Kenya: le président sortant Kenyatta promet une "transition en douceur" #
Le président sortant du Kenya, Uhuru Kenyatta, a assuré jeudi que la transition se ferait "en douceur" après la présidentielle âprement disputée du 9 août et dont les résultats, annoncés lundi, pourraient être contestés en justice.
Le chef de l'Etat sortant a assuré lors d'une rencontre avec des représentants religieux que "le processus de transition se ferait en douceur", a rapporté la présidence.
Il ne s'est pas encore exprimé publiquement pour saluer la victoire de William Ruto, son vice-président, vainqueur de Raila Odinga avec environ 233.000 voix d'avance, dans l'une des présidentielles les plus serrées de l'histoire du Kenya qui a dans le passé été secoué par des contestations post-électorales parfois marquées de violences sanglantes.
Elu président en 2013 puis réélu en 2017, Uhuru Kenyatta ne pouvait briguer de troisième mandat. Il a apporté son soutien à Raila Odinga, figure de l'opposition en lice pour la cinquième fois pour la fonction suprême.
"Le Kenya restera déterminé à enraciner les principes de bonne gouvernance afin de garantir que le pays maintienne sa position d'exemple éclatant de démocratie sur le continent, en maintenant la paix pendant cette période de transition", a déclaré la présidence sur Twitter.
Lundi, après six jours d'interminables attente pour les 50 millions de Kényans, le président de la Commission électorale indépendante (IEBC), organe indépendant apparu profondément divisé, a annoncé la victoire de William Ruto à 50,49% des voix contre 48,85% pour Raila Odinga.
Ce dernier a rejeté mardi ces résultats, les qualifiant de "parodie". Mais il a toutefois appelé ses partisans au calme et indiqué qu'il poursuivrait "toutes les options légales" disponibles.
Toute requête en contestation doit être déposée d'ici lundi 22 août auprès de la Cour suprême, qui dispose ensuite de 14 jours pour rendre sa décision. Si elle ordonne l'annulation, un nouveau scrutin doit être organisé dans les 60 jours.
twx-al/sva/emp
La Commission électorale, organe crucial et sous pression dans les élections kényanes #
La Commission électorale indépendante du Kenya (IEBC) est une fois de plus sous le feu des projecteurs, soumise à une intense pression après la révélation de profondes divisions en son sein et un possible recours du perdant à la présidentielle du 9 août.
Son président Wafula Chebukati a annoncé lundi soir la victoire à 50,49% du vice-président sortant William Ruto, qui était perçu comme le challenger, face à Raila Odinga, figure de l'opposition soutenue par le pouvoir.
Voici les principales choses à savoir sur cet organe crucial dans les très contestées élections kényanes.
L'IEBC est depuis des mois regardée avec suspicion, après avoir été pointée du doigt en 2017 lorsque la Cour Suprême avait annulé puis reprogrammé la présidentielle, lui reprochant une élection "ni transparente, ni vérifiable" et de ne pas avoir donné accès à ses serveurs informatiques.
Cette pression est montée en intensité à mesure que l'attente des résultats se prolongeait, entre le 9 et le 15 août, six longs jours où elle était moquée, notamment sur les réseaux sociaux, pour sa lenteur.
Lundi soir, à la surprise générale, quatre de ses sept commissaires ont rejeté les résultats quelques minutes avant leur annonce, reprochant à M. Chebukati sa gestion "opaque" et son absence de concertation.
Journaux et experts kényans semblent divisés sur leurs arguments. Selon l'avocat Charles Kanjama, la Constitution n'est "pas claire" sur la nécessité d'une entente entre les commissaires avant l'annonce. "C'est pourquoi il y a maintenant une certaine ambiguïté", dit-il à l'AFP.
"L'IEBC vire à la mascarade alors que ses dirigeants s'accusent mutuellement", titrait jeudi le quotidien Daily Nation, au sujet d'une institution familière des soubresauts et drames.
Au cours de la saga électorale de 2017, l'IEBC avait fait l'objet d'un véritable feuilleton avec la démission de plusieurs commissaires, dont Roselyn Akombe, partie avec fracas aux Etats-Unis, disant craindre pour sa vie et accusant ses collègues de parti pris en faveur du pouvoir.
Le même jour, Chebukati s'était dit incapable de garantir l'équité de la nouvelle élection d'octobre, critiquant avec virulence les dirigeants politiques kényans.
Avant même le premier vote d'août, la dépouille d'un haut responsable de l'IEBC, Chris Msando, avait été retrouvée fin juillet à Nairobi avec des traces de torture, suscitant la consternation.
Wafula Chebukati, un avocat dont le visage soucieux a été ces derniers jours scruté par tout le pays, fut nommé à son poste en janvier 2017, après le départ de son prédécesseur, déjà très critiqué.
Après le fiasco de 2017, le fait qu'il reste en poste pour une deuxième élection fut une certaine surprise.
"Je me présente devant vous malgré les intimidations et les harcèlements", a déclaré lundi soir Chebukati au pupitre du centre de comptage de l'IEBC, en partie saccagé quelques minutes plus tôt par des agents de partis furieux.
Plus largement, l'IEBC a regretté les "arrestations arbitraires" de ses agents, ainsi que le "meurtre" d'un responsable de circonscription dans la périphérie de Nairobi.
En 2017, la commissaire Akombe avait décrit Chebukati comme "une personne de bonne volonté" mais "assiégée".
Lundi après son annonce, l'homme a été dépeint en "héros" par Ruto, puis vilipendé par Odinga qui a qualifié d'invalide sa "prétendue annonce" des résultats.
Le niveau général de préparation de l'IEBC et la fiabilité de ses kits électroniques - utilisés pour identifier biométriquement les électeurs et transmettre les résultats - ont été particulièrement questionnés.
Mais les observateurs, internationaux comme locaux, ont plutôt salué sa gestion du jour du vote.
Le Groupe d'observation des élections (Elog), association qui scrute les élections kényanes depuis 2010, a ainsi affirmé que l'identification et la transmission des votes avait fonctionné à respectivement 93,7% et 97%.
Cette organisation indépendante a également estimé que la gestion du comptage avait été plus "ouverte et sécurisée" et que les résultats "concordaient" avec ses calculs.
Le camp Odinga a promis de "poursuivre tous les moyens légaux" à sa disposition pour faire annuler les résultats annoncés, un nouveau recours devant la Cour Suprême est donc possible.
En 2017, la défense de l'IEBC avait été considérée comme faible devant la Cour, mais elle s'est mieux préparée à cette éventualité cette année, formant notamment assidument ses avocats, note l'universitaire Macharia Munene.
"Les responsables ont été très attentifs à ne pas se faire attraper de la même façon qu'ils se sont fait attraper en 2017", explique-t-il à l'AFP.
md/sva/emp
Kenya: le président élu Ruto promet un gouvernement "transparent" #
Le président élu du Kenya William Ruto a promis mercredi, deux jours après avoir été déclaré vainqueur de l'élection du 9 août, que son futur gouvernement s'empresserait de répondre "aux énormes attentes" des Kényans et rendrait des comptes.
"Nous allons d'ici peu prendre des mesures pour diriger un gouvernement transparent, démocratique", et qui "rend des comptes", s'est engagé William Ruto, élu au terme d'un des scrutins les plus serrés depuis l'indépendance en 1963.
Il s'exprimait à Nairobi à l'issue d'une réunion avec les membres de sa coalition, Kenya Kwanza.
Pour l'instant, seuls les comités parlementaires peuvent demander aux ministres de s'expliquer, via un processus que certains jugent opaque.
"Les attentes des Kényans sont énormes et par conséquent nous n'avons pas le luxe de perdre du temps", a-t-il poursuivi, deux jours après sa victoire, annoncée à 50,49% des voix contre 48,85% pour Raila Odinga, figure de l'opposition soutenue par le président sortant, et qui a rejeté mardi ces résultats.
Selon M. Ruto, les Kényans ont envoyé "un message très clair aux dirigeants: ils veulent que nous fassions avancer le pays", touché par une flambée des prix des denrées alimentaires et de l'essence liée à la pandémie et amplifiée par la guerre en Ukraine.
Il a aussi promis mercredi de veiller à ce que les fonctionnaires servent "tous les Kényans de manière égale", indépendamment de leur "tribu" ou de leurs "affiliations politiques".
"Nous nous assurerons qu'aucune partie du Kenya ne sera laissée pour compte, (...) qu'aucune communauté du Kenya ne sera laissée de côté. Nous allons avancer ensemble, en tant que nation, parce que les Kényans sont déjà en train de nous dire que nous avons besoin de changement", a-t-il poursuivi.
Au Kenya, qui compte officiellement 46 ethnies et où l'appartenance communautaire est traditionnellement importante sur l'échiquier politique, "il n'y aura pas de place pour l'exclusion", a-t-il insisté.
Peu avant la proclamation des résultats lundi, quatre des sept membres de la Commission électorale (IEBC) s'en sont désolidarisés, rejetant dans un coup de théâtre un processus au "caractère opaque".
Mercredi, le président de la commission Wafula Chebukati a rejeté ces allégations, affirmant que les membres de son personnel étaient "harcelés et intimidés". En conséquence, il a annoncé que l'IEBC reportait à nouveau plusieurs élections locales et gubernatoriales qui n'ont pas eu lieu le 9 août en raison de divers incidents.
Mardi, M. Odinga avait qualifié de "parodie" le résultat de ce scrutin largement pacifique, considérant que les chiffres annoncés par l'IEBC étaient "nuls et non avenus".
Raila Odinga, cinq fois candidat malheureux à la présidentielle, a déjà contesté les résultats en justice en 2013 et 2017. Mardi, il a indiqué qu'il poursuivrait "toutes les options légales" disponibles.
Toute requête en contestation doit être déposée d'ici lundi auprès de la Cour suprême, qui dispose ensuite de 14 jours pour rendre sa décision. Si elle ordonne l'annulation, un nouveau scrutin doit être organisé dans les 60 jours.
"En ce qui concerne l'élection, notre victoire a été reportée, mais elle est en train de revenir", a déclaré mercredi à la presse Martha Karua, colistière de M. Odinga.
Dans ce pays, qui fait figure d'îlot de stabilité démocratique dans la région est-africaine, les résultats des élections ont tous été contestés depuis 2002, en justice ou dans la rue.
En 2017, des dizaines de personnes avaient péri lors de manifestations réprimées par la police. Dix ans plus tôt, le contentieux post-électoral avait provoqué des affrontements interethniques et la mort de plus de 1.100 personnes.
Comme le camp Odinga, le camp Ruto affirme avoir remporté la majorité des sièges au Parlement. Les résultats donnent pour l'instant les deux coalitions au coude-à-coude, mais le vote a été repoussé dans quatre circonscriptions.
ho/al/md/cl/mba
Kenya: le président élu Ruto promet un gouvernement "transparent" qui "rend des comptes" #
Le président élu du Kenya William Ruto a promis mercredi, deux jours après avoir été déclaré vainqueur de l'élection du 9 août, que son futur gouvernement s'empresserait de répondre "aux énormes attentes" des Kényans et rendrait des comptes.
"Nous allons d'ici peu prendre des mesures pour diriger un gouvernement transparent, démocratique, et qui "rend des comptes", s'est engagé William Ruto, élu au terme d'un des scrutins les plus serrés depuis l'indépendance en 1963.
Il s'exprimait à Nairobi à l'issue d'une réunion avec les membres de sa coalition, Kenya Kwanza.
Pour l'instant, seuls les comités parlementaires peuvent demander aux ministres de s'expliquer, via un processus que certains jugent opaque.
"Les attentes des Kényans sont énormes et par conséquent nous n'avons pas le luxe de perdre du temps", a-t-il poursuivi, deux jours après sa victoire annoncée à 50,49% des voix contre 48,85% pour Raila Odinga, figure de l'opposition soutenue par le président sortant, et qui a rejeté mardi ces résultats.
Selon M. Ruto, les Kényans ont envoyé "un message très clair aux dirigeants: ils veulent que nous fassions avancer le pays", touché par une flambée des prix des denrées alimentaires et de l'essence liée à la pandémie et amplifiée par la guerre en Ukraine.
William Ruto a par ailleurs promis mercredi de veiller à ce que les fonctionnaires servent "tous les Kényans de manière égale", indépendamment de leur "tribu" ou de leurs "affiliations politiques".
"Nous nous assurerons qu'aucune partie du Kenya ne sera laissée pour compte, (...) qu'aucune communauté du Kenya ne sera laissée de côté. Nous allons avancer ensemble, en tant que nation parce que les Kényans sont déjà en train de nous dire que nous avons besoin de changement", a-t-il poursuivi.
Au Kenya, qui compte officiellement 46 ethnies et où l'appartenance communautaire est traditionnellement importante sur l'échiquier politique, "il n'y aura pas de place pour l'exclusion", a-t-il insisté.
Dans ce pays, qui fait figure d'îlot de stabilité démocratique dans la région est-africaine, les résultats des élections ont tous été contestés depuis 2002, en justice ou dans la rue.
En 2017, des dizaines de personnes sont mortes, lors de manifestations réprimées par la police. Dix ans plus tôt, le contentieux post-électoral avait provoqué des affrontements interethniques et la mort de plus de 1.100 personnes.
Raila Odinga, cinq fois candidats malheureux à la présidentielle, a déjà contesté les résultats en justice en 2013 et 2017. Mardi, il a indiqué qu'il poursuivrait "toutes les options légales" disponibles.
Comme le camp Odinga, le camp Ruto affirme avoir remporté la majorité des sièges au Parlement. Les résultats donnent pour l'instant les deux coalitions au coude à coude mais le vote a notamment été repoussé dans quatre circonscriptions.
ho/al/md/cl
Kenya: le perdant Raila Odinga rejette les résultats de la présidentielle #
Raila Odinga a rejeté mardi les résultats de l'élection présidentielle du 9 août donnant son rival William Ruto vainqueur, les qualifiant de "parodie" et promettant de poursuivre toutes les options légales à sa disposition.
Six jours après l'élection du 9 août, marqués par le calme en dépit d'une impatience grandissante, le vice-président sortant Ruto a été déclaré lundi soir vainqueur avec 50,49% des voix contre 48,85% pour Raila Odinga, par une Commission électorale secouée de divisions internes.
Les yeux du pays étaient désormais tournés vers cette figure de l'opposition, qui, à 77 ans, concourait pour la cinquième fois et restait invisible et muet depuis lundi.
Depuis son quartier général, Odinga, coiffé d'un large chapeau bleu au couleur de sa coalition, a fermement rejeté ces résultats, parmi les plus serrés de l'histoire du pays (quelques 233.000 voix d'écart).
"Ce à quoi nous avons assisté hier est une parodie et un mépris évident de la Constitution", a-t-il déclaré, appelant ses partisans au calme et assurant qu'il poursuivrait "toutes les options légales" disponibles.
"Nous le ferons au regard des nombreuses failles dans les élections", a-t-il ajouté, sans aller jusqu'à promettre un recours devant la Cour suprême.
Odinga est cependant familier de ces recours, qu'il a déposés en 2013 puis 2017. Cette dernière année, la Cour suprême avait invalidé la présidentielle en raison d'"irrégularités", une première en Afrique.
En 2007, une élection elle aussi très serrée, Odinga avait également, sans aller devant la justice, refusé le résultat, ce qui avait déclenché la pire crise post-électorale de l'histoire du pays, avec plus de 1.100 morts dans des affrontements interethniques.
Ruto, qui tenait dans cette élection le rôle de challenger, a été déclaré lundi cinquième président du Kenya depuis l'indépendance en 1963. Il est le deuxième président de sa communauté, les Kalenjin, à accéder à ce poste.
Le riche homme d'affaires de 55 ans a immédiatement assuré qu'il travaillerait avec "tous les leaders" politiques, promettant un pays "transparent, ouvert et démocratique".
L'annonce des résultats a déclenché lundi soir des manifestations violentes mais localisées dans des bastions d'Odinga, dont des quartiers populaires de Nairobi et Kisumu (ouest) où le calme était revenu mardi.
"La parole de Raila est loi dans cette partie du pays", assure Abel Tom, homme d'affaire de 48 ans qui veut croire qu'"il n'y aura plus de violence dans la ville de Kisumu. Les gens s'inspireront de la déclaration du Premier ministre" Raila Odinga.
Mais de nombreux commerces restent fermés et l'économie tourne au ralenti depuis le vote, suscitant l'impatience de la population.
La campagne a notamment été dominée par la flambée du coût de la vie, en particulier des produits de base, la locomotive économique d'Afrique de l'Est étant durement touchée par les effets de la pandémie et de la guerre en Ukraine. Ruto avait fait de ce thème son cheval de bataille.
De son côté, Raila Odinga, qui s'était notamment engagé à lutter contre la corruption, avait reçu l'appui précieux du président sortant Uhuru Kenyatta et du parti au pouvoir.
"Il avait globalement tout le soutien dont il avait besoin pour arracher la victoire, excepté la majorité des gens", a décrypté pour l'AFP Zaynab Mohamed, une analyste politique pour Oxford Economics.
Le Groupe d'observation des élections (Elog), association qui scrute depuis 2010 le bon déroulement des votes, a déclaré mardi que ses calculs "concordaient" avec les résultats de l'IEBC, avec 50,7% pour Ruto et 48,7% pour Odinga.
Mardi après-midi, le président du Conseil européen, Charles Michel a félicité dans un tweet le président-élu Ruto, et exhorté "en cas de contestation éventuelle à utiliser les mécanismes de règlement des litiges existants".
La Commission électorale, bien que saluée par les observateurs pour sa gestion le jour du scrutin, est cette année encore soumise à une intense pression.
Quelques minutes avant que son président n'annonce les résultats lundi, quatre de ses sept membres s'en sont désolidarisés, rejetant dans un coup de théâtre un processus au "caractère opaque".
Mardi, ils ont détaillé devant la presse leurs arguments, dénonçant notamment un total de pourcentages atteignant 100,01%, un chiffre qualifié par eux d'"absurdité mathématique".
Des analystes, dont Nic Cheeseman, professeur à l'université de Birmingham (Royaume-Uni) et fin connaisseur du Kenya, ont cependant souligné que cet écart pourrait s'expliquer par le fait d'arrondir les pourcentages.
"Attendez-vous à beaucoup de controverses. Attendez-vous à un recours en justice. Attendez-vous à ce que cela dure et dure" encore, a déclaré ce dernier sur Twitter.
Si elle est saisie dans la semaine à venir, la Cour suprême aura 14 jours pour rendre sa décision. Dans le cas contraire, William Ruto prendra ses fonctions dans les deux semaines.
md-al-bur/cl
Kenya: le perdant Raila Odinga rejette les résultats de la présidentielle #
Raila Odinga a rejeté mardi les résultats de l'élection présidentielle du 9 août donnant son rival William Ruto vainqueur, les qualifiant de "parodie" et promettant de poursuivre toutes les options légales à sa disposition.
Six jours après l'élection du 9 août, marqués par le calme en dépit d'une impatience grandissante, le vice-président sortant Ruto a été déclaré lundi soir vainqueur avec 50,49% des voix contre 48,85% pour Raila Odinga, par une Commission électorale secouée de divisions internes.
Les yeux du pays étaient désormais tournés vers ce vétéran de l'opposition aujourd'hui soutenu par le régime, qui, à 77 ans, concourait pour la cinquième fois et restait invisible et muet depuis lundi.
Depuis son quartier général, Raila Odinga, coiffé d'un large chapeau bleu - couleur de sa coalition -, a fermement rejeté ces résultats, parmi les plus serrés de l'histoire du pays (quelques 233.000 voix d'écart).
"Ce à quoi nous avons assisté hier est une parodie et un mépris évident de la Constitution", a-t-il déclaré, appelant ses partisans au calme et assurant qu'il poursuivrait "toutes les options légales" disponibles.
"Nous le ferons au regard des nombreuses failles dans les élections", a-t-il ajouté, sans aller jusqu'à promettre un recours devant la Cour suprême.
Odinga est cependant familier de ces recours, qu'il a déposés en 2013 puis 2017. Cette dernière année, la Cour suprême avait invalidé la présidentielle en raison d'"irrégularités", une première en Afrique.
En 2007, une élection elle aussi très serrée, Odinga avait également, sans aller devant la justice, refusé le résultat, ce qui avait déclenché la pire crise post-électorale de l'histoire du pays, avec plus de 1.100 morts dans des affrontements interethniques.
Ruto, qui tenait dans cette élection le rôle de challenger, a été déclaré lundi cinquième président du Kenya depuis l'indépendance en 1963. Il est le deuxième président de sa communauté, les Kalenjin, à accéder à ce poste.
Le riche homme d'affaires de 55 ans a immédiatement assuré qu'il travaillerait avec "tous les leaders" politiques, promettant un pays "transparent, ouvert et démocratique".
L'annonce des résultats a déclenché lundi soir des manifestations violentes mais localisées dans des bastions d'Odinga, dont des quartiers populaires de Nairobi et Kisumu (ouest). Le calme y était revenu mardi matin.
Mais de nombreux commerces restent fermés et l'économie tourne au ralenti depuis le vote il y a une semaine, suscitant l'impatience de la population.
"La vie doit reprendre son cours normal. Les politiciens ne devraient pas faire que la vie s'arrête", estimait Bernard Isedia, 32 ans, électeur d'Odinga et chauffeur de taxi à Nairobi.
La campagne a notamment été dominée par la flambée du coût de la vie, en particulier des produits de base, la locomotive économique d'Afrique de l'Est étant durement touchée par les effets de la pandémie et de la guerre en Ukraine. Ruto avait fait de ce thème son cheval de bataille.
De son côté, Raila Odinga, qui s'était notamment engagé à réformer le pays et lutter contre la corruption, avait reçu l'appui précieux du président sortant Uhuru Kenyatta et du parti au pouvoir.
"Il avait globalement tout le soutien dont il avait besoin pour arracher la victoire, excepté la majorité des gens", a décrypté pour l'AFP Zaynab Mohamed, une analyste politique pour Oxford Economics.
Le Groupe d'observation des élections (Elog), association qui scrute depuis 2010 le bon déroulement des votes, a déclaré mardi que ses calculs "concordaient" avec les résultats de l'IEBC, avec 50,7% pour Ruto et 48,7% pour Odinga.
La Commission électorale, bien que saluée par les observateurs pour sa gestion le jour du scrutin, est cette année encore soumise à une intense pression.
Quelques minutes avant que son président n'annonce les résultats lundi, quatre de ses sept membres s'en sont désolidarisés, rejetant dans un coup de théâtre un processus au "caractère opaque".
Mardi, venus détailler devant la presse leurs arguments, ces quatre "rebelles" ont notamment dénoncé un total de pourcentages atteignant 100,01%, un chiffre qualifié par eux d'"absurdité mathématique".
Des analystes, dont Nic Cheeseman, professeur à l'université de Birmingham (Royaume-Uni) et fin connaisseur du Kenya, ont cependant souligné que cet écart pourrait s'expliquer par le fait d'arrondir les pourcentages.
"Attendez-vous à beaucoup de controverses. Attendez-vous à un recours en justice. Attendez-vous à ce que cela dure et dure" encore, a déclaré ce dernier sur Twitter.
Si elle est saisie dans la semaine à venir, la Cour suprême aura 14 jours pour rendre sa décision. Dans le cas contraire, William Ruto prendra ses fonctions dans les deux semaines.
md-bur/al/cl
Pouvoir d'achat, dette, corruption: les défis du nouveau président kényan #
De la lutte contre la vie chère à celle contre la corruption endémique, nombreux sont les défis qui attendent le nouveau président élu du Kenya, William Ruto, pour maintenir le cap de cette dynamique économie d'Afrique de l'Est.
La problématique de la vie chère s'est imposée durant la campagne.
Des centaines de manifestants déjà durement touchés par les retombées économiques du Covid-19 ont menacé début juillet de bouder les urnes le 9 août si les prix de l'essence et des denrées alimentaires ne baissaient pas.
Le gouvernement a évoqué le 20 juillet une subvention pour réduire le prix de la farine de maïs, qui sert à préparer le plat de base dans le pays, l'ugali.
Mais la promesse est restée lettre morte. Ces coups de pouce sont de plus temporaires, "populistes" et "simplistes" au moment où l'inflation grimpe à des niveaux inédits depuis cinq ans pour atteindre 8,3% en juillet, selon Jared Osoro, économiste à l'université de Nairobi.
Les impacts du conflit en Ukraine sont venus assombrir les perspectives de reprise économique.
De 7,5% en 2021, la croissance devrait s'établir à 5,5% en 2022, selon la Banque mondiale qui prévoit par ailleurs une détérioration de la balance commerciale cette année. Le Kenya importe habituellement un cinquième de ses céréales de Russie et 10% d'Ukraine, selon les chiffres officiels.
L'agriculture (plus de 22% du PIB) pâtit aussi de l'envol des prix des engrais et se voit par ailleurs menacée par la sécheresse.
D'ici 2050, la moitié de la population vivra en ville, ce qui entraînera "une myriade de défis" dont l'éducation et l'accès à la santé, note Oxfam. Selon l'ONG, 34% des 17 millions de personnes pauvres au Kenya vivent dans des zones urbaines, pour la plupart dans des logements informels.
Pour accompagner le développement du pays, les gouvernements successifs depuis 2008 poursuivent l'ambitieux programme Vision2030, principalement axé sur les grands projets d'infrastructures.
Conséquence: sous l'ère Uhuru Kenyatta (2013-2022), la dette a plus que quadruplé pour avoisiner 70 milliards de dollars.
La Chine est désormais le deuxième bailleur du Kenya, derrière la Banque mondiale. Pékin a notamment prêté 5 milliards de dollars pour l'emblématique ligne de train reliant Nairobi au port de Mombasa.
Le Fonds monétaire international, qui a prêté l'année dernière 2,34 milliards de dollars au Kenya, a salué en juillet la poursuite du rebond économique et l'augmentation des recettes fiscales.
Mais "le Kenya reste exposé à des risques élevés de surendettement, et c'est pour cela qu'il est important qu'il reste fermement sur la trajectoire fixée pour réduire la vulnérabilité de la dette", commente Mary Goodman, cheffe de la mission du FMI.
Le bilan en la matière a "stagné", selon l'ONG Transparency International qui plaçait le pays 128e sur 180 dans son dernier index mondial de perception de la corruption.
Sous la pression internationale, de bailleurs et d'investisseurs en particulier, il y a eu un "renforcement des institutions de contrôle", une médiatisation du phénomène incrusté dans toutes les strates de la société et "un assainissement du milieu des affaires", énumère Alexia Van Rij, spécialiste en évaluation des politiques publiques du développement.
La justice s'est par ailleurs penchée sur quelques affaires troubles, dont l'enrichissement du nouveau vice-président élu, Rigathi Gachagua.
Si des dizaines de hauts responsables ont été inculpés depuis 2018, dont l'ex-ministre des Finances Henry Rotich, "aucun gros poisson n'a été pris", relève Alexia Van Rij.
Avec les trois-quarts de la population âgés de moins de 34 ans, la jeunesse est un des atouts du Kenya, mais son insertion dans l'emploi reste un défi.
Ils sont environ 500.000 chaque année à décrocher un diplôme dans le supérieur. Mais la corruption, le népotisme ou l'exigence d'expérience constituent autant d'obstacles à leur entrée dans la vie active.
Selon des chiffres officiels publiés en 2020, 5 millions de jeunes étaient sans emploi.
La jeunesse est une "bombe à retardement démographique, sociale et économique", estime Alex Awiti, chercheur kényan en politique publique.
Une des pistes est selon lui de "créer des emplois à une échelle industrielle" avec des incitations financières, notamment pour développer le secteur privé dans un pays où 80% de la main d'oeuvre se trouve dans l'économie informelle.
Il faut aussi, selon lui, développer l'agriculture et "renforcer les compétences dans le secteur industriel et les opportunités dans le secteur manufacturier".
Fait inédit depuis 2002, le nouveau président élu n'est pas issu de l'influente ethnie kikuyu au solide réseau économique.
William Ruto est kalenjin, comme l'ancien président Daniel arap Moi (1978-2002). Il devra donc bâtir un nouvel équilibre politico-ethnique dans un pays aux 46 ethnies, où l'appartenance communautaire, instrumentalisée depuis les Britanniques, est un pion essentiel de l'échiquier politique.
al/md/jhd
Cinq choses à savoir sur le Kenya #
Le Kenya, riche de sa faune, ses plages et ses terres agricoles, est un moteur économique de l'Afrique de l'Est, et ce malgré la pandémie et une sécheresse inédite depuis 40 ans.
Voici cinq choses à savoir sur ce pays niché entre les Grands Lacs et l'océan Indien qui vient d'élire le vice-président sortant William Ruto à sa tête.
Le Kenya accède à l'indépendance en 1963 après huit ans de rébellion contre le régime colonial britannique. Jomo Kenyatta devient le premier président de cette jeune République, remplacé à sa mort en 1978 par Daniel arap Moi.
En 2002, onze ans après l'abandon du régime du parti unique, première alternance démocratique: l'opposant Mwai Kibaki remporte la présidentielle.
Mais en 2007, l'annonce contestée de sa réélection entraîne des violences politico-ethniques inédites qui se soldent par plus de 1.100 morts. En 2008, un gouvernement d'union nationale est mis en place, dont Raila Odinga, aujourd'hui candidat, est Premier ministre.
Ce dernier est battu à la présidentielle de 2013 par le fils de Jomo Kenyatta, Uhuru, pourtant alors inculpé par la Cour pénale internationale pour son rôle présumé dans les violences post-électorales de 2007-2008.
Bis repetita en août 2017. La présidentielle est cependant annulée pour "irrégularités" par la Cour suprême, une première en Afrique. Uhuru Kenyatta est élu lors d'un nouveau scrutin, boycotté par son opposant de toujours, Raila Odinga.
Les deux hommes scellent une alliance surprenante en 2018, aux dépens du vice-président et dauphin désigné William Ruto.
Ce dernier est finalement élu avec 50,49% des voix au terme d'un scrutin très serré, selon les résultats de la Commission électorale proclamés lundi par son président, mais contestés par une partie des commissaires électoraux.
Le pays compte une cinquantaine de parcs et réserves naturelles qui ont attiré 1,5 million de visiteurs en 2021. Parmi ses joyaux, plus de 30.000 girafes et le célèbre "Big five": lion, éléphant, rhinocéros, buffle et léopard.
Wangari Maathai est une des ambassadrices les plus connues de cette biodiversité, récompensée en 2004 par le prix Nobel de la paix pour, entre autres, son travail autour de la plantation d'arbres.
Le Kenya est aussi surnommé "le berceau de l'humanité".
La vallée du Rift, qui s'étend de la Tanzanie à l'Éthiopie en passant par le Kenya, a été le théâtre de découvertes majeures de fossiles. Des restes d'hominidés vieux de près de 6 millions d'années ont été trouvés dans la région du Turkana.
Le Kenya est l'une des économies les plus dynamiques d'Afrique de l'Est et soigne son image de hub régional.
Son profil est atypique en Afrique: relativement peu de ressources naturelles mais un dynamisme économique et un secteur des services remarquables. L'agriculture est aussi un de ses piliers (plus de 22% du PIB) et la source principale des exportations (thé, fleurs, café).
Après un recul de 0,3% en 2020 lié à la pandémie, l'économie du Kenya a amorcé une reprise en 2021. Mais les prix du carburant et des denrées alimentaires ont explosé, en particulier celui de la farine de maïs - nourriture de base -, attisant la frustration dans ce pays rongé par une corruption endémique. En 2021, il était classé 128e sur 180 pays et territoires par Transparency International.
Les inégalités sont criantes dans le pays, où golfs et bidonvilles peuvent être mitoyens et où le salaire minimum mensuel est de 15.120 shillings (124 euros). Selon l'ONG Oxfam, la fortune des deux Kényans les plus riches est supérieure aux revenus cumulés de 30% de la population, soit 16,5 millions de personnes.
La population d'environ 50 millions d'habitants, selon les chiffres officiels, est en majorité jeune et chrétienne.
Sur les plus de 40 ethnies recensées, les Kikuyu sont le premier groupe numériquement, devant les Luhya, les Kalenjin et les Luo.
Le Kenya fait partie des grandes nations de la course de fond et demi-fond, avec des champions comme Eliud Kipchoge ou Faith Kipyegon.
Le sprinter Ferdinand Omanyala s'est également fait un nom au pays des coureurs de fond, en signant le record d'Afrique du 100 m en 2021 (9.77), puis en réalisant la troisième meilleure performance mondiale en 2022 (9.85).
Mais l'ombre du dopage plane régulièrement. Le pays a été à deux doigts de l'exclusion des Jeux de Rio en 2016 avant d'annoncer l'introduction de mesures spécifiques comme l'adoption d'une loi antidopage.
Le 7 août 1998, un attentat visant l'ambassade américaine à Nairobi fait 213 morts et 5.000 blessés. Il est revendiqué par Al-Qaïda.
Après l'entrée en 2011 de l'armée kényane en Somalie pour y combattre les islamistes radicaux shebab, les attaques se sont multipliées, avec notamment celles du Westgate à Nairobi en 2013 puis de Garissa en 2015. Elles feront respectivement 67 et 148 morts.
En 2019, 21 personnes meurent dans un nouvel attentat mené contre le complexe hôtelier Dusit, à Nairobi.
Depuis, les attaques se font plus sporadiques, concentrées dans l'est du pays.
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