russe ni de la ville d'Izioum, qu'ils ont conquise difficilement et qui se trouve près du Donbass.
Dans le Sud, où les forces ukrainiennes mènent une contre-offensive dans la région de Kherson depuis plus d'un mois, bombardant avec succès plusieurs entrepôts d'armes russes, l'armée russe se déplace dans des zones fortement peuplées pour empêcher de nouvelles frappes, selon l'armée ukrainienne, citée par l'ISW.
La région d'Odessa, sur la mer Noire, a été visée par quatre missiles, a indiqué Sergiï Bratchuk, le porte-parole de l'administration régionale d'Odessa, sur Telegram. Deux d'entre eux ont touché un objectif militaire, un troisième un pont, et le dernier a été neutralisé par la défense antiaérienne ukrainienne, a-t-il dit.
Le président ukrainien Volodymyr Zelenksy a annoncé dimanche avoir relevé de leurs fonctions la procureure générale Iryna Venediktova et le chef des services de sécurité (SBU), Ivan Bakanov.
Andriy Smirnov, chef adjoint de la présidence, a précisé lundi à la télévision ukrainienne qu'ils n'étaient à ce stade que suspendus, et qu'il s'agissait "d'éviter toute influence de ces deux responsables sur les enquêtes criminelles contre des membres des services de sécurité et du parquet suspectés de coopération avec la Russie".
Les autorités ukrainiennes enquêtent sur plus de 650 cas de soupçons de trahison de responsables locaux, dont 60 dans les zones occupées par les forces russes et prorusses, selon M. Zelensky.
Mme Venediktova a notamment dirigé l'enquête sur les atrocités présumées commises par les forces russes dans la ville de Boutcha.
Un adjoint de M. Bakanov, Vasyl Maliouk, a été nommé par interim à la tête du SBU.
Le groupe paramilitaire russe Wagner, très lié au Kremlin, a subi "de lourdes pertes" dans le Donbass, où il a joué un "rôle central" dans la prise de Popasna et Lyssytchansk, affirme le ministère britannique de la Défense.
Pour regarnir ses effectifs, Wagner "abaisse ses normes de recrutement", embauchant notamment "des condamnés et des individus anciennement mis sur liste noire", ce qui devrait limiter à terme l'efficacité du groupe et "réduire sa valeur" pour Moscou, selon Londres.
Il n'existe aucun bilan global des victimes civiles du conflit. L'ONU a recensé près de 5.000 morts confirmés, dont plus de 300 enfants, mais reconnaît que leur nombre véritable est sans doute largement supérieur.
Pour la seule ville de Marioupol (sud-est), tombée en mai au terme d'un terrible siège, les autorités ukrainiennes évoquaient quelque 20.000 morts.
Sur le plan militaire, le chef d'état-major des armées britannique, l'amiral Tony Radakin, a évalué dimanche à 50.000 le nombre de soldats russes tués ou blessés - ainsi que 1.700 chars et 4.000 blindés détruits. Des sources de sécurité occidentales évoquent depuis des semaines de 15.000 à 20.000 soldats russes tués.
Kiev a fait état d'au moins 10.000 morts dans ses troupes.
Aucune statistique indépendante n'est disponible.
Plus de six millions d'Ukrainiens sont déplacés à l'intérieur de leur pays, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) et le Haut Commissariat aux réfugiés de l'ONU (HCR).
Ils s'ajoutent aux quelque 5,5 millions d'Ukrainiens enregistrés en tant que réfugiés dans d'autres Etats européens depuis le début de l'invasion.
Un tribunal de Moscou a condamné lundi Google à 363 millions d'euros d'amende pour n'avoir pas supprimé des contenus dénonçant l'offensive en Ukraine, a annoncé le gendarme russe des télécoms Roskomnadzor.
La plateforme de vidéos YouTube, propriété de Google, n'a pas bloqué "de fausses informations" sur l'offensive en Ukraine, ainsi que des contenus "faisant la propagande de l'extrémisme et du terrorisme", justifie Roskomnadzor.
Dans le même temps, Vladimir Poutine a juré de vaincre les "difficultés colossales" causées par le "blocage presque total" en produits de haute technologie de la Russie par les géants de la tech occidentaux.
L'Union européenne a de son côté annoncé lundi un accord avec l'Azerbaïdjan pour doubler en "quelques années" ses importations de gaz naturel depuis ce pays, afin de se défaire de sa dépendance vis-à-vis de la Russie.
Les présidents russe et turc parleront de leur côté mardi à Téhéran de mécanismes pour permettre les exportations de céréales d'Ukraine, bloquées dans ce pays par l'offensive militaire russe au risque de provoquer une crise alimentaire mondiale.
bur-jf/lp/lpt
Les efforts de l'UE encore insuffisants pour tenir l'hiver sans gaz russe, selon l'AIE #
Diversifier les fournisseurs ne suffira pas: l'Union européenne va devoir réduire plus rapidement qu'aujourd'hui sa demande de gaz pour constituer ses stocks, si elle veut tenir l'hiver sans gaz russe, a prévenu lundi le directeur de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), "inquiet pour les mois qui viennent".
"Il ne faut pas juste compter sur les ressources gazières non-russes: celles-ci ne vont tout simplement pas suffire en volume pour remplacer les livraisons de Russie", souligne Fatih Birol, dans un article publié par son organisation.
"Et ce même si l'offre de Norvège et d'Azerbaïdjan afflue à capacités maximum, même si les livraisons d'Afrique du Nord approchent leur niveau de l'an dernier, et même si la croissance des flux de GNL garde son rythme du premier semestre".
Moscou a déjà commencé à fermer le robinet et les Européens craignent une rupture totale des livraisons en réaction aux sanctions prises contre l'invasion de l'Ukraine. Pour Fatih Birol, c'est "une alerte rouge" pour l'UE.
L'économiste constate "des progrès" pour s'affranchir de la dépendance russe, "mais pas assez, surtout du côté de la demande, pour éviter que l'Europe ne se retrouve aujourd'hui dans une situation incroyablement précaire".
Selon une analyse de l'AIE, le continent devrait stocker dans les trois mois 12 milliards de mètres cubes de gaz supplémentaires (de quoi remplir 130 méthaniers de GNL), pour se mettre à l'abri avec des stocks remplis à 90%.
Mais cela suppose aussi que le gazoduc Nord Stream, principale voie de livraison par la mer Baltique et actuellement en maintenance, soit bien redémarré par les Russes jeudi 21 juillet, et ce jusqu'à début octobre. S'il ne l'était pas, la situation serait encore plus compliquée. Or "on ne peut écarter un arrêt complet", dit M. Birol.
Face à cela, l'AIE préconise en urgence des mesures telles que des systèmes d'enchère pour la vente de gaz aux industriels, privilégier temporairement d'autres sources d'électricité y compris charbon ou pétrole, ou encore lisser les pics de consommation en gaz et électricité via une coordination européenne accrue.
La demande électrique peut être réduite en fixant des normes dans la climatisation par exemple, bâtiments publics en tête, ajoute Fatih Birol, qui appelle les "gouvernements à préparer les populations" via des campagnes, car "chaque action compte. Des gestes simples comme baisser le chauffage de quelques degrés peut économiser la même quantité de gaz que celle fournie par Nord Stream sur un hiver".
cho/ico/spi
Les efforts de l'UE encore insuffisants pour tenir l'hiver sans gaz russe, selon l'AIE #
Diversifier les fournisseurs ne suffira pas: l'Union européenne va devoir réduire plus rapidement qu'aujourd'hui sa demande de gaz pour constituer ses stocks, si elle veut tenir l'hiver sans gaz russe, a prévenu lundi le directeur de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), "inquiet pour les mois qui viennent".
"Il ne faut pas juste compter sur les ressources gazières non-russes: celles-ci ne vont tout simplement pas suffire en volume pour remplacer les livraisons de Russie", souligne Fatih Birol, dans un article publié par son organisation.
"Et ce même si l'offre de Norvège et d'Azerbaïdjan afflue à capacités maximum, même si les livraisons d'Afrique du Nord approchent leur niveau de l'an dernier, et même si la croissance des flux de GNL garde son rythme du premier semestre".
Moscou a déjà commencé à fermer le robinet et les Européens craignent une rupture totale des livraisons en réaction aux sanctions prises contre l'invasion de l'Ukraine. Pour Fatih Birol, c'est "une alerte rouge" pour l'UE.
L'économiste constate "des progrès" pour s'affranchir de la dépendance russe, "mais pas assez, surtout du côté de la demande, pour éviter que l'Europe ne se retrouve aujourd'hui dans une situation incroyablement précaire".
Selon une analyse de l'AIE, le continent devrait stocker dans les trois mois 12 milliards de mètres cubes de gaz supplémentaires (de quoi remplir 130 méthaniers de GNL), pour se mettre à l'abri avec des stocks remplis à 90%.
Mais cela suppose aussi que le gazoduc Nord Stream, principale voie de livraison par la mer Baltique et actuellement en maintenance, soit bien redémarré par les Russes mercredi, et ce jusqu'à début octobre. S'il ne l'était pas, la situation serait encore plus compliquée. Or "on ne peut écarter un arrêt complet", dit M. Birol.
Face à cela, l'AIE préconise en urgence des mesures telles que des systèmes d'enchère pour la vente de gaz aux industriels, privilégier temporairement d'autres sources d'électricité y compris charbon ou pétrole, ou encore lisser les pics de consommation en gaz et électricité via une coordination européenne accrue.
La demande électrique peut être réduite en fixant des normes dans la climatisation par exemple, bâtiments publics en tête, ajoute Fatih Birol, qui appelle les "gouvernements à préparer les populations" via des campagnes, car "chaque action compte. Des gestes simples comme baisser le chauffage de quelques degrés peut économiser la même quantité de gaz que celle fournie par Nord Stream sur un hiver".
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France: la grande distribution dévoile sa stratégie face au risque de pénurie d'électricité #
Extinction des enseignes lumineuses dès la fermeture, réduction de l'éclairage, voire baisse de la température: en France, face aux inquiétudes sur l'approvisionnement électrique cet hiver, le secteur de la grande distribution s'est accordé sur une stratégie de réduction de sa consommation d'énergie.
Le président Emmanuel Macron avait expliqué le 14 juillet que l'État préparait un "plan de sobriété" énergétique pour faire face au risque de pénurie liée à la guerre en Ukraine, appelant à "rentrer collectivement dans une logique de sobriété".
La fédération Perifem, qui rassemble l'ensemble des acteurs de la distribution pour agir sur les sujets énergétiques ou environnementaux, évoque dans un communiqué "le risque de pénuries d'approvisionnement électrique annoncées par le gouvernement pour cet hiver", ce qui la pousse à définir des "mesures communes et concrètes" déployées à compter du 15 octobre.
Il est prévu d'éteindre les enseignes lumineuses "dès la fermeture du magasin" - contre en général une heure après la fermeture actuellement - et de "systématiser la baisse d'intensité lumineuse", en réduisant de moitié l'éclairage de la surface de vente avant l'arrivée du public et de 30% lors des "périodes critiques de consommation".
Sont également prévues d'autres mesures comme "la coupure du renouvellement d'air la nuit, le décalage de la production de glace" et des mesures d'urgence prévoyant notamment de baisser la température des points de vente à 17 degrés cet automne et cet hiver, en cas de demande d'une autorité régulatrice.
Ces premières mesures, actées par les supermarchés E.Leclerc, Carrefour, Système U, Les Mousquetaires Intermarché, Auchan, Casino, Franprix, Monoprix, Lidl ou encore Picard, constituent aussi des mesures d'économie pour les enseignes, face à la hausse du coût de l'énergie.
"C'est une première étape qui est franchie, avec des mesures immédiates, que la ministre avait appelées de ses voeux", a réagi le cabinet de la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher, tout en appelant à "poursuivre ce travail et à aller plus loin".
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